Le Beauvau de la sécurité et la répartition entre police nationale et gendarmerie intéressent beaucoup, je le sais, les parlementaires, en particulier les membres de la Haute Assemblée, en charge de représenter les collectivités territoriales.
Le travail que j'ai engagé à la demande du Président de la République permettra de construire une grande loi de programmation de la sécurité intérieure. Cela n'avait pas été fait depuis le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur. Les organisations syndicales de la police et les représentants des gendarmes ont approuvé les propositions que je leur ai adressées concernant les méthodes qui présideront à nos discussions. J'ai suggéré que des membres du Parlement et des élus locaux, notamment des maires, puissent participer à nos travaux sur la formation, sur les inspections, sur le maintien de l'ordre, etc. Des mesures seront envisagées sur ces différents thèmes. Je souhaite également que puissent être organisés dans tous les territoires de la République des débats publics avec les policiers, les gendarmes, mais aussi les acteurs de la société civile. Le Président de la République pourrait conclure le Beauvau de la sécurité au mois de mai.
Le Livre blanc de la sécurité intérieure avait été commandé par mon prédécesseur. Il porte sur la sécurité en général : organisation des forces de l'ordre, mais également sécurité civile et réponses face aux grandes crises. Parmi les propositions figure effectivement une nouvelle répartition entre la police et la gendarmerie, les territoires de la délinquance ayant évolué. Ce n'est pas nous qui avons proposé les nouvelles cartes, mais nous allons les examiner. Tout en maintenant la distinction entre la police et la gendarmerie, on peut envisager de mutualiser certaines actions face à la cybercriminalité, au trafic de drogue ou aux cambriolages. J'engagerai une discussion avec les élus et les forces de l'ordre territoire par territoire, en regardant les chiffres de la délinquance.
Je salue le travail très important que les députés Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue ont réalisé à l'Assemblée nationale sur la proposition de loi relative à la sécurité globale. Ce texte très ambitieux, qui a été l'un des mieux votés de la législature, permet des avancées considérables dans trois domaines : les compétences de la police municipale, la sécurité privée et l'utilisation des images.
Il prévoit un continuum : si l'État est et doit rester le responsable de la sécurité publique, tout le monde participe. Je pense aux agents de sécurité privés, dont l'un a empêché un attentat voilà cinq ans en ne laissant pas un terroriste pénétrer dans le Stade de France, ou aux agents de police municipale, qui, nous l'avons vu récemment à Nice, sont parfois primo-intervenants face au terrorisme. Si le rôle de l'État en matière de sécurité doit demeurer, nous devons mieux travailler avec nos partenaires sans les considérer comme des acteurs de seconde zone. Ayant été maire, j'ai moi-même souvent regretté que la police municipale soit considérée par l'État comme une force d'appoint.
Nous traitons dignement les compétences de police municipale avec une expérimentation tout à fait originale à l'article 1er, mais nous renforçons en parallèle la place de l'État. Le texte ne prévoit aucun désengagement de l'État. La police municipale pourra constater des délits, aura des compétences judiciaires, mais elle ne pourra pas procéder à des actes d'enquête. Le renforcement des compétences des polices municipales sera gage de meilleure action pour la sécurité de nos concitoyens. D'ailleurs, Christian Estrosi, le président de la commission consultative nationale des polices municipales, a salué ce texte. Bien entendu, certains éléments peuvent toujours être améliorés.
Nous instituons de nouveaux délits pour mieux lutter contre certaines armes par destination, comme les mortiers. Nous sommes également favorables à l'interdiction du protoxyde d'azote, voire à certaines dispositions relatives aux rodéos.
Nous apportons des réponses extrêmement concrètes sur la question des images, avec la mise en place des centres de supervision urbains (CSU). Leur mutualisation permettra aux petites communes, notamment dans les zones gendarmerie, de mettre en place la vidéoprotection sans se ruiner.
Il s'agit aussi de régulariser l'utilisation des drones. Nous voulons encadrer l'utilisation des images, en protégeant la vie privée de nos concitoyens. De même, la généralisation des caméras-piétons permettra une meilleure protection des fonctionnaires de police ou de gendarmerie et facilitera les enquêtes.
En ce qui concerne la sécurité privée, nous voulons non pas faire des agents de sécurité des « policiers bis », mais prendre au sérieux cet acteur économique très important. Nous allons renforcer les contrôles et les sanctions du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), qui dépend du ministère de l'intérieur, et apporter une aide sur la formation et la déontologie des agents.
Le Gouvernement sera évidemment attentif à la rédaction que le Sénat proposera sur l'article 24. Nous souhaitons ardemment pouvoir continuer à protéger nos forces de l'ordre. Il est normal de protéger ceux qui nous protègent.