Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 3 décembre 2020 à 10h30
Loi de finances pour 2021 — Outre-mer

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission budgétaire « Outre-mer » s’articule autour de plusieurs axes : le soutien à l’emploi, l’insertion socioprofessionnelle des jeunes, les actions de formation en mobilité, le logement social, l’effort d’équipement des territoires et l’éducation et l’accompagnement des collectivités territoriales.

Néanmoins, beaucoup des crédits utiles à l’outre-mer proviennent d’autres ministères. Au regard des besoins, cette architecture budgétaire morcelée est dommageable.

Les territoires ultramarins accusent des retards sur les plans économique et social. À titre d’exemple, le PIB par habitant est près d’une fois et demie supérieur dans l’Hexagone qu’en Guyane. Il y est près de trois fois plus élevé qu’à Mayotte.

Les effets de la crise économique et sociale, résultat de la pandémie de covid-19 en outre-mer – je pense notamment à l’effondrement du tourisme –, viennent s’ajouter à une situation déjà très précaire.

Certes, les crédits de la mission sont en légère hausse, mais le budget reste relativement stable et ordinaire, dans une période extraordinaire.

Les conséquences de cette période extraordinaire sur les crédits de la mission sont immédiates. Ainsi, le premier poste budgétaire de celle-ci est l’action Soutien aux entreprises, qui vise à financer les dispositifs d’allégements et d’exonérations de charges patronales de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer.

Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit 1, 565 milliard d’euros pour l’outre-mer, soit une hausse de 6, 4 %. Cette augmentation des crédits m’interpelle. La baisse d’activité liée au covid-19 provoque un recours massif au chômage partiel. Ce dispositif réglant déjà la question des charges patronales de sécurité sociale, il est probable que les crédits ou du moins leur hausse soient surévalués. Alors qu’ils auraient pu être fort utiles ailleurs, ces crédits risquent d’être utilisés pour éponger la dette de la sécurité sociale.

La sous-exécution des crédits est un problème récurrent de la mission budgétaire « Outre-mer », comme plusieurs de mes collègues l’ont rappelé. La ligne budgétaire unique, qui finance le logement en outre-mer, en est le témoin. Son taux d’exécution s’est élevé à 90 % en autorisations d’engagement et 78 % en crédits de paiement.

Pourtant, les besoins sont réels ! Le ministère des outre-mer évaluait le nombre de ménages ultramarins en attente d’un logement social à 60 000 en 2019. Dans un rapport de septembre dernier, la Cour des comptes évoquait « 80 % d’ayants droit pour 15 % de bénéficiaires ». Dans son analyse, elle explique que la diminution des autorisations d’engagement dans la ligne budgétaire unique aura un impact négatif dans le futur sur le total des prêts accordés et sur le nombre de logements sociaux produits.

Cependant, il nous est proposé une ligne budgétaire unique aux autorisations d’engagement réduites de 2, 7 %. Pour résumer la situation, des crédits alloués au logement ne sont pas consommés pendant que la demande de logement social augmente ! Pis, le budget qui nous est proposé va contribuer à cette tendance.

La question du logement n’est pas le seul rendez-vous manqué par le Gouvernement. La liste en est longue : maigre pouvoir d’achat, précarité, faiblesse de la politique de l’eau et de la politique de mobilité, absence d’une politique de retour sur le territoire.

Par ailleurs, le Gouvernement ne tire pas les conclusions des années précédentes. Le service militaire adapté, le SMA, par exemple, a montré toute sa pertinence dans l’intégration des jeunes sur le marché du travail. Pourquoi ne pas lui allouer davantage de crédits ?

Je veux aborder la protection de la biodiversité ultramarine, laquelle concentre plus de 90 % des espèces présentes sur le territoire national.

Selon les estimations de l’Office français de la biodiversité, l’OFB, ce sont 500 000 à 1 million d’espèces qui sont menacées de disparition. Monsieur le ministre, j’ai sans doute mal regardé, mais je ne parviens pas à évaluer, ni dans les crédits de la mission « Écologie » ni dans les crédits spécifiques du plan de relance, la part des fonds pour la biodiversité qui est fléchée vers l’outre-mer. Pourriez-vous m’éclairer à ce sujet ?

De manière générale, ne serait-il pas préférable que la protection de la biodiversité ultramarine fasse l’objet d’un programme spécifique de la mission budgétaire « Outre-mer » ? Cela nous semblerait plus transparent et plus efficace pour bénéficier de fonds pérennes.

Monsieur le ministre, les enjeux sont nombreux, mais les moyens restent insuffisants. Jeudi dernier, le Sénat adoptait, dans le cadre de la mission « Plan de relance », un amendement de notre collègue Victorin Lurel tendant à bâtir un véritable « plan pour l’égalité réelle en outre-mer », à hauteur de 2, 5 milliards d’euros.

Toutes les formations de cet hémicycle ont pris la mesure de l’urgence de la situation et vous rendent service. Utilisez ce levier pour lever le gage et, ainsi, doubler les crédits de votre ministère pour 2021 !

Dans l’attente de votre réussite, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra sur les crédits de la mission.

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