Intervention de Marie-Laure Phinera-Horth

Réunion du 14 décembre 2020 à 15h00
Répartition des sièges de conseiller à l'assemblée de guyane entre les sections électorales — Adoption définitive en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Marie-Laure Phinera-HorthMarie-Laure Phinera-Horth :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons cet après-midi tend à valider l’augmentation du nombre de conseillers de l’assemblée de Guyane et à décider de la répartition des sièges par section. Ce texte, déposé par Lénaïck Adam, député de Guyane, n’entraîne aucune modification du mode de scrutin des élections de la collectivité territoriale de Guyane, mais il permettra une meilleure représentation de la population au sein de cette collectivité. Il répond aux dispositions déjà prévues par le code électoral.

Je tiens tout d’abord à saluer l’excellent travail fourni par les rapporteurs des deux chambres. Je remercie particulièrement notre collègue rapporteure, Catherine Belrhiti, qui a bien voulu nous auditionner. Elle a su saisir deux points qui me semblent essentiels : d’une part, le consensus de toute la classe politique guyanaise sur les objectifs visés par cette proposition de loi ; d’autre part, la nécessité d’une adoption rapide, pour une promulgation de la loi avant le 31 décembre 2020, condition indispensable pour que les élections de la collectivité territoriale de Guyane aient bien lieu au cours de l’année 2021, à l’instar des élections régionales et départementales.

Ainsi, cette proposition de loi prévoit que la répartition du nombre de sièges par section, le nombre de sièges octroyés au titre de la prime majoritaire et la répartition par section de ces derniers devront être déterminés, en application des règles énoncées par la loi, par un arrêté préfectoral pris au plus tard le 15 janvier de l’année du renouvellement de l’assemblée de Guyane.

Mme la rapporteure et mes collègues ont su préciser les dispositions de cette proposition de loi, avec un excellent travail de coordination mené entre les deux assemblées. Je me permettrai donc, monsieur le ministre, de me faire le porte-voix de mes collègues guyanais sur un autre sujet, qui nécessite toute notre attention.

Le texte qui nous réunit ici aujourd’hui trouve sa source dans l’évolution démographique de la population guyanaise. Comme vous le savez, en Guyane, la démographie est galopante. La Guyane est, après Mayotte, le département français dans lequel le taux de natalité est le plus élevé et le taux de mortalité le plus faible. À ces éléments, s’ajoute une pression migratoire constante et de plus en plus prégnante.

La compilation de ces phénomènes nous pousse à interroger les chiffres du recensement effectué par les services de l’État.

Comment expliquer aux Guyanais, qui voient pousser des bidonvilles et des squats sur les terrains vagues et dans les maisons abandonnées, que nous n’avons toujours pas franchi la barre des 300 000 habitants sur ce territoire aussi vaste que le Portugal ?

Comment expliquer à mes compatriotes qu’avec nos 290 000 habitants nous produisons autant de déchets que 300 000 Nantais, alors que notre système de collecte est malheureusement défaillant, voire inexistant sur une large partie du territoire ?

L’ancienne maire de la ville de Cayenne que je suis est plus que convaincue que les chiffres de la population en Guyane sont largement sous-estimés, et j’insiste sur ce terme. Dans leur rapport intitulé Soutenir les communes des départements et régions d ’ outre-mer, pour un accompagnement en responsabilité, mon collègue sénateur Georges Patient et le député Jean-René Cazeneuve ont souligné, au titre de leur recommandation n° 5, la question générale des difficultés de recensement rencontrées dans certains territoires ultramarins, dont la Guyane fait partie.

En Guyane, l’organisation du recensement de la population s’appuie sur les mêmes textes réglementaires que pour le reste de la France. Les collectes sont exhaustives tous les cinq ans pour les communes de moins de 10 000 habitants et annuelles, sur la base de 8 % des logements, pour les communes de plus de 10 000 habitants. Mais l’Insee et les communes doivent s’adapter davantage pour effectuer des collectes plus précises et en cohérence avec les particularités guyanaises. Je pense à la collecte dans l’habitat informel, dans les zones d’habitat où les naissances sont très rapides, comme en bord de fleuve et dans les zones d’orpaillage illégal.

Malgré les efforts des uns et des autres, nous sommes encore loin du compte.

Cette sous-estimation de la population a d’autres conséquences.

Je rappelle ainsi que l’État se fonde sur ces chiffres pour calculer, notamment, la dotation globale de fonctionnement. Certes, la DGF est en progression en Guyane, mais elle demeure l’une des plus faibles de l’ensemble des collectivités ultramarines. Or elle est la première et principale source contributive au budget des communes de Guyane, compte tenu de la faiblesse des ressources fiscales. Les budgets des collectivités de Guyane peuvent donc se voir amputer de dotations, du fait d’une évidente sous-estimation de la population, qui sert de base au calcul de la DGF.

Par ailleurs, j’ai déjà eu l’occasion de rappeler dans cet hémicycle la situation des écoles de Guyane, qui ne peuvent pas scolariser l’ensemble des enfants se présentant à leurs portes, ce qui pose un véritable problème dans un territoire où nombre de jeunes se trouvent en déshérence. Nous ne pouvons pas non plus offrir suffisamment de logements à nos habitants, notamment aux plus pauvres d’entre eux.

Monsieur le ministre, je profite de ce texte sur la Guyane pour formuler un souhait : que l’État et ses services déconcentrés assurent un recensement plus efficace et précis de la population de Guyane. Nous savons pouvoir compter sur les engagements du Gouvernement.

Le groupe RDPI votera bien évidemment ce texte, essentiel à la vie démocratique en Guyane.

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