Intervention de Jacky Deromedi

Réunion du 14 décembre 2020 à 15h00
Conseil économique social et environnemental — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi organique

Photo de Jacky DeromediJacky Deromedi :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons cette semaine par le nouvel examen du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental. Cette nouvelle discussion a malheureusement été rendue nécessaire par l’échec de la commission mixte paritaire du 30 octobre dernier.

Disons-le d’entrée de jeu, notre groupe ne rejette aucunement l’idée de rénover le CESE. Cet organe constitutionnel consultatif a un rôle à jouer afin de favoriser le dialogue entre les forces vives de la Nation et d’appuyer le législateur dans son travail. D’ailleurs, lors de la première lecture, notre rapporteur, Muriel Jourda, avait mis en exergue la sous-utilisation du potentiel du Conseil, tout en rappelant que, évidemment, il n’avait pas vocation à devenir une « troisième chambre ».

De toute façon, le choix fait par le Gouvernement de réformer le CESE à droit constitutionnel constant écarte d’emblée toute possibilité de changements radicaux.

Quoi qu’il en soit, il est devenu manifeste, au cours de la navette, que la vision du Sénat quant à l’avenir du CESE n’était pas entièrement partagée par la majorité et le Gouvernement. Cela dit, il convient de saluer, comme l’a fait le rapporteur, la qualité du dialogue qui a été noué dans le cadre de la recherche d’un compromis, dialogue qui a rendu possibles certaines convergences sur plusieurs sujets du texte.

C’est ainsi que nous pouvons nous féliciter de voir que les députés ont maintenu les apports sénatoriaux relatifs à l’organisation interne du CESE. Il en va de même pour la structuration d’un dispositif déontologique solide, qui fera intervenir la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Cependant, ces convergences ne peuvent masquer les points de désaccord substantiels qui persistent sur un certain nombre des principales dispositions du texte.

Il en est ainsi de la question du recours au tirage au sort pour la participation des groupes de citoyens aux travaux du CESE. L’introduction d’un tel processus dans le fonctionnement d’une institution constitutionnelle, même consultative et dans le cadre d’une procédure de portée limitée, nous semble incompatible avec notre modèle de démocratie représentative. Quand bien même cela ne suffirait pas à nous dissuader, il ne faut pas oublier que, le jeu des récusations aidant, constituer un échantillon un tant soit peu représentatif par le biais du tirage au sort est quelque chose de passablement difficile, comme a pu le rappeler Philippe Bas à l’occasion de la CMP.

Un autre point de désaccord majeur se situait au niveau du dispositif dit de « subrogation », à l’article 6 du projet de loi organique. Ce dernier permet au Gouvernement d’être dispensé de certaines consultations d’organismes, pourvu qu’il consulte le CESE.

Si nous partageons évidemment le désir de donner corps au rôle consultatif du Conseil, il est simplement incohérent et inefficace de le faire de la sorte : d’une part, le CESE ne dispose pas des moyens techniques et administratifs appropriés ; d’autre part, une telle mesure risquerait d’abîmer simultanément sa légitimité, par défaut d’expertise technique, et celle des organes subrogés, qui se verraient ainsi dépossédés périodiquement de leur rôle.

Enfin, il y a d’autres dispositions problématiques sur lesquelles un accord n’a pas été possible. C’est le cas de la consultation des Ceser par le CESE et de la réduction des effectifs du Conseil, laquelle intervient au détriment des conseillers ultramarins.

Vous comprendrez donc qu’à nos yeux, l’accumulation de ces désaccords substantiels exclut que nous nous rangions derrière le texte des députés. Plutôt que de poursuivre en vain la discussion, notre groupe votera donc en faveur de la motion tendant à opposer la question préalable déposée par le rapporteur.

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