Intervention de Jean-Raymond Hugonet

Réunion du 2 décembre 2020 à 21h00
Loi de finances pour 2021 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Jean-Raymond HugonetJean-Raymond Hugonet :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’année 2020 devait être celle de la « grande loi » audiovisuelle. Le temps semblait venu de mettre un terme aux désordres nés de l’absence de pilotage stratégique et de la multiplication des tutelles. Cette réforme de la gouvernance devait s’accompagner d’une réforme du financement, au travers de la modernisation de la contribution à l’audiovisuel public (CAP).

Votre prédécesseur, madame la ministre, nous avait assuré voilà deux ans que la réforme de la CAP aurait lieu dans le PLF 2021 au plus tard !

À ce stade, une formule du génial Edgar Faure me vient à l’esprit pour qualifier la situation de l’audiovisuel public français : « Voilà que s’avance l’immobilisme, et nous ne savons comment l’arrêter. » §En revanche, nous savons aujourd’hui que le Gouvernement a renoncé à réformer efficacement le secteur de l’audiovisuel. Ce renoncement constitue d’abord un choix du Gouvernement, et non une conséquence de la crise sanitaire.

Non seulement ces deux réformes auraient pu être engagées plus tôt dans le quinquennat, mais il restait encore suffisamment de temps pour les mettre en œuvre d’ici à 2022.

Le seul horizon de votre majorité semble donc être celui de la trajectoire budgétaire 2018-2022, qui aura pour conséquence de baisser en 2021 de 70 millions d’euros la ressource publique tout en maintenant inchangé le tarif de la CAP.

C’est évidemment insuffisant pour faire face à l’offensive des plateformes américaines, qui engrangent des millions d’abonnés et devraient prochainement accroître l’attractivité de leurs offres en programmes français. Ce sera en effet une conséquence paradoxale de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA) que d’accentuer la différence d’attractivité entre les médias historiques et les nouveaux acteurs.

Notre secteur des médias est en danger, et le Gouvernement semble détourner le regard en considérant qu’il n’y a pas d’urgence. Or la crise sanitaire est venue rappeler que la grande dépendance des sociétés de l’audiovisuel public au développement de leurs ressources propres pouvait constituer une véritable faiblesse.

Un service public a besoin de stabilité et de prévisibilité pour développer ses missions ! Depuis 2017, c’est un surcroît de précarité qui leur a été proposé !

Une remise à plat des modèles économiques n’a jamais été aussi nécessaire. Nous étions prêts à ouvrir ce débat au Sénat. Par exemple, la suppression à terme de la publicité sur les antennes publiques pour la réserver aux chaînes privées conserve toute sa pertinence.

Madame la ministre, nous ne partageons pas le manque d’ambition du Gouvernement pour l’audiovisuel public, et nous regrettons le temps perdu jusqu’à la fin du quinquennat.

Ce désaccord stratégique n’est pas contradictoire avec quelques satisfecit.

Nous soutenons ainsi l’enveloppe de 70 millions d’euros issue du plan de relance, ainsi que l’intention du Gouvernement de négocier avec les entreprises de l’audiovisuel public des contrats d’objectifs et de moyens (COM) sur la période 2020-2022 comportant enfin des objectifs communs.

Si notre commission a considéré que le Gouvernement pouvait et devait mieux faire en matière d’audiovisuel, elle a toutefois émis, mais – vous l’aurez compris – sans entrain, un avis favorable à l’adoption des crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » du projet de loi de finances pour 2021.

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