Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la pandémie marque un véritable tournant pour le monde de la culture. Pour autant, cette pandémie n’est pas à l’origine – il s’agit bien d’un choix du Gouvernement – du report sine die de la réforme tant attendue de l’audiovisuel public, alors même que l’année 2020 devait être la grande année de la réforme de sa gouvernance et de son financement.
Pour les deux prochaines années, les Français continueront de s’acquitter d’une CAP qui n’est plus représentative des usages du numérique. Les multiples initiatives des opérateurs sont pourtant la preuve de leur volontarisme, au service d’un audiovisuel public fort, qui se réinvente pour réaffirmer sa spécificité. Cette filière mérite donc d’être soutenue par un nouveau cadre législatif et réglementaire, adapté à l’essor du numérique et à la véritable explosion d’offres venues bouleverser le marché mondial.
En ce sens, nous ne pouvons que nous réjouir de la transposition de la directive SMA, qui crée les conditions d’un nouveau partenariat équilibré avec les services de vidéo à la demande. Les créations audiovisuelles et cinématographiques françaises et européennes bénéficieront des nouveaux engagements financiers des plateformes numériques, à savoir le versement d’une contribution en faveur de la création comprise entre 20 % et 25 % de leur chiffre d’affaires.
La prise en compte de la spécificité des plateformes, la nature de leurs catalogues, leur place dans la chronologie des médias et la répartition des visionnages entre audiovisuel et cinéma laissent entrevoir une modernisation utile et positive de la politique audiovisuelle, dont nous pouvons tous nous réjouir.
Pour 2021, les moyens alloués à l’audiovisuel public suivent, comme l’an dernier, une trajectoire financière déclinante, résultant de l’objectif de réduction de 190 millions d’euros sur la période 2018-2022.
En dépit des 70 millions d’euros prévus par le plan de relance, l’effort budgétaire demandé aux opérateurs est trop important dans le contexte difficile de crise sanitaire que nous connaissons, et au vu des pertes importantes de recettes publicitaires. France Télévisions, qui est l’entreprise du secteur la plus fragilisée par la situation actuelle, connaîtra en 2020 un nouveau déficit d’exploitation de 9, 5 millions d’euros.
En ce qui concerne France Médias Monde, en tant que membre du conseil d’administration, je peux attester de son rôle à l’international et des efforts fournis par la direction afin d’améliorer la situation financière de l’entreprise, au travers du plan de départs volontaires voté en 2019.
Les contrats d’objectifs et de moyens, bien que ne compensant pas l’absence de gouvernance commune, permettront aux six opérateurs de défendre cinq objectifs communs : la mise en avant de la singularité de l’offre publique, la mutualisation des achats, la concentration des moyens vers l’offre au public et la variété des programmes, la stabilité financière et l’exemplarité sur les questions d’égalité entre les hommes et les femmes, de réduction de l’empreinte carbone, d’insertion dans l’emploi et de défense de la laïcité.
Sur ce dernier point, cette année 2020 est particulièrement difficile pour notre audiovisuel extérieur. France Médias Monde et TV5 Monde ressentent en effet pleinement les tensions internationales réveillées par la réaffirmation de l’attachement indiscutable de la France à la défense de la liberté d’expression.
En ce qui concerne les industries culturelles, le cinéma a été impacté à tous les niveaux des chaînes de production et de distribution et a subi un véritable coup d’arrêt. En temps de crise, ce sont les plus petites structures qui sont le plus souvent touchées, en l’occurrence le cinéma indépendant.
La mission « Plan de relance », qui prévoit 165 millions d’euros en faveur du cinéma, devrait, comme le souligne le rapport de la commission des finances, permettre de compenser un effondrement des taxes affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée en 2020. Dans le même temps, elle permettra de financer les crédits dédiés aux dispositifs mis en place en faveur d’un rebond de l’industrie cinématographique.
Dans ce contexte difficile, sans aucune visibilité, il convient de saluer l’action du CNC en faveur d’un rebond rapide du secteur, selon trois axes clefs : rattraper le retard de production, encourager la sortie des films en période de reprise et assurer la viabilité des salles de cinéma à court et à long terme.
Cette année marque également l’entrée en fonction du Centre national de la musique. En plus des missions qui lui avaient été confiées, le CNM s’est retrouvé en première ligne pour sauver un secteur dont le pronostic vital était engagé. Je salue le dévouement dont ont fait preuve les équipes, ainsi que le maintien des crédits qui lui avaient été alloués. Je m’associe à la proposition du rapporteur spécial de voir réaliser un bilan d’activité du CNM, dans un rapport dédié, au terme de cette première année d’existence.
Toutefois, le secteur de la musique, dans son ensemble, n’a pas été assez pris en compte et nous nous en inquiétons. Ce sera un point de vigilance particulier.
Enfin, je tiens à saluer l’engagement de l’ensemble de ces acteurs qui, en période de crise, n’ont cessé d’œuvrer pour maintenir leur secteur à flot, au service de l’exception culturelle française. Nous ne pouvons que nous incliner devant leur résilience.
Hormis les réserves exprimées, mes chers collègues, notre groupe s’en remettra à l’avis de nos rapporteurs et votera pour l’adoption des crédits de la mission et ceux du compte spécial dédié à l’audiovisuel public.