Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 25 mars dernier, dans le contexte de la crise de la covid, le président Emmanuel Macron lançait l’opération Résilience.
Cette opération a été la contribution des armées contre la propagation du virus. Centrée sur l’aide et le soutien aux populations, ainsi que sur l’appui aux services publics pour faire face à cette épidémie en métropole et en outre-mer, elle a apporté un soutien déterminant dans les domaines de la santé, de la logistique et de la protection. Elle a permis le transfert de 146 patients pour décongestionner les services de réanimation de l’est de la France, ainsi qu’une meilleure répartition des personnels soignants. Nous tenons ici à remercier les effectifs largement impliqués dans la lutte contre cette pandémie et à leur rendre hommage.
Notre pays se voit confronté à un environnement stratégique à la fois instable et menaçant. Après des décennies de déflation, la LPM entend accorder des moyens aux armées, afin de remédier aux carences du passé et de permettre une remontée en puissance, tout en préparant l’avenir d’une défense nationale adaptée aux défis et conflits du XXIe siècle.
Il faut se servir de l’expérience passée. Je rappellerai l’accueil extraordinaire qui a été réservé à Édouard Daladier et à Neville Chamberlain après les accords de Munich, ainsi que le mot cinglant de Winston Churchill : « Vous aviez le choix entre le déshonneur et la guerre ; vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre. » Il est donc extrêmement important – certes, on sait que c’est difficile – de définir une politique lorsque des conflits approchent.
Dans ce contexte d’engagement, nos armées doivent être particulièrement soutenues. Le soutien est bien là depuis plusieurs années, et il ne devrait pas être amené à fléchir.
Je pense par exemple à la décision du Président de la République d’envoyer dans le cadre l’opération Barkhane, en début d’année, 600 soldats supplémentaires en renfort dans la zone dite des trois frontières, au Sahel, en plus des appuis aériens.
Le budget pour 2021 de la mission « Défense » respecte les engagements pris dans le cadre de la LPM 2019-2025. Alors que le risque de conflit dans le monde s’accroît et que la France connaît une crise économique liée à la crise sanitaire dont on ne connaît pas encore toute l’ampleur, il était impératif de ne pas raboter le budget des armées et d’en refaire, comme autrefois, une variable d’ajustement. Face à un monde de plus en plus instable et dangereux, renoncer aux moyens de sa puissance et de sa protection serait de la folie.
Répondant à ces besoins importants et croissants, et restant fidèle à la trajectoire tracée par la LPM, le projet de budget que nous examinons est au rendez-vous des engagements pris. Il prévoit en effet une augmentation de 4, 5 % par rapport à 2020, avec 1, 7 milliard d’euros des moyens accordés à la défense, hors contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Sur le plan capacitaire, nous nous félicitons et saluons la livraison de nombreux équipements, ainsi que les différentes commandes prévues en 2021. Je pense par exemple aux systèmes de drones tactiques SDT, aux engins blindés de reconnaissance ou encore aux avions de transport et de ravitaillement A330 MRTT Phénix. Il s’agit ici de signes visibles et concrets de la remontée en puissance des armées. Cette arrivée de matériels témoigne des efforts et des progrès accomplis en termes d’innovation.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, nous sommes plutôt satisfaits à la lecture de ce budget. Cependant, je souhaite appeler votre attention sur quelques points de vigilance.
Le premier de ces points, et non des moindres – il a été évoqué –, est la question de l’actualisation de la loi de programmation militaire. Le Parlement reste dans l’incertitude à cet égard. L’actualisation doit intervenir en 2021. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est à plusieurs reprises interrogée sur la forme que cela prendra et sur le calendrier. À l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Défense », pouvez-vous nous en dire plus ?
Nous nous interrogeons également sur le prochain porte-avions de nouvelle génération, qui aura vocation à remplacer le Charles-de-Gaulle à l’horizon 2038. Les arbitrages sur ce dossier seront-ils rendus prochainement ?
Cette année encore, le projet de loi de finances initiale est grevé par le surcoût généré par les OPEX et les missions intérieures (Missint). En 2020, ce surcoût intègre notamment le renforcement des effectifs de l’opération Barkhane, la création de la task force Takuba, qui relève des OPEX, ou encore l’opération Résilience, qui relève des Missint. Le montant des surcoûts OPEX et Missint s’élève à 1, 461 milliard d’euros, après 1, 398 milliard d’euros en 2019.
Je souhaite également revenir sur la fidélisation de nos forces. Les crédits de personnels sont en hausse de 179 millions d’euros dans ce projet de loi de finances, ce qui représente une augmentation de 1, 5 %. L’année 2021 sera en effet la première année de la mise en œuvre de la nouvelle politique de rémunération des militaires.
Le plan Famille, lancé voilà trois ans, est essentiel à cette démarche de fidélisation. En 2021, il se traduira par la poursuite des efforts en matière de construction d’hébergement, de crèches et de logements, en métropole comme en outre-mer, d’amélioration des conditions de vie en garnison, d’action sociale et d’accompagnement des conjoints à l’emploi ou à la mobilité. Si certaines de ses mesures sont perçues très positivement par les militaires, des avis plus contrastés ont été exprimés sur la situation du logement et les conditions d’hébergement dans les enceintes militaires.
Dans son rapport spécial fait au nom de la commission des finances, Dominique de Legge, dont je salue ici le travail, ainsi que celui de tous les rapporteurs pour avis, estime même que tout cet effort de fidélisation pourrait être compromis par le retard pris en matière d’infrastructures et de logement. La question des pensions de retraite militaires fera également l’objet d’un suivi très scrupuleux de la part de notre commission.
Enfin, nous ne pouvons que constater que la défense est la « grande oubliée » du plan de relance. Elle n’est concernée qu’au titre de l’accélération des commandes d’aéronefs, à hauteur de 600 millions d’euros. Le plan de relance vise à soutenir les secteurs qui souffrent et à provoquer un effet levier. Or cet effet est généralement particulièrement dynamique dans l’industrie de la défense. Dans ce secteur d’activité, l’efficacité de l’investissement public en matière d’emploi est bien supérieure à ce qu’elle est dans tous les autres.
Madame la ministre, le groupe UC votera les crédits de la mission « Défense » et sera tout à fait attentif à l’évolution des points soulevés dans cette intervention.