Intervention de Christine Lavarde

Réunion du 3 décembre 2020 à 21h45
Loi de finances pour 2021 — Administration générale et territoriale de l'état

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde :

Présenté lors du conseil des ministres du 16 décembre 2015, le plan Préfectures nouvelle génération avait pour objectif de renforcer les quatre missions prioritaires des préfectures et sous-préfectures, à savoir la gestion des crises, la lutte contre la fraude documentaire, l’expertise juridique et le contrôle de légalité, ainsi que la coordination territoriale des politiques publiques. La dématérialisation intégrale des opérations de délivrance de titres réglementaires, lancée à la fin de l’année 2017, constitue une mesure phare du plan.

Dans son rapport annuel de 2020, la Cour des comptes a dressé un bilan de la réforme– au vu de l’heure tardive à laquelle nous discutons, je vais vous faire grâce des lacunes qu’elle a relevées… Cependant, la Cour des comptes et notre rapporteure spéciale ont rappelé que cette nouvelle organisation devait permettre la suppression de 1 300 ETP sur les 4 000 affectés en 2016 aux tâches de délivrance des titres. Cet objectif ne semble pas avoir été atteint.

Par ailleurs, le recours particulièrement important à l’emploi d’agents contractuels, s’il pouvait se justifier au moment de la transition vers ce nouveau régime, n’a plus raison d’être aujourd’hui. Notre rapporteure exprime également des inquiétudes s’agissant de la capacité des centres d’expertise de ressources et des titres (CERT) à délivrer correctement la carte d’identité électronique à compter du deuxième semestre de l’année 2021.

Le redéploiement de 1000 ETP vers les quatre missions prioritaires évoquées précédemment n’a pas été plus facile, en raison de l’absence de mobilité géographique, allant parfois à l’encontre de la rationalisation. Ainsi, dans certaines sous-préfectures ont été constitués des pôles départementaux, spécialisés dans le traitement de certaines tâches de police administrative, de manière à maintenir les agents sur place.

Force est de constater que le contrôle de légalité demeure encore perfectible, alors même que cette mission est garante d’une application uniforme de la règle de droit sur le territoire. Le nombre d’acte soumis au contrôle de légalité a considérablement baissé en dix ans – il avoisine les 20 % depuis 2016 –, faute d’effectifs suffisants.

L’année dernière, notre collègue Jacques Genest constatait la forte diminution du budget accordé à cette mission, de l’ordre de 20 %, autant dire qu’il se réduit à peau de chagrin.

Heureusement, le dialogue en amont entre les élus et les préfets sur les sujets difficiles ou qui sortent de l’ordinaire permet d’aboutir à un faible taux de recours gracieux ou contentieux. Cependant, le conseil donné par les préfectures aux communes les plus petites s’est réduit. À ce titre, la possibilité de recourir au rescrit, introduite par la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dont le décret d’application a été publié en mai dernier, doit permettre d’accroître la sécurité juridique des actes des collectivités en amont de leur adoption. Cependant, comme j’avais eu l’occasion de le soulever lors des débats en séance publique, le rescrit ne saurait mettre les communes à l’abri d’un recours exercé par un particulier, un syndicat ou une association, et donc d’une éventuelle condamnation. Il serait intéressant de faire un bilan de cette mesure.

Je terminerai en interrogeant Mme la ministre sur le sort réservé aux préconisations du rapport remis par le comité Action publique 2022. En réponse au constat d’une gestion en silo et d’une adaptation difficile des ressources aux enjeux prioritaires au niveau des préfectures, le comité préconisait de déconcentrer la gestion des ressources humaines et d’envisager la création d’une filière administrative territoriale interministérielle, en remplacement des corps administratifs actuels qui, gérés ministère par ministère, brident la mobilité.

La création du programme 354, l’année dernière, répond à cette demande de mutualisation des moyens de l’État. La création, en 2021, de secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), permise par la réforme de l’organisation territoriale de l’État en date de juin 2019, en constitue une mise en œuvre pratique. Pensez-vous aller plus loin, madame la ministre, en créant cette filière interministérielle ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion