Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est également avec beaucoup d’émotion que je prends la parole, ce matin, devant vous, pour m’associer, au nom du Gouvernement, à l’hommage du président du Sénat ; le Président de la République s’adressera à la Nation, ce soir.
Monsieur le président, vous avez terminé votre propos en rappelant l’intérêt qu’a porté le Président Giscard d’Estaing aux différents outre-mer et la marque qu’il y a laissée. C’est vrai, les grands chantiers de modernisation de notre pays ont trouvé un écho singulier dans les différents territoires d’outre-mer, notamment pour les femmes et pour la jeunesse.
Le surnom de « prince qui a fendu les océans » que lui a donné la presse est lié à ses déplacements outre-mer. Il s’y est rendu comme secrétaire d’État et comme ministre, puis, au cours de son septennat, il a tenu à parcourir chacun des territoires d’outre-mer sauf deux : Saint-Pierre-et-Miquelon et la Guyane.
Dans l’océan Atlantique, il a marqué les Antilles, dans un moment compliqué socialement ; on se souvient d’un déplacement tendu mais au cours duquel il a su trouver les mots pour renouer avec la population et lancer des initiatives diplomatiques importantes. Cela a ainsi permis de positionner la Martinique et la Guadeloupe au cœur de grands sommets internationaux, notamment pendant la guerre froide, avec une rencontre avec le président Ford, au cours d’un sommet important réunissant également l’Allemagne et le Royaume-Uni.
Pour ce qui concerne l’océan Indien, vous avez rappelé, monsieur le président, la décision difficile liée aux Comores, avec la préfiguration de ce qui aboutira par la suite à la départementalisation de Mayotte. Il a également entretenu une relation charnelle avec La Réunion, et pour cause : son Premier ministre, Raymond Barre, avait un lien très fort avec ce département.
Enfin, il a visité l’océan Pacifique. Il fut le premier Président de la République à se rendre à Wallis, pour annoncer l’arrivée de la radio à Wallis et à Futuna. Je veux aussi souligner le rôle du Président Giscard d’Estaing en Polynésie, avec le cheminement vers le statut de l’autonomie. J’aurai également un mot particulier pour la Nouvelle-Calédonie ; c’est un territoire que je considère avec beaucoup de tendresse mais aussi d’inquiétude. On a trop souvent oublié que, quelques années avant les événements, Valéry Giscard d’Estaing fut le premier Président de la République à lancer une grande réforme foncière – le plan Dijoud –, premier acte de rééquilibrage entre Kanaks et non-Kanaks.
Pour finir, je veux vous faire part d’un point de vue plus personnel. Je garderai, moi aussi, le souvenir d’un homme intelligent, érudit, drôle – très drôle, même – et curieux, posant des questions au tout jeune secrétaire d’État à l’écologie que j’étais. Il se passionnait pour les éoliennes, mais aussi pour l’énergie nucléaire ainsi que pour la place de la France en Europe. Cette érudition, cette capacité à penser vite, cette curiosité, cette bienveillance, quoiqu’un peu taquine, je dois bien l’avouer, nous ne les oublierons pas.
C’est vrai, le Président Giscard d’Estaing a occupé différentes fonctions. Il aimait à me dire qu’il avait eu beaucoup de plaisir à exercer des fonctions exécutives locales, notamment à la présidence du conseil régional d’Auvergne ; je veux d’ailleurs souligner l’humilité dont il a fait preuve dans son parcours politique, après avoir exercé la magistrature suprême. On peut également saluer l’homme de lettres, l’académicien.
Ainsi, il fut secrétaire d’État, ministre, maire, Président de la République, président de conseil régional, député, membre du Parlement européen ; il n’eut donc qu’un seul tort, celui de ne pas être sénateur, mais il y a largement suppléé en défendant le bicamérisme avec beaucoup de passion et avec le sens de l’équilibre qu’on lui connaissait.
Je vous remercie, monsieur le président, de m’avoir permis d’adresser ces quelques mots devant la Haute Assemblée.