Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer Patrick Chaize, auteur de la proposition de loi, et les rapporteurs pour avis et au fond, Anne-Catherine Loisier, Guillaume Chevrollier et Jean-Michel Houllegatte, pour le travail accompli et la pédagogie dont ils ont réussi à faire preuve pour expliquer cette problématique « contre-intuitive ».
En effet, contrairement à ce que certains usagers imaginent – cela a été rappelé par nos rapporteurs –, le numérique n’est pas immatériel. Il laisse une empreinte sur l’environnement et celle-ci est malheureusement exponentielle : 2 % des émissions de gaz à effets de serre aujourd’hui en France, et 7 % dans vingt ans.
Faire émerger des pratiques plus vertueuses chez les acteurs du numérique et chez les consommateurs s’impose pour réguler notre empreinte, sans toutefois fragiliser les filières. C’est là toute l’agilité de nos collègues équilibristes qui sont parvenus à formuler des propositions de maîtrise des impacts environnementaux sans handicaper nos entreprises nationales.
Les priorités de ce texte sont claires et intelligibles : informer, éduquer, lutter contre le renouvellement des terminaux, promouvoir des usages écologiquement vertueux et développer des centres de données moins énergivores.
Parce que ces nouvelles pratiques s’imposent à tous, aux acteurs du numérique comme aux citoyens, nous ne pouvons nous contenter d’ordonnances techniques de transposition des directives européennes. La représentation nationale doit en débattre.
Plusieurs points ont en particulier retenu mon attention.
Il s’agit tout d’abord de la mise en œuvre de l’article 16, qui rend obligatoire l’écoconception des sites web et des services en ligne publics, mais aussi de certaines entreprises dont le chiffre d’affaires excède un seuil défini par décret en Conseil d’État.
Je regrette cette restriction qui écarte certaines entreprises. L’écoconception des environnements web ne doit pas être perçue comme un surcoût de conception. Développer « écoconçu » revient à appliquer une méthodologie précise et rigoureuse qui ne demande ni plus de temps ni plus d’argent. Une directive à l’endroit de toutes les entreprises me semble donc souhaitable pour assurer la sobriété numérique, raison pour laquelle je proposerai un amendement en ce sens.
Toujours à l’article 16, nos rapporteurs ont souhaité reporter à 2023 l’entrée en vigueur du dispositif. Ce report ne me semble pas souhaitable dans la mesure où il existe d’ores et déjà beaucoup de matière – rapports, recommandations, etc. – pour établir le référentiel d’écoconception d’un site web.
La formation des différents acteurs de l’écoconception et les démarches d’amélioration sont en ordre de bataille, et elles doivent se poursuivre. Il semble donc inutile, voire regrettable, de faire attendre un marché qui s’est déjà structuré et qui a développé des solutions.
Reporter les efforts à une échéance lointaine pénaliserait finalement davantage les acteurs qui se disent aujourd’hui « prêts ». C’est pourquoi je défendrai également un amendement visant à supprimer ce délai.
Pour terminer sur l’obligation d’écoconception des sites, ne serait-il pas également souhaitable d’y associer des critères d’accessibilité pour les personnes handicapées ? Cet ajout ne rallongerait en aucun cas la conception des sites web et il permettrait une portée RSE globale.
Sur le volet relatif aux centres de données, je proposerai également un amendement visant à faire bénéficier du tarif réduit de taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) les acquéreurs de data centers à climatisation adiabatique qui permettent des économies d’énergie substantielles.
C’est aussi un enjeu de développement économique important pour nos territoires, auxquels le Sénat porte toujours une attention particulière.
Avec cette proposition de loi, le Sénat fait véritablement œuvre utile. Il propose des solutions adaptées et concrètes au défi de la réduction de l’empreinte environnementale du numérique.
C’est pourquoi, en ce mois de janvier, je forme le vœu que ce texte recueille l’assentiment du Gouvernement, qui honorerait au passage ses engagements envers la nouvelle assemblée constituante. Pardon, la convention citoyenne… !