Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, née à Rennes, je suis aujourd’hui sénatrice du Finistère, mais je dois vous faire une confidence : je ne parle ni le gallo ni le breton.
Parfois, je tente. Parfois, je baragouine. D’ailleurs, « bara » signifie le pain, et « gwin » le vin : union de deux mots d’origine bretonne !
La langue, c’est un trésor. La langue, c’est une histoire.
Mais, à vrai dire, je ne parle pas non plus l’alsacien, le francique-mosellan, le basque, le créole, le corse ou l’occitan, pas plus que le catalan, le wallisien et futunien ou le tahitien. Quoique, sur le tahitien, j’aie bon espoir de pouvoir progresser grâce à mon collègue de groupe, Teva Rohfritsch – je m’y suis d’ailleurs récemment essayée, sur un réseau social, pour le féliciter d’une nomination.
En fait, je parle le français, et l’espagnol par mes origines familiales.
J’ai voulu consulter les autres membres de mon groupe sur la signification que revêtaient, pour eux, les langues régionales, et j’ai voyagé, de départements en régions, de souvenirs d’enfance en moments plus présents.
Sans les parler donc, j’essaierais toutefois, dans les quelques minutes dont je dispose, de rappeler leur appartenance à notre patrimoine commun et d’en défendre l’apprentissage, puisque tel est l’objet de la proposition de loi votée en première lecture à l’Assemblée nationale et dont un grand nombre d’articles a été adopté conforme par les membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat. Je voudrais expliquer pourquoi…
Partons, tout d’abord, d’une définition la plus simple possible : une langue régionale est, du point de vue géographique, parlée dans une région faisant partie de l’État, plus vaste. D’un point de vue historique, elle est parlée depuis plus longtemps que le français.
Partons, ensuite, d’un constat : la pratique des langues régionales, richesse linguistique de notre pays, est aujourd’hui en baisse. À ce propos, je cite le linguiste George Steiner, décédé en début d’année : « La mort d’une langue, fût-elle chuchotée par une infime poignée sur quelque parcelle de territoire condamné, est la mort d’un monde. Chaque jour qui passe s’amenuise le nombre de manières de dire “espoir”. »
Rappelons enfin ce qui doit être une évidence : notre attachement profond au principe d’unicité du peuple français et d’indivisibilité de la République. Ainsi peut-on lire, à l’article 2 de notre Constitution, « la langue de la République est le français ».
Toutefois, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, a introduit un article 75-1, nouveau, portant la mention suivante : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. » Là aussi, une évidence !
C’est un équilibre à trouver, dans un cadre qu’il nous faut préserver et par l’échange. J’oserai presque dire qu’il nous faut parvenir à ce « en même temps », mais suis-je dans la bonne assemblée pour cela ?
Lors de sa visite à Quimper en 2018, dix ans après la révision constitutionnelle, Emmanuel Macron avait affirmé vouloir soutenir les langues régionales.
Disons-le, l’école est le principal vecteur de transmission de ces langues. Des dizaines de milliers d’élèves suivent ces enseignements dans un cadre défini et, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, lors de l’examen de la loi pour une école de la confiance : « Je me réjouis du foisonnement de nos langues […]. Il y a une langue de la République et il y a des langues de France et nous devons les soutenir. Notre politique volontariste pour la bonne maîtrise du français par tous les enfants peut très bien aller de pair avec une politique dynamique au service des langues régionales. » Je partage ce point de vue.
Depuis votre arrivée, l’offre a été renforcée face à la baisse massive, au collège et au lycée, des effectifs d’élèves étudiant ces langues.
La loi précédemment évoquée a étendu à l’enseignement privé les dispositions relatives à la prise en charge du forfait scolaire dans le cas où un élève s’inscrit dans une école située en dehors de sa commune de résidence pour y recevoir un enseignement en langue régionale.