Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans une situation économique et financière compliquée, préserver et renforcer l’état de nos fonctions régaliennes est fondamental pour garder la main sur notre destinée nationale, notre autonomie stratégique et notre souveraineté.
Plusieurs indicateurs au sein de la mission « Défense » nous inquiètent.
Tout d’abord, la situation préoccupante de notre activité opérationnelle par rapport aux armées occidentales de même standard est le signe de notre rétrogradation au rang des nations. En effet, l’augmentation de 3, 3 % des crédits du programme 178 ne prend pas en compte le surcoût des opérations intérieures de 30 millions d’euros, résultat d’une situation sécuritaire explosive dans notre pays.
Le surcoût des OPEX et des missions intérieures s’élève à 1, 4 milliard d’euros. Si tous les ministères ne prennent pas leur part dans ce surcoût, conformément à ce que prévoit la loi de programmation militaire, ce sont nos armées, les hommes et les femmes qui les composent, la réparation et la modernisation des équipements qui en subiront les conséquences.
Sur les quatorze indicateurs d’activité opérationnelle, un seul devrait être conforme aux normes de l’OTAN en 2021, pour nos armées de terre, de l’air et de l’espace et notre marine nationale, à l’heure où la Turquie attise les tensions non seulement en Arménie et en Libye, mais aussi en Grèce, à Chypre et en Méditerranée.
Le chef d’état-major de l’armée de terre en a fait sa priorité, « être prêt à la haute intensité », mais le Gouvernement ne lui donne pas les moyens de disposer d’équipements à la hauteur, des entraînements adaptés, d’une industrie de soutien.
Il n’est pas du tout question du porte-avions de nouvelle génération dans le projet de loi de finances. Pourquoi ne pas commencer à provisionner pour encourager les industriels ? Pourquoi ne pas en prévoir un second pour assurer notre permanence à la mer ? Nous devrions déjà contribuer financièrement en 2021 à l’avenir de cette capacité opérationnelle.
S’il faut saluer l’effort financier important en faveur de la DGSE et de la DRSD, sachons raison garder : nous ne faisons que rattraper partiellement la sous-budgétisation de ces dernières années et nous sommes encore loin des efforts consentis par nos voisins allemands et britanniques.
De la même manière, l’augmentation de 10 % des crédits alloués à la base industrielle de technologie et de défense est une dépense publique en pure perte si l’État ne soutient pas ses entreprises de défense. Ces dernières risquent des sanctions en vertu du principe d’extraterritorialité du droit américain. Elles se heurtent en outre à la frilosité des banques, qui rechignent à leur prêter de l’argent, et sont soumises à des contraintes fiscales.
Sans stratégie de souveraineté économique, ces entreprises meurent ou sont rachetées par des acteurs étrangers. Il faut donc revoir les choses en profondeur pour ne pas jeter de l’argent par les fenêtres et perdre un temps précieux dans la course à l’innovation technique, au moment où la crise vient frapper durement notre industrie de défense, notamment le secteur aéronautique.
Compte tenu de toutes ces insuffisances, de l’absence de vision et d’ambition pour notre défense nationale, je voterai contre l’adoption des crédits de cette mission.