Nous avons tous compris l'extrême complexité de la situation et son caractère totalement schizophrène, puisque, d'un côté, l'Arctique est la vitrine tragique du dérèglement climatique et, d'un autre côté, l'Arctique joue un rôle géopolitique et économique. Ces deux caractéristiques sont totalement contradictoires, comme c'est le cas pour de nombreux autres sujets.
Je poserai trois questions à M. l'ambassadeur.
Premièrement, concernant la biodiversité, le nombre d'incendies a augmenté, au cours de ces dernières années, en particulier au Groenland et en Suède. Pour ce dernier pays, une réponse solidaire européenne a été apportée, afin d'essayer de limiter les dégâts. Pouvons-nous répondre à cette question concrète : l'Europe et la France, qui possède un vrai savoir-faire en la matière, peuvent-elles participer à une augmentation des moyens de défense contre les incendies ? En effet, l'intervention européenne a été positive en Suède. Tel pourrait sans doute être le cas au Groenland, ce qui permettrait de préserver méthane et permafrost. Le rapport entre le coût de cet engagement et les émissions de CO2 économisées serait certainement très positif.
Ma deuxième interrogation concerne le Groenland. À cet égard, l'intervention du président Trump n'était pas si absurde. En effet, la question de savoir si le Groenland quittera l'espace européen pour rejoindre l'espace américain est centrale. Sur ce sujet, je m'étonne du faible investissement européen, même si, je le sais, les rapports entre l'Union européenne et le Groenland sont historiquement compliqués. Comment l'Union européenne, avec le Danemark, fera-t-elle en sorte que le Groenland reste dans l'espace européen, en associant les Islandais ? La réponse à cette question est liée à notre capacité d'investissement au Groenland. Sans doute la diplomatie française a-t-elle un rôle clé à jouer en la matière.
Ma troisième question concerne l'aspect schizophrène du sujet. On ne peut pas dire à la fois que l'Arctique est une grande menace climatique et une grande victime du dérèglement climatique et, parallèlement, en faire l'eldorado des énergies fossiles. Ce n'est pas possible !
Pourtant, la Norvège a annoncé récemment la reprise de l'exploitation pétrolière en Arctique. Il est absolument inimaginable qu'on fasse de la fonte de l'Arctique l'occasion d'augmenter encore plus rapidement nos émissions de GES ! À cet égard, les entreprises françaises sont particulièrement schizophrènes. Pouvons-nous trouver un moyen de réduire au moins l'exploitation pétrolière dans l'Arctique, ce qui n'empêchera pas d'autres exploitations économiques ?