Intervention de Elisabeth Borne

Réunion du 4 décembre 2020 à 11h00
Loi de finances pour 2021 — Travail et emploi

Elisabeth Borne :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais pour commencer m’associer pleinement aux hommages qui ont été rendus par les parlementaires, à la suite de la disparition du président Giscard d’Estaing.

J’échangeais, hier, avec mes homologues européens lors du conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » pour coordonner nos actions communes face à la crise. Je pense que l’héritage du président Giscard d’Estaing est évidemment européen et que notre réponse à la crise doit plus que jamais s’inscrire dans ce cadre. La présidence française de l’Union européenne en 2022 sera notamment l’occasion d’approfondir le socle européen des droits sociaux. La relance de l’économie européenne – j’ai eu l’occasion de le dire – démarre par le social et une partie substantielle du plan de relance est abondée par des fonds européens.

Pour faire face à la crise économique et sociale que nous traversons, nous avons dès le début déployé un dispositif d’aide parmi les plus complets et les plus performants d’Europe. Alors que la crise dure, le ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion fait le choix, pour préserver les secteurs les plus durement percutés, d’accentuer son arsenal de mesures.

Chaque semaine, j’organise une visioconférence avec les services déconcentrés de mon ministère et je sais quelle est l’intensité de la tâche, dans cette période exceptionnelle, pour tous les agents mobilisés sur le terrain.

Je rappelle également que le service public de l’emploi est resté ouvert et réactif pendant toute la durée du confinement.

La réouverture de nos commerces depuis une semaine, assortie de règles sanitaires renforcées, était attendue par les Françaises et les Français. Avec le ministère de l’économie, des finances et de la relance, nous sommes attentifs à la situation de nos commerçants qui bénéficient d’une activité partielle sans aucun reste à charge pour l’employeur.

Notre objectif est de maintenir des conditions très protectrices pour les entreprises et les salariés, dont l’activité reste partiellement ou totalement arrêtée. C’est tout le sens des annonces récentes en faveur des saisonniers des stations de sports d’hiver ou de la mesure de prise en charge des congés payés accumulés par les salariés en période d’activité partielle, au bénéfice des secteurs les plus lourdement touchés par la crise – cette mesure était très attendue par les professionnels de l’hôtellerie-restauration.

L’équilibre trouvé est emblématique de l’action que je souhaite porter entre, d’une part, la protection des salariés qui pourront exercer leur droit aux congés payés et, d’autre part, celle des entreprises qui pourront solder ces congés sans en supporter la charge.

La situation sanitaire, loin de remettre en cause les dispositifs du plan de relance, en montre au contraire toute la pertinence. Comme l’a rappelé le Premier ministre à de nombreuses reprises, la territorialisation du plan de relance est un gage d’efficacité et de cohésion. C’est pourquoi nous avons veillé à ce que les élus locaux soient associés à son déploiement, afin de renforcer l’efficacité de l’action de mon ministère, au plus près des bassins d’emploi dans chaque territoire.

Après l’Assemblée nationale, il revient désormais au Sénat de se prononcer sur le budget de relance porté par le projet de loi de finances pour 2021. Je constate avec satisfaction que les deux commissions saisies, celle des finances et celle des affaires sociales, ont adopté les crédits de la mission.

Il s’agit d’un budget ambitieux qui mobilise des moyens sans précédent, non seulement pour donner à chacun la capacité d’accéder à l’emploi et de s’y maintenir durablement, mais aussi pour offrir à nos entreprises les compétences nécessaires aux métiers de demain, de manière à ce qu’elles soient plus résilientes et plus compétitives.

Pour 2021, les crédits alloués au ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion se décomposent en deux volets.

D’une part, les crédits de la mission « Travail et emploi » constituent le « budget socle » de mon ministère. Hors plan de relance, ce budget est en augmentation de plus de 400 millions d’euros et s’élève à 13, 2 milliards pour 2021, conformément aux trajectoires prévues avant la crise pour intensifier l’inclusion de tous dans l’emploi.

En complément, à la suite du renforcement de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté annoncé par le Président de la République et le Premier ministre, nous avons proposé de nouvelles mesures dans le cadre du quatrième projet de loi de finances rectificative.

D’autre part, les crédits exceptionnels de la nouvelle mission « Plan de relance » viennent s’ajouter à l’effort précédent. Quelque 10 milliards d’euros de crédits de paiement sont alloués à mon ministère sur les 22 milliards d’euros du plan France Relance pour 2021, soit près de la moitié des crédits de relance prévus. Le budget socle du ministère en sort considérablement renforcé, ce qui contribue à l’efficacité de notre action d’insertion et de maintien de tous dans l’emploi.

Je reconnais que ces deux volets peuvent compliquer la lecture de ce budget. L’essentiel reste cependant que les moyens sont là.

L’action de mon ministère se développe autour de quatre priorités.

Premièrement, face à la crise, nous déployons une réponse massive, un véritable bouclier anti-licenciements pour sauvegarder et développer les emplois.

Dans le cadre de la relance, nous mobilisons un effort substantiel de 7, 6 milliards d’euros, dont 2, 2 milliards sont financés par l’Unédic, pour prendre en charge l’activité partielle et la formation des salariés pendant leur temps non travaillé.

À cet égard, je voudrais préciser à Mme la sénatrice Gruny qu’il est parfaitement inexact de dire que nous ne nous occupons pas de la formation des salariés en activité partielle. En effet, nous mobilisons un milliard d’euros pour cela. Dès cette année, 300 000 salariés en activité partielle sont partis en formation.

L’objectif est de réarmer nos entreprises pour qu’elles sortent de la crise plus compétitives, grâce à des salariés qui seront montés en compétences. En même temps, nous souhaitons que les salariés aient la maîtrise de leur parcours professionnel, grâce à des perspectives crédibles d’évolution.

En outre, nous avons élaboré avec les partenaires sociaux le dispositif innovant « transition collective », qui favorisera les parcours des branches les plus affectées par la crise vers celles qui restent toujours en tension sur le recrutement. Ce dispositif permet de prendre en charge jusqu’à 100 % de la rémunération et de la formation des salariés dont l’emploi est menacé, pour qu’ils puissent se reconvertir dans des métiers porteurs, présents sur le même territoire.

L’objectif est le même que pour l’activité partielle : tout faire pour former les salariés plutôt que de licencier et de se priver de leurs compétences.

Deuxième priorité, nous veillons à donner à tous les jeunes, quelle que soit leur situation, des solutions d’insertion dans l’emploi.

Sur les 6, 7 milliards d’euros de crédits dont bénéficie le plan « un jeune, une solution », le ministère du travail en pilote la plus grande partie, soit 5, 7 milliards, dont 3, 6 milliards en 2021.

D’une part, nous faisons le pari du soutien à l’embauche pour permettre l’insertion des jeunes sur le marché du travail. Depuis l’été, nous avons mis en place des primes exceptionnelles pour encourager les embauches de jeunes et la signature de contrats en alternance ou en apprentissage, ainsi que de contrats de professionnalisation.

D’autre part, tous les dispositifs existants d’accompagnement et d’inclusion des jeunes dans l’emploi sont considérablement renforcés.

Grâce aux crédits du plan de relance, nous ouvrons 300 000 places supplémentaires en accompagnement et inclusion à destination des jeunes : 50 000 au titre de la garantie jeunes, 80 000 en parcours contractualisé d’accompagnement adapté vers l’emploi et l’autonomie (Pacea), pour 22 millions d’euros, en plus des places déjà prévues dans le budget socle. Nous accompagnerons ainsi 420 000 jeunes en 2021.

Il faut ajouter à cela l’ouverture par Pôle emploi de 140 000 places supplémentaires en accompagnement intensif des jeunes.

Enfin, nous renforçons le budget des missions locales – elles jouent un rôle essentiel dans la période que nous traversons –, en leur attribuant 100 millions d’euros supplémentaires, ce qui porte l’enveloppe à 472 millions d’euros au total.

À la suite des annonces de la semaine dernière, nous avons amplifié cet effort grâce à de nouvelles mesures en faveur des jeunes.

Ainsi, nous prévoyons l’équivalent de 50 000 nouvelles entrées dans le dispositif de la garantie jeunes, ce qui permettra de passer de 100 000 places en 2020 à 200 000 places en 2021. Je précise que les crédits correspondants seront inscrits dans le projet de loi de finances lors de l’examen du texte en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion