Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques a approuvé les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2021, en formulant plusieurs messages et recommandations.
Si, en termes de pourcentages, les crédits alloués à la mission sont en hausse, surtout en autorisations d’engagement, pour ce qui concerne les volumes de crédits, l’impact économique des 2, 4 milliards ou 2, 7 milliards d’euros n’est pas fondamentalement différent de l’enveloppe de 2 milliards d’euros reconduite depuis une dizaine d’années.
Depuis 2019, en effet, la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en allégement de charges a gonflé de manière purement comptable le programme 138, « Emploi outre-mer », sans que les entreprises y gagnent nécessairement.
Par ailleurs, 170 millions d’euros proviennent en quelque sorte de la poche des Ultramarins. À cet égard, monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer l’engagement pris en 2019 de recycler, chaque année, les prélèvements supplémentaires provoqués par la suppression de dispositifs fiscaux qui bénéficiaient aux ménages et aux entreprises ?
La nouveauté de ce budget est, bien entendu, la mission « Plan de relance ». Ainsi, 1, 5 milliard d’euros ont été initialement fléchés aux outre-mer, soit 1, 5 % des 100 milliards du plan de relance, alors que ceux-ci représentent 4 % de la population. Monsieur le ministre, confirmez-vous que l’enveloppe restera bien ouverte au-delà de 1, 5 milliard d’euros ?
C’est bien cette volonté que le Sénat a exprimée en adoptant un amendement tendant à prévoir 2, 5 milliards d’euros, apportant du reste un démenti au préjugé d’outre-mer budgétivores, d’autant que les crédits affichés restent, trop souvent non consommés. Nous préconisons, face au risque d’effondrement du secteur marchand, de flécher ces crédits du plan de relance territoire par territoire.
Nous vous alertons sur les risques du « premier arrivé, premier servi ». Un grand nombre de très petites entreprises ayant des projets utiles et créatifs ne sont pas outillées pour déposer rapidement des dossiers. Sur certains territoires, un tiers des TPE ignorait purement et simplement les dispositifs du premier confinement. C’est dire combien la gestion et la numérisation doivent être soutenues.
Je termine par un impératif : saisir la chance historique qui se présente pour le logement ultramarin. En effet, les financements de relance mobilisables vont bien au-delà des crédits budgétaires ; avec les plans d’investissement volontaire d’Action Logement et de CDC Habitat, on est sans doute proche des sommes investies par l’État pendant quinze ans, c’est-à-dire plus de 3 milliards d’euros.
Le véritable défi est d’activer ces fonds en redynamisant un secteur qui a un puissant effet d’entraînement sur les économies de nos outre-mer. L’objectif doit être de développer sur place des filières intégrées : aménagement, nouveaux matériaux, construction, habitat et traitement de l’amiante. Selon nous, ce mouvement doit être impulsé par des mécanismes et des opérateurs qui doivent adopter le modèle de l’entreprise formatrice.
En outre, face à des taux de chômage vertigineux, il faut intégrer la jeunesse ultramarine, qui regorge de jeunes talents.
Monsieur le ministre, l’acte de construire et ses ramifications ont également besoin d’un encadrement mieux adapté. À cet égard, la Cour des comptes vient de souligner l’existence d’exigences normatives « sans réel rapport avec les réalités locales », faisant ainsi écho aux préconisations de notre délégation sénatoriale aux outre-mer.
Tout aussi réaliste, le haut-commissaire au Plan déplore que l’État, avec les règles actuelles, entrave même ses propres actions. Le moment est venu de sortir de ce carcan.