Intervention de Philippe Bas

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 16 décembre 2020 à 9h30
Audition de M. Dominique Perben à la suite de son rapport sur l'avenir de la profession d'avocat

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Je remercie le président Buffet d'avoir pris l'initiative de créer cette mission d'information. Certes, je n'ai pas pu entendre la présentation de son rapport ce matin, mais j'en ai eu la primeur hier, lors d'une réunion des membres de la mission d'information durant laquelle nous avons eu toutes les précisions.

Je fais miennes les conclusions de ce travail rapide, mais extrêmement approfondi. Lors des auditions, les personnes entendues nous ont fourni un éclairage dont nous ne disposions pas dans le feu de nos précédents débats législatifs.

Privilégier le vote à l'urne est une évidence : l'électeur a la certitude que, malgré de multiples pressions, il pourra retrouver sa liberté dans le secret de l'isoloir. C'est une bonne chose de mettre l'accent sur cette priorité.

Les conclusions du rapporteur sur le vote par procuration reflètent nos réflexions. Il faut permettre à des personnes âgées, dépendantes, handicapées ou malades de voter. Ce n'est pas cela qui « transformera » le taux de participation électorale, mais c'est une aide que nous devons à des personnes qui ont voté toute leur vie et qui, pour la première fois et par peur de l'épidémie, décident de ne pas aller jusqu'au bureau de vote.

Le fait de donner une procuration à une seconde personne, de permettre à une personne en dehors de sa commune d'en avoir une et d'imposer à un officier de police judiciaire de recueillir des procurations à domicile sont de bonnes choses.

Si le vote postal est moins à l'abri des pressions extérieures que le vote à l'urne, est-ce une raison pour l'écarter ? De grandes démocraties le pratiquent avec succès, et il est utilisé par les Français de l'étranger. Doit-il être une alternative ou un complément au vote à l'urne ? Cela ne nécessite pas la même organisation... Généraliser le vote par correspondance « papier » offrirait à tous la possibilité de voter ainsi, tandis que le réserver aux seules personnes ne pouvant pas se déplacer jusqu'au bureau de vote serait plus restrictif.

Si l'on veut « réacclimater » le vote par correspondance « papier » ou expérimenter le vote numérique, utilisons-les plutôt comme compléments que comme des alternatives complètes au vote à l'urne, notamment pour des raisons de sécurité du vote et d'indépendance des électeurs.

A-t-on le temps de mettre en place un tel dispositif d'ici les prochaines élections régionales et départementales ? Lors des auditions, la réponse des personnes entendues a été unanime : non. Il est tellement difficile de mettre en place une nouvelle modalité de vote de façon rassurante qu'il ne faut pas improviser. L'expérimentation sur un certain temps est la seule possibilité réellement ouverte.

Espérons que l'épidémie de coronavirus ne dure pas trop longtemps, mais c'est la troisième épidémie venant d'Asie depuis le début de ce siècle. Il y aura de nouveaux phénomènes épidémiques dans les prochaines années et l'on ne peut pas « suspendre » la démocratie à la situation sanitaire. Reporter les scrutins ne sera pas toujours possible. Viendra le jour où des élections présidentielles, législatives ou sénatoriales seront menacées par une pandémie !

Nous attendons du Gouvernement qu'il fasse l'inventaire des dispositions réglementaires du code électoral afin que l'organisation des bureaux de vote tienne compte des exigences pour assurer la sécurité sanitaire du vote. Cela ne relève pas de la loi mais du décret.

Laisser passer les quelques mois qui nous séparent des élections régionales et départementales sans prendre en compte les questions de sécurité sanitaire ferait porter une lourde responsabilité au Gouvernement. Se retrouver en 2022 dans une situation sanitaire dissuadant d'aller voter à l'élection présidentielle ferait courir un très grave danger. Nous sonnons l'alerte : toutes les élections ne sont pas reportables. La démocratie est essentielle et doit s'exercer en toute sécurité.

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