On ne peut pas le nier : il est quand même perturbant de constater les deux visages de la politique française en matière d’écologie.
D’un côté, la loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures était, selon le Gouvernement, un signal fort, un engagement dans la continuité de l’accord de Paris ; la France, disait-il, assume son rôle de chef de file dans la lutte contre le changement climatique. Bref, il s’agissait d’un florilège d’autosatisfaction et d’autofélicitations !
De l’autre, la France continue, respectivement jusqu’en 2025 et 2035, de couvrir les prêts octroyés en vue d’exporter des biens et services ayant pour objet l’exploration de gisements ou l’exploitation d’hydrocarbures liquides et gazeux.
La loi précitée était déjà largement insuffisante : elle prévoyait un arrêt de la recherche et de l’exploration trop lointain, en 2040, et introduisait des dispositions dérogatoires. Désormais, on prévoit de poursuivre les garanties publiques à l’export pendant quinze ans : c’est en deçà de toutes les obligations de la France en matière climatique, que le Conseil d’État a pourtant rappelées il y a quelques jours au Gouvernement.
Vous me direz probablement que ces mesures anti-climat sont documentées par un rapport ; cela tombe bien. Ce rapport repose sur une méthodologie déplorable : un questionnaire distribué à 200 entreprises et seulement un quart de réponses obtenues ; un questionnaire relayé par les fédérations professionnelles et des questions complaisantes. Si vous demandez aux entreprises qui réalisent un important chiffre d’affaires à l’export si elles souhaitent que l’État garantisse une large part de leurs activités, elles répondront oui, évidemment !
Ce rapport a toutefois le mérite de mettre en lumière que l’État se substitue aux banques privées qui refusent de garantir les cautions de soumission ou de bonne exécution. Il y a une faille de marché pour ces activités polluantes, tout comme ces activités engendrent des failles sismiques et les séismes induits de la déforestation.
Au total, quatre projets soutenus entre 2015 et 2019 représentent 97 % des 4, 5 milliards d’euros d’engagements au titre des encours d’assurance-crédit.
Mes chers collègues, voici quels sont ces projets, au confluent de la politique économique et de la diplomatie, mais bien loin des enjeux environnementaux : la construction et la mise en service d’un gazoduc entre la frontière turco-grecque et la mer Adriatique ; le développement d’un champ sous-marin et d’une unité flottante de liquéfaction et de stockage de gaz naturel au large du Mozambique ; deux programmes de création d’installations de liquéfaction de gaz naturel en Russie.
Comme d’habitude lorsqu’il s’agit d’environnement, ce rapport conclut en insistant sur l’emploi et sur les conséquences désastreuses qu’il pourrait subir. Or la majorité des entreprises pourraient réorienter leurs activités vers des filières plus vertueuses, et la cessation de soutiens publics n’empêcherait pas la réalisation de ces projets.
Arrêtons de nous poser en exemple en invoquant la loi Hydrocarbures : non seulement ce texte n’est pas ambitieux