Madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, pour le secteur des médias, presse, livre et industries culturelles, l’année 2020 aura été dévastatrice. Les orateurs précédents l’ont répété.
Au mois de juillet dernier, avant même l’annonce du reconfinement le 28 octobre, le ministère de la culture évaluait les pertes de chiffre d’affaires du secteur des médias et des industries culturelles à 22, 3 milliards d’euros.
Les plans d’urgence et les fonds de secours sectoriels se sont succédé jusqu’au projet de loi de finances. Cette cascade de financements, les uns urgents, les autres relevant de la classique discussion budgétaire, rendent l’exercice d’analyse plus complexe, mais néanmoins nécessaire.
Concernant la presse, si je salue le soutien continu apporté aux différents acteurs de la filière, dans le prolongement du sauvetage de Presstalis, je ne comprends toujours pas pourquoi la presse professionnelle, celle de la connaissance et du savoir, est systématiquement écartée des aides, alors que la presse d’information politique et générale (IPG) bénéficie d’un puissant soutien gouvernemental.
Aussi, je souhaiterais que mon amendement instituant un crédit d’impôt pour un premier abonnement à l’un de ces titres puisse être conservé dans la loi de finances.
Concernant la musique et le spectacle vivant musical, le soutien qui lui est apporté via le Centre national de la musique est significatif, en complément du fonds de secours destiné aux PME et TPE du secteur.
Néanmoins, un vrai problème demeure, celui de la diminution des aides à la création allouées par les organismes de gestion collective, dans un contexte marqué par l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 8 septembre 2020, qui divise par deux les « irrépartissables ». Cela représente une perte de 25 millions d’euros par an pour la diffusion du spectacle vivant ou la formation des artistes.
Le cinéma est également un secteur de la culture très sinistré. Pour le soutenir, j’ai déposé plusieurs amendements instituant des crédits d’impôt ou élargissant l’assiette de ceux qui existent.
Par ailleurs, un hiatus important demeure : si l’allongement de la période d’exonération de la taxe sur les entrées en salles de spectacles cinématographiques (TSA) jusqu’à la fin de décembre 2020 est une excellente mesure, qui soutient immédiatement la trésorerie des exploitants de cinéma, cet allongement représente en revanche un manque à gagner pour le CNC de près de 20 millions d’euros pour le financement de son plan de relance. Madame la ministre, je vous en conjure, demandez à Bercy de faire le nécessaire !
Enfin, j’insisterai sur le secteur du livre, qui me tient particulièrement à cœur.
La fermeture des librairies était – je le dis tout net – une erreur majeure. La forte mobilisation des professionnels et des élus a d’ailleurs démontré l’attachement à ce service de proximité essentiel, vecteur de lien social et lieu de diffusion de la culture, du savoir et de la connaissance. J’ajoute que l’on ne pouvait décemment croire que le « cliquer et collecter » était à lui seul de nature à sauver les librairies, de même que l’allégement des tarifs postaux, qui devront impérativement être pérennisés.
Il faut néanmoins saluer les efforts d’accompagnement mis en place en leur faveur dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 : par l’intermédiaire du Centre national du livre, 25 millions d’euros ont été alloués aux librairies pour soutenir leur trésorerie et 6 millions d’euros pour la modernisation de leur outil numérique. Cinq millions d’euros ont par ailleurs été fléchés vers les maisons d’édition.
Les auteurs et les artistes ont, quant à eux, pu accéder au fonds de solidarité, mais ils n’y étaient pas tous éligibles lors de sa mise en place, à défaut de disposer d’un numéro Siret. Je me réjouis que l’amendement de notre collègue Sylvie Robert et le mien, visant à défiscaliser et désocialiser les aides qui leur ont été versées par les fonds d’urgence sectoriels, aient été satisfaits.
Concernant le livre et la lecture, le budget 2021 progresse, mais cette augmentation correspond en grande partie au soutien consenti à la Bibliothèque nationale de France pour la réhabilitation du site Richelieu et le financement adéquat de ses missions.
Cependant, comme pour les autres industries culturelles, vous avez également décidé, madame la ministre, de présenter un plan « filière livre », soutenu par les crédits du plan de relance et orchestré par le CNL, à hauteur de 29, 5 millions d’euros en crédits de paiement et 53 millions d’euros en autorisations d’engagement.
Que l’État accentue son soutien en faveur des collectivités territoriales, en modernisant leurs bibliothèques et en renforçant leur budget d’achat de livres imprimés auprès des librairies de proximité, est une excellente nouvelle. C’est un moyen de développer la pratique de la lecture chez nos concitoyens, notamment les plus jeunes, qui bénéficieront de la distribution de chèques « Lire ».
La poursuite de l’aide à la modernisation de l’outil numérique des librairies, qui sera doublée, après l’enveloppe de 6 millions d’euros déjà ouverte dans la troisième loi de finances rectificative, constitue un autre point positif de cette relance.
Toutes ces mesures indispensables permettront-elles cependant à l’ensemble des acteurs de la chaîne du livre, auteurs, éditeurs, imprimeurs et distributeurs, de surmonter les conséquences des deux confinements et de prendre de nouveau des risques pour promouvoir la diversité culturelle française ?
Tous les grands événements autour du livre et de la lecture, notamment les salons et manifestations, attendus chaque année par les lecteurs, ont dû être annulés. Quelle tristesse de voir cette semaine les grands prix littéraires proclamés par visioconférence, même si je félicite chaleureusement les lauréats !
Je veux toutefois être optimiste : continuons à défendre ces enjeux essentiels pour notre pays que sont la vitalité culturelle, la diversité de la création, le rayonnement des idées et la diffusion des œuvres de l’esprit. Je sais pouvoir compter sur votre engagement personnel, madame la ministre. C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera les crédits de cette mission.