Intervention de Xavier Iacovelli

Réunion du 21 janvier 2021 à 10h30
Protection des jeunes mineurs des crimes sexuels — Suite de la discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Xavier IacovelliXavier Iacovelli :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons s’inscrit dans un contexte politique et médiatique particulier, qui voit enfin une libération progressive de la parole des victimes, mettant fin à l’omerta qui règne trop souvent.

À cela s’ajoute une récente décision de la cour d’appel de Versailles, du 12 novembre dernier, rejetant une demande de requalification en viol de faits présumés d’atteinte sexuelle commis sur une jeune fille de 14 ans.

S’il n’est jamais opportun de légiférer sous le coup de l’émotion ou à la suite d’un fait divers ni de remettre en cause l’office du juge, notre assemblée ne peut rester muette face aux débats sociétaux qui traversent notre pays, en particulier lorsqu’il s’agit de la protection des enfants.

Nous le savons, les jeunes mineurs sont particulièrement exposés aux violences sexuelles, puisque 60 % de celles qui sont recensées concernent des enfants.

Dans leur rapport sur la loi du 3 août 2018, nos collègues députés Erwan Balanant et Marie-Pierre Rixain ont à juste titre estimé que le seuil des 13 ans marquait la limite indiscutable de l’enfance.

Si la notion de consentement trouve déjà sa complexité lorsque le plaignant est un adulte, celle-ci a un écho très singulier lorsque la victime est un jeune mineur.

C’est pourquoi la proposition de loi prévoit d’introduire au sein du code pénal un nouveau crime, puni de vingt ans de réclusion criminelle et caractérisé par tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis par une personne majeure sur un mineur de 13 ans.

Notre assemblée a déjà connu ce débat et le Gouvernement s’est saisi de cette question à l’occasion de l’examen de la loi de 2018. Celle-ci, par une disposition interprétative, est venue préciser l’appréciation de la contrainte et de la surprise, éléments constitutifs du viol et des autres agressions sexuelles, afin d’en faciliter la démonstration par le juge lorsque la victime est un mineur de moins de 15 ans.

Le texte que nous examinons aujourd’hui emprunte un autre chemin, plus affirmé encore, en proposant de criminaliser tous les actes de pénétration sur mineur de moins de 13 ans.

Il est ainsi rappelé qu’au-dessous de cet âge l’enfant est incapable de discernement pour consentir à ce type de rapports avec un adulte.

Il est ainsi affirmé qu’au-dessous de cet âge la question de la violence, de la contrainte, de la menace ou de la surprise ne doit pas intervenir.

Il est ainsi posé, en définitive, un interdit clair dans la loi, plus ferme que le délit d’atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans.

Je tiens à saluer le travail de Mme la rapporteure, Marie Mercier, qui a contribué à l’enrichissement de ce texte par l’adoption de plusieurs amendements en commission.

Son objectif était notamment de ne pas induire, par l’âge de 13 ans, une moindre protection des mineurs de 13 à 15 ans. Si l’articulation de la disposition introduite à cette fin avec les dispositions interprétatives issues de la loi Schiappa peut poser question, l’objectif de ne pas minorer la protection des autres mineurs est justifié.

La question de l’âge et des effets de seuil est centrale et des travaux sont en cours à l’Assemblée nationale sur le sujet. Nous avons tous à l’esprit le rapport d’Alexandra Louis et la proposition de loi d’Isabelle Santiago, auxquels s’ajoute la concertation annoncée aujourd’hui par le garde des sceaux.

Faut-il retenir un seuil de 13 ans, assorti d’une disposition interprétative pour les mineurs âgés de 13 à 15 ans ? Faut-il inclure tous les mineurs de moins de 15 ans, en ménageant des causes objectives d’irresponsabilité ? Ces questions se posent légitimement, en droit comme en opportunité.

D’autres réflexions – d’actualité – sur l’inceste et sur la prescription, enjeu complexe qui peut être déterminant pour la libération de la parole des victimes, mobiliseront notre hémicycle ce matin.

Dans une écrasante majorité, le groupe RDPI votera ce texte.

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