Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons commencé l’examen du projet de loi de finances voilà deux semaines. Depuis, nous avons eu l’occasion d’insister sur les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire.
La mission que nous examinons aujourd’hui est emblématique tant des difficultés traversées que de la nécessité d’une réponse à la hauteur.
En effet, pour le sport, la jeunesse et la vie associative, le coup est rude et ses effets se poursuivent. Les pratiques sportives demeurent interrompues sur l’ensemble du territoire. La jeunesse subit de plein fouet des restrictions nécessaires, mais douloureuses, tandis que la vie associative doit se réinventer à l’heure de la « distanciation sociale ».
Pour autant, ces trois axes sont plus que jamais indispensables pour réaffirmer une cohésion nationale ébranlée.
Je retiendrai deux points généraux de présentation.
Pour 2021, les crédits proposés pour la mission connaissent une hausse de 12, 5 % par rapport à l’année précédente.
Il s’agit non pas d’une réponse à la situation actuelle, mais bien d’une tendance de fond, qui s’explique essentiellement par le service national universel (SNU) et la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
La croissance de ces deux postes de dépenses était prévue, mais à défaut de trajectoire budgétaire actualisée, rien n’indique comment la soutenabilité de la mission, dont les crédits ont été multipliés par 2, 7 depuis 2015, sera assurée. Cette progression s’accompagne d’une concentration exceptionnelle des dépenses portées par la mission, qui en affecte la capacité de pilotage.
Trois dispositifs représentent les trois quarts de ses crédits : la subvention à l’Agence nationale du sport (ANS), les politiques de l’engagement de la jeunesse – service civique et service national universel – et les Olympiades de 2024.
L’analyse des crédits est toutefois altérée cette année, en raison de la multiplication des vecteurs budgétaires : les collectifs budgétaires, le projet de loi de finances, mais aussi la mission dédiée au plan de relance.
La mise en œuvre de celui-ci, dont les crédits sont concentrés sur une mission spécifiquement créée, viendra compléter le soutien aux politiques de la mission, à hauteur de 437 millions d’euros en crédits de paiement. Cependant, plus de 80 % de ce montant résulte de la comptabilisation des dépenses tendant à augmenter de 100 000 le nombre de jeunes en service civique en 2021, dont la labellisation « relance » me surprend quelque peu.
Madame la secrétaire d’État, ne faut-il pas s’interroger sur les capacités d’absorber un tel contingent supplémentaire sans que la qualité des missions proposées soit rognée ?
Par ailleurs, la quatrième loi de finances rectificative pour 2020 a prévu d’importants crédits pour la mission, qu’il nous faut prendre en compte. Le soutien à la vie associative a été abondé de 35 millions d’euros. Pour le sport, plus de 100 millions d’euros ont été alloués aux clubs pour compenser les pertes de billetterie et, sur l’initiative du Sénat, la réserve des crédits a finalement été dégelée.
Je souhaite désormais évoquer trois points.
Le premier concerne le soutien au mouvement sportif.
L’attrition des crédits dédiés au sport constatée ces dernières années – hors jeux Olympiques – devrait s’inverser en 2021 sous l’effet des crédits liés au plan de relance, avec 67 millions d’euros de décaissements, et du relèvement du plafond de la fiscalité affectée à l’Agence nationale du sport. Je m’en réjouis, car cet effort est indispensable pour soutenir le secteur du sport.
Pour autant, je reste prudent, car le relèvement du plafond de la fiscalité affectée à l’ANS prend acte du dynamisme marqué du produit de la taxe Buffet.
Or celui-ci s’explique essentiellement par le nouveau contrat de diffusion du championnat de football professionnel, dont chacun ici aura suivi la chronique juridique qui s’est engagée depuis la rentrée. En cas de nouvel appel d’offres, lequel est loin d’être exclu, rien ne garantit que le montant du contrat soit équivalent, ce qui pourrait porter les recettes fiscales sous le plafond prévu en 2021.
En privilégiant le relèvement du plafond à une majoration de la subvention versée à l’Agence nationale du sport, le Gouvernement transfère donc le risque vers le mouvement sportif. Madame la ministre, pouvez-vous nous rassurer et nous garantir que, si le rendement de la taxe Buffet est moindre qu’escompté, des crédits budgétaires seront débloqués pour compenser ?
Le deuxième point concerne le service national universel.
En 2020, 30 millions d’euros étaient prévus, pour un objectif de 20 000 jeunes, soit un coût moyen par jeune de 1 500 euros. La crise sanitaire aura toutefois marqué un coup d’arrêt.
L’année 2021 doit permettre de reprendre la mise en œuvre de ce dispositif, pour un objectif de 25 000 jeunes. Mais, entretemps, les prévisions ont été quelque peu revues à la hausse, puisque ce sont plus de 62 millions d’euros qui sont demandés, soit 2 200 euros par jeune hors coûts fixes.
Dans ces conditions, faut-il réellement poursuivre l’objectif d’une généralisation du dispositif à l’ensemble d’une classe d’âge, soit 800 000 jeunes ?