Intervention de Claude Kern

Réunion du 4 décembre 2020 à 15h15
Loi de finances pour 2021 — Sport jeunesse et vie associative

Photo de Claude KernClaude Kern :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si l’écriture d’un budget est avant tout la traduction d’une volonté politique permettant de rendre opérationnelles, sur tout le territoire, des ambitions empreintes d’une véritable grandeur, la crise sanitaire et sociale sans précédent que nous traversons aurait dû être l’amorce d’une véritable approche pragmatique et pérenne pour la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Or que constatons-nous ? À la fois beaucoup de temps perdu et la mise en exergue de certaines actions au détriment d’autres, comme en témoignent la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques et le SNU, qui accaparent pratiquement tout, le reste étant renvoyé au plan de relance.

Le budget consacré au sport est ainsi marqué, pour 2021, par le tropisme du Gouvernement à valoriser les performances de haut niveau. À cet égard, l’effort marqué en faveur du programme 350, « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 » est éloquent, puisque les crédits passent de 129 à 234 millions d’euros.

Certes, la perspective de cet événement extraordinaire doit être portée par un programme budgétaire digne de ce nom, et nous saluons bien évidemment cette ligne du Gouvernement. Cependant, n’oublions pas les territoires, qui pâtissent une fois encore du manque d’épaisseur de l’exercice budgétaire, alors même que les champions de demain s’entraînent aujourd’hui dans les territoires, d’où ils doivent émerger.

Le financement du sport pour tous reste particulièrement sous-doté dans nos territoires – c’est un vrai regret. Les collectivités ont de réelles difficultés budgétaires et nul besoin d’être devin pour se rendre compte que le soutien au monde du sport sera loin d’être une priorité pour elles, sans parler de la situation des bénévoles, dont le renouvellement va poser problème.

Le sport français a besoin de ressources supplémentaires pour assurer sa présence sur la durée dans tous les territoires. Les clubs en ont besoin pour anticiper, développer et répondre aux attentes des Français et pour renforcer l’emploi et la formation des éducateurs et des entraîneurs. Ils en ont besoin pour investir, aux côtés des collectivités locales, dans des équipements sportifs qu’elles détiennent à près de 85 %, mais qui, aujourd’hui, vieillissent et sont insuffisants et inadaptés.

Le sport professionnel est lui aussi en souffrance. C’est toute une économie qui est en danger, avec l’arrêt des compétitions ou les rencontres à huis clos, qui font chuter les recettes de billetterie et révèlent de grandes disparités entre les disciplines.

Or le monde sportif a un rôle crucial à jouer en faveur de l’éducation, de la cohésion sociale et de l’insertion, mais aussi de la santé et du développement durable. À ce titre, nous devons pleinement soutenir ce secteur, fortement touché par la crise.

Les 34 millions d’euros de taxes affectées supplémentaires suffiront-ils ? Les 120 millions d’euros sur deux ans du plan de relance, dont une grosse part sera dédiée à la rénovation énergétique des équipements sportifs, suffiront-ils à aller chercher les trois millions de pratiquants ?

D’ailleurs, le plan de relance, qui apparaît plus comme un plan de rattrapage, montre bien les insuffisances du projet originel, puisqu’il contient de nécessaires rallonges financières, en particulier à destination du monde associatif sportif local.

Au final, si le budget du ministère chargé des sports semble en hausse en 2021, la période actuelle, que nous pouvons qualifier d’extraordinaire, aurait dû pousser le Gouvernement à s’engager davantage.

S’agissant du programme « Jeunesse et vie associative », l’augmentation des crédits, qui passent de 620 millions d’euros en 2020 à 699 millions d’euros, s’explique en quasi-totalité par la montée en charge du SNU.

Les crédits du fonds pour le développement de la vie associative comme ceux du service civique stagnent. Le budget prévu pour le FDVA qui, soit dit en passant, n’a jamais retrouvé son niveau du temps de la réserve parlementaire §– environ 50 millions d’euros – permettra-t-il de relever les défis ?

Les associations, dont le dévouement sans faille doit être souligné, sont en péril. Certes, les associations employeuses ont pu bénéficier des mesures développées pour les entreprises, mais toutes les autres petites associations, dont la plupart ne peuvent compter que sur le bénévolat, doivent plus que jamais être accompagnées.

Leurs pertes financières sont importantes, voire abyssales, du fait notamment de l’annulation de la quasi-totalité des événements, mais aussi en raison d’une reprise plus que chaotique des activités.

C’est la raison pour laquelle, comme nombre de mes collègues, je ne peux qu’émettre des réserves sur le SNU : que représentent concrètement quinze jours en internat et quinze autres jours dans un organisme extérieur ? Soyons sérieux, pragmatiques et audacieux.

Compte tenu du contexte et de la faible portée du dispositif à l’heure actuelle, n’est-il pas disproportionné de doubler les crédits du SNU, pour les porter à plus de 60 millions d’euros, quand ils ne répondent pas aux attentes de la jeunesse ? L’enjeu d’aujourd’hui est de répondre à la précarité. Voilà l’urgence !

Pour conclure, même si elles sont différées, je veux saluer l’ensemble des mesures pour le sport annoncées tout récemment par le Gouvernement : enveloppe de quelque 100 millions d’euros pour le Pass’Sport, compensation des pertes de recettes et de billetterie, mesures d’urgence via l’ANS pour soutenir les clubs, etc.

Ainsi, si nous avions la possibilité de dissocier, au sein de cette mission, le programme « Sport » du programme « Jeunesse et vie associative », notre groupe voterait pour le premier et s’abstiendrait sur le second.

Puisque ce n’est pas le cas et compte tenu du manque de pragmatisme et du décalage dans le temps de certains financements, le groupe UC s’abstiendra, en l’état, sur le budget de la mission.

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