Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette proposition de loi vise à instaurer une contribution exceptionnelle sur les assurances en cas de crise sanitaire majeure. C’est un dispositif juste et proportionné, à l’inverse d’une taxe aveugle.
« Nous sommes en guerre. » Vous vous souvenez certainement de ces paroles prononcées par le président Macron en mars. L’État revient au cœur des politiques de solidarité. Tous, cette année, nous appelons à plus d’État, à tel point que le Fonds de solidarité pour les entreprises se monte déjà à plus de 20 milliards d’euros.
Parallèlement, on nous a répété, tout au long de l’année, qu’il n’y aurait pas d’« argent magique ». Effectivement, l’argent, c’est des maths. Mais aider les entreprises qui souffrent et risquent de mourir, c’est une nécessité. Je ne vous parlerai pas de l’hôtellerie, de la restauration, de nos fameux « petits commerces » ou des secteurs de l’aérien et du tourisme. Vous connaissez leurs difficultés, mes chers collègues.
Comme dans une économie de guerre, certains secteurs profitent de la situation. Dans les guerres, ce sont les marchands d’armes qui prospèrent. Dans la guerre contre le covid, nous pouvons citer les GAFA, les supermarchés, les plateformes numériques et certains secteurs de la santé. Dans toutes les crises majeures, des mesures d’exception sont prises, puisque les règles habituelles, notamment en matière budgétaire, ne tiennent plus. Ainsi avons-nous voté plusieurs projets de loi de finances rectificative (PLFR).
Début avril, un débat public naissait sur l’impact du confinement, cette interdiction incroyable de circuler, cette assignation à résidence qui laissait nos automobiles immobiles. Et chacun de s’inquiéter des sur-profits à venir des assureurs, la baisse de sinistralité dans ce secteur étant évidente. Le chiffre de 1, 4 milliard d’euros fut évoqué, alors que les primes étaient payées.
Taxer ou ne pas taxer ? That is the question. Permettez-moi d’expliquer très simplement le mécanisme que je propose pour les assurances non-vie. Mes propos seront simples, car j’ai entendu dire : « C’est lui, le socialiste, qui veut taxer les assurances à 80 % ! » Non ! La taxe que nous proposons n’est pas aveugle, mais particulièrement nuancée, puisqu’elle s’applique non pas sur le chiffre d’affaires, mais sur le résultat d’exploitation. Nous savons faire la différence entre les deux : il s’agit bien de cibler l’économie exceptionnelle réalisée.
Ce prélèvement exceptionnel de 80 % porte sur la seule augmentation, en 2020, du résultat d’exploitation, comparée à sa moyenne des trois dernières années. Prenons un exemple simple, celui d’une entreprise d’assurances réalisant un résultat d’exploitation de 1 milliard d’euros en moyenne sur trois ans. Si, en 2020, son résultat d’exploitation est de 1, 2 milliard d’euros, le prélèvement s’appliquera à ces 200 millions d’euros supplémentaires et s’élèvera donc à 160 millions d’euros. En aucun cas il ne s’agit d’appliquer le taux de 80 % aux 1, 2 milliard d’euros.
Vous l’avez compris, si cette entreprise réalise un résultat d’exploitation moindre que les trois années précédentes, elle ne paiera rien. Ce n’est pas, monsieur le rapporteur, un dispositif aveugle.
Ce n’est pas non plus une usine à gaz. En effet, il suffit de considérer la déclaration d’impôt sur les sociétés d’avril 2021 pour l’appliquer, sans même avoir à remplir une croix sur un formulaire administratif.
Ce prélèvement est juste et proportionné, à l’inverse de la taxe Husson, que vous avez votée dans le cadre du PLF et qui s’applique aveuglément sur le chiffre d’affaires de toutes les sociétés, qu’elles aient profité de la crise ou en aient été pénalisées. Nous sommes pour la justice.
Seconde particularité de ce mécanisme : il n’est pas systématique ; il ne se déclenche qu’en cas d’état d’urgence sanitaire. Il n’est donc pas récurrent, mais exceptionnel, comme ce séisme covid – de mémoire d’ancien, nous n’avions rien vu d’équivalent depuis la guerre ; rien à voir avec les crises cycliques de l’économie, lesquelles, précisément, ne déclencheront pas ce dispositif.
Quelques observations sur votre rapport, monsieur Nougein : premièrement, vous critiquez le fait que le dispositif proposé se déclenche systématiquement en cas d’état d’urgence sanitaire et ne prévoie aucun critère ni de durée ni d’ampleur géographique de la crise. Par exemple, dites-vous, si une ville ou un département seulement sont concernés, le mécanisme s’appliquera sur toute la France.
Mais cela ne pose aucun problème, puisque le dispositif que nous proposons a pour objet de capter les sur-profits ! Si la crise ne touchait qu’une ville, les sur-profits seraient nuls au niveau national ; il n’y aurait donc pas de déclaration particulière à faire. Et nous espérons tous que l’état d’urgence sanitaire restera une rareté, même si les biologistes nous annoncent davantage de pandémies à l’avenir.
Deuxième point : dans l’état des lieux de votre rapport, vous affirmez, en bon connaisseur, que cette PPL serait fondée sur le postulat socialiste et dogmatique de la profitabilité systématique des compagnies d’assurances. Mais pas du tout !