Je vais faire une intervention un peu plus large et exprimer un avis sur tous les amendements portant sur la DETR, de sorte de ne prendre la parole qu’une seule fois.
Je commencerai par rappeler l’esprit de ce qui a été voté pour l’article 59 du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale.
Ce vote est intervenu dans le prolongement d’un constat que nous avions dressé l’an dernier : il avait été observé que les enveloppes de DETR variaient, sans que personne soit vraiment capable d’expliquer ces variations. Nous avions donc demandé que les enveloppes soient transitoirement gelées pour 2020, afin de faire le point.
C’est dans ce cadre que la mission parlementaire citée par le rapporteur spécial Claude Raynal a été instaurée, mission parlementaire qui d’ailleurs, que je sache, est venue rencontrer les principaux responsables du Sénat pour présenter ses travaux. Celle-ci a établi deux points : d’une part, les variations de DETR s’expliquent en partie par l’organisation institutionnelle – réformes d’intercommunalités ou autres –, ce qui n’est pas du tout satisfaisant ; d’autre part, l’Insee a élaboré un critère permettant de définir la ruralité, fondé sur la grille des densités communales. Ce critère a été élaboré avec le concours de l’Association des maires ruraux de France, de sorte qu’il soit acceptable, et a été définitivement validé lors du comité interministériel aux ruralités, à l’unanimité des membres présents.
Je crois qu’il serait utile, maintenant que l’on dispose enfin d’un critère, de s’en servir pour cibler les territoires ruraux, d’autant qu’il est tiré de travaux avalisés par l’AMRF. Voilà pourquoi le Gouvernement a soutenu l’amendement parlementaire ayant introduit le critère de ruralité dans le calcul. Cela permet d’augmenter tendanciellement la DETR des départements ruraux, qui, pour des raisons historiques et absolument inexpliquées, sont mal dotés.
Mais vous allez me dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que les variations annuelles sont très modérées, car, dans le même temps, l’amendement resserre la fourchette de variation… Il me semble néanmoins qu’un bon point d’équilibre a été trouvé entre stabilité et exigence d’une réforme. C’est aussi un bon point de départ pour une réflexion à plus long terme sur la DETR. Je crois savoir que l’Assemblée nationale va demander la poursuite des travaux de sa mission, et je comprends des propos de Claude Raynal qu’une telle mission serait aussi souhaitable au Sénat – bien sûr, c’est à vous d’en décider.
Je demande donc le retrait des amendements n° II-907 rectifié, II-768 rectifié ter et II-906 rectifié, dont l’adoption conduirait à exclure du dispositif de la DETR de nombreux EPCI, qui, en conséquence, ne pourraient plus solliciter de subventions pour des projets concernant leur propre ruralité. Ce serait le cas, par exemple, pour la communauté d’agglomération du Pays basque. Or, si nous avons fait en sorte que la population rurale du Pays basque soit prise en compte dans l’ensemble départemental, il n’est pas interdit à cet EPCI de vouloir porter des projets à destination de sa ruralité, et il serait tout de même regrettable de le priver du dispositif.
L’amendement n° II-582 rectifié quater, tendant à interdire le financement par la DETR d’un projet porté par un EPCI éligible si ce projet est exécuté sur le territoire d’une commune non éligible, constitue, là encore, une mesure punitive. Les préfets ont déjà fait le tri afin de ne pas attribuer des subventions au titre de la DETR sur les centres-villes ou les communes particulièrement riches. En outre, imaginez ce qui se passerait pour un projet concernant douze communes rurales et une qui ne l’est pas : on se retrouverait dans une situation totalement inextricable.
En miroir, l’adoption de l’amendement n° II-952 rectifié ter ferait entrer dans le périmètre de la DETR des communes riches qui en sont actuellement exclues. On ne sort personne, mais on n’intègre pas non plus les rares communes qui ne bénéficient actuellement pas du dispositif !
En outre, ces orientations seront complétées par des instructions très claires, données aux préfets dans la circulaire. Celles-ci porteront sur la possibilité de cumul entre DETR et DSIL dans les territoires ruraux. Il semblerait qu’il y ait eu quelques problèmes dans ce domaine, et nous allons les régler – étant précisé que, parfois, les élus sont à l’origine de ces problèmes, notamment parce que les commissions d’élus ont pris des décisions contraires au droit ; il convient donc de bien faire remonter les choses…
Sera également traitée la question du fléchage prioritaire vers les secteurs ruraux et les EPCI disposant de secteurs ruraux.
Enfin, s’agissant de la possibilité jusqu’à présent offerte à une commune nouvelle de récupérer de la DETR, y compris au bénéfice d’une très grande ville – Annecy, pour la citer, a récupéré de la DETR, ce qui peut sembler aberrant –, nous allons limiter à la portion rurale des anciennes communes.
Telles sont l’ensemble des dispositions que nous allons prendre. C’est pourquoi je demande le retrait des amendements n° II-907 rectifié, II-768 rectifié ter, II-906 rectifié, II-582 rectifié quater et II-952 rectifié ter.