Mes chers collègues, je ne pense pas que l’on puisse déterminer un vote en prenant appui sur des chiffres faux ou des connaissances erronées.
J’ai beaucoup d’admiration, de respect et d’amitié pour Bernadette Dupont, mais je dois dire – et je m’en excuse auprès d’elle – que certains propos ne servent malheureusement pas la cause défendue.
Monsieur Retailleau, les chiffres que vous avez cités sont caducs, et ce depuis près de quatre ans. Il est vrai qu’auparavant environ 700 décès avaient lieu à la suite d’une amniocentèse pour 300 trisomies ayant abouti à des interruptions médicales de grossesse. Les nouveaux tests pratiqués aujourd’hui ont très nettement diminué le nombre d’amniocentèses, et donc le nombre d’accidents que l’on pouvait regretter voilà encore quelques années.
Par ailleurs, il est vrai que 92 % des femmes enceintes sont soumises à ces tests, et que 96 % des tests positifs à la trisomie 21 ont pour conséquence une IMG, et non l’inverse, ainsi que l’a soutenu Mme Payet. Ce taux est de 70 % dans les autres pays européens.
Ces trois amendements identiques visent à rétablir les mots : « lorsque les conditions médicales le nécessitent » à l’alinéa 4 de l’article 9, mots ajoutés par l’Assemblée nationale au texte initial et que la commission des affaires sociales a supprimés.
L’Assemblée nationale avait en effet souhaité que les examens de biologie et d’imagerie destinés à évaluer un éventuel risque soient proposés à la femme enceinte uniquement « lorsque les conditions médicales le nécessitent ». La commission a supprimé cet ajout car elle a jugé qu’il posait plus de problèmes qu’il ne semblait a priori en résoudre.
Il pourrait d’abord conduire au non-respect du droit du patient à être informé.
Il renvoie ensuite au médecin, et non plus à la femme, le choix de procéder ou non aux examens de diagnostic prénatal, ce qui constitue une atteinte au principe d’autonomie du patient. Les femmes sont en effet libres d’accepter ou de refuser ces examens, comme l’a rappelé le CCNE, le Comité consultatif national d’éthique, et comme cela figure à l’alinéa 9 de l’article. Il serait paradoxal qu’en voulant renforcer le libre choix des femmes, on privilégie en fait le pouvoir du médecin.
En outre, cet ajout crée une rupture d’égalité entre les femmes.
Enfin, il fait reposer une responsabilité accrue sur les professionnels, qui pourront se voir reprocher de ne pas avoir proposé un dépistage à une femme « évaluée sans risque » alors que celui-ci était avéré.
J’ajoute que la très grande majorité des collèges de professionnels et les sociétés savantes se sont fermement élevées contre cette disposition.
Le dépistage prénatal est une phase essentielle du suivi de la grossesse. Il est important qu’il soit réalisé dans des conditions aussi respectueuses que possible de la liberté des femmes.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.