Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la jeunesse et la vie associative, qui font l’objet du programme 163, sont deux secteurs touchés de plein fouet par la crise de la covid-19.
Je souhaite débuter mon intervention en saluant le travail remarquable mené par les structures associatives : sans elles, de très nombreux concitoyens se seraient retrouvés totalement démunis face à la crise et au confinement. Il me tient également à cœur de rendre hommage aux bénévoles de notre pays, qui n’ont pas compté leur temps pour apporter aide et soutien. Enfin, je tiens à saluer les jeunes, qui se sont fortement mobilisés pendant cette période, malgré les difficultés qui les touchent. Le ministre de l’éducation nationale indiquait samedi dernier, dans cet hémicycle, que la jeunesse devait être la « première de toutes les priorités ». Force est de constater qu’il est difficile d’en retrouver la traduction budgétaire dans ce programme 163.
Bien évidemment, les crédits du plan de relance sont à saluer. Mais, à y regarder de plus près, plus de 80 % de l’effort pour la vie associative et la jeunesse est consacré au seul service civique et aux 100 000 missions supplémentaires annoncées.
Le service civique est un très beau dispositif qui a fait ses preuves depuis sa création, en 2010. Toutefois, est-il réellement envisageable d’atteindre un objectif de 250 000 missions en une année, soit la moitié de ce qui a été réalisé en dix ans ? Le service civique ne saurait être, en ces temps de crise, une substitution à l’emploi. Il ne faudrait pas que le quantitatif prime sur la qualité des missions et de l’accompagnement.
Par ailleurs, ces crédits ne sont que conjoncturels et n’ont pas vocation à aider durablement la jeunesse et le tissu associatif, qui en auraient pourtant fort besoin. Près de 30 000 associations seraient menacées de disparition en 2020.
Concernant les crédits spécifiques du programme 163, la hausse de 6 % par rapport au budget pour 2020 s’explique quasi exclusivement par la montée en puissance du service national universel, le fameux SNU. C’est donc une augmentation des crédits en trompe-l’œil, alors même que de fortes interrogations demeurent sur la mise en œuvre, le déploiement et le fonctionnement du SNU. Son expérimentation n’a pas pu être menée à bien, la phase de cohésion n’a pu se tenir et le nombre de jeunes concernés reste particulièrement limité.
À cela s’ajoutent une mauvaise estimation du coût du SNU et une difficulté à percevoir sa coordination avec les autres politiques en faveur de l’engagement des jeunes. C’est pourtant un élément clé, au même titre que la formation des encadrants et l’implication du secteur associatif et des collectivités territoriales, peu associées jusqu’à présent.
Pourtant, face à ce constat, à l’heure où notre pays traverse une crise majeure, alors même qu’il y a eu une sous-exécution des crédits de l’ordre de 20 millions d’euros cette année pour le SNU, le choix a été fait de doubler les crédits de cette action, avec l’inscription de 62, 3 millions d’euros en 2021, soit 32, 5 millions d’euros supplémentaires. Était-ce bien la priorité du moment ? Ces crédits auraient pu être affectés à des actions prioritaires au regard des urgences du secteur associatif, confronté à l’annulation de ses événements, à la baisse du nombre de cotisations, aux urgences du tourisme social, avec une activité quasi nulle des colonies de vacances, ou encore à l’urgence que représente la détresse de notre jeunesse.
Voilà quelques jours, des présidents d’université évoquaient une « bombe à retardement sociale et humaine », en parlant de la situation des étudiants, confrontés à l’isolement, aux difficultés financières, à la perte de leur emploi et à une réelle détresse psychologique.
En tant que sénatrice du Bas-Rhin, j’ai été marquée par ces files d’attente de jeunes, toujours plus nombreux, à Strasbourg, pour obtenir des produits de première nécessité. Je tiens à ce titre à saluer ici l’élan de solidarité et les actions engagées par les associations étudiantes, les artisans, les restaurateurs, les représentants professionnels, les collectivités territoriales et toutes les structures associatives qui se mobilisent en Alsace, comme partout en France, depuis des mois, pour leur venir en aide.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements visant à rediriger des crédits du SNU vers le tourisme social ou un fonds de soutien à la lutte contre la précarité des jeunes. Là est la priorité du moment, car nos jeunes ont besoin de retrouver des perspectives et des marques de confiance. La priorité, c’est aussi nos associations, dont nous savons à quel point elles contribuent à la solidarité, à la cohésion nationale et au lien social, si importants en ces temps compliqués.