Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires économiques — Réunion du 26 novembre 2020 à 8h35
Réforme de la politique agricole commune — Audition en commun avec la commission des affaires européennes du sénat la commission des affaires économiques et la commission des affaires européennes de l'assemblée nationale de M. Julien deNormandie ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Photo de Jean BizetJean Bizet, sénateur :

Chacun convient désormais que l'action pour l'environnement et le climat n'est plus une option. Que l'agriculture prenne sa juste part de l'effort collectif ne fait plus débat. Mais n'oublions pas que la PAC est une politique avant tout économique et que son verdissement, au fil des réformes, est source de profondes préoccupations pour l'économie agricole européenne et surtout française.

Certaines études auraient démontré que, mises bout à bout, les ambitions de la nouvelle architecture verte de la PAC et du Green Deal via les stratégies « Biodiversité » et « De la ferme à la table » pourraient se traduire par une baisse de productivité allant jusqu'à 15 %, voire plus pour certaines filières. J'observe que cette décroissance vient se conjuguer à un nouveau modèle de mise en oeuvre de la PAC qui, malgré les aménagements utiles proposés par le Parlement européen, n'est pas remis en cause par les colégislateurs. Nous en connaissons tous les dangers, en premier lieu desquels une renationalisation rampante de la PAC qui renforcerait les distorsions de concurrence entre les États membres, notamment au niveau environnemental car certains - je pense en particulier à la France - ne pourront s'empêcher de laver plus vert que vert tout en refusant d'utiliser certaines avancées techniques mises à leur disposition par la recherche scientifique. Vous savez l'attachement que je porte à la new breeding technology, qui peut être une très belle réponse mais dont la mise en oeuvre demande un certain courage politique. Dans ce contexte, je crains que nous nous dirigions vers une double peine pour les agriculteurs français, dont le niveau de revenus est déjà catastrophique, et que nous nous éloignions de notre nécessaire ambition en matière de souveraineté alimentaire.

Si les comptes publics ne sont pas en mesure d'absorber tous les surcoûts créés pour nos agriculteurs par ces choix de politique publique, alors c'est le marché qui devra le faire un jour ou l'autre. Or nous savons bien qu'il ne le fera pas spontanément. Les règles européennes en matière de concurrence doivent évoluer beaucoup plus profondément pour tenir compte des spécificités agricoles et permettre aux agriculteurs de vivre de leur travail. Au Sénat, nous avons rédigé plusieurs rapports sur ce sujet. Encore une fois, je fais un clin d'oeil au modèle américain et au Capper Volstead Act.

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