Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Réunion du 21 janvier 2021 à 10h30
Protection des jeunes mineurs des crimes sexuels — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

On ne tergiversera plus pour savoir si la victime a dit oui ou non, si elle savait, si l’auteur des faits connaissait son âge, etc. Désormais, l’âge du consentement est une donnée actée et, pour les mineurs de 13 ans, la notion de consentement s’en trouve écartée.

Pour notre part, nous proposons trois pistes d’amélioration. Certaines ont été retenues par la commission des lois, et j’en suis heureuse, mais ce n’est pas suffisant.

Premièrement, nous voulons agir en direction des victimes. Nous avons déposé un amendement que nous défendrons de nouveau dans quelques instants et pour lequel nous demanderons un scrutin public. Il vise à fixer à 18 ans l’âge du non-consentement dans le cas du crime d’inceste. Avec ce texte, on avance en instituant un seuil d’âge de 13 ans, même si certains souhaiteraient 15 ans : il n’est pas acceptable de ne pas avancer, en parallèle, au sujet de l’inceste. Pour le Sénat, ce serait une véritable occasion manquée.

Deuxièmement, nous voulons agir en direction des auteurs. Nous avons beaucoup parlé des questions de la prescription et de l’imprescriptibilité : nous y reviendrons peut-être, si nous en avons le temps. En la matière, une mesure serait assez utile. Elle a d’ailleurs déjà été votée par le Sénat en 2018 avant de disparaître du texte par le miracle de la commission mixte paritaire : c’est l’interruption de la prescription en cas de multiplicité de victimes.

Il s’agit d’un point essentiel. En effet, c’est souvent en cas de victimes multiples que les personnes agressées sont crues et que leur agresseur est confondu. De plus, nous l’avons vu dans l’affaire Flavie Flament et dans d’autres : du fait de la prescription, les victimes connaissent des sorts qui leur semblent, avec raison, inéquitables. L’interruption de la prescription en cas de victimes multiples permettra le maintien des poursuites contre les auteurs en série, qui, en la matière, sont une grande majorité.

Troisièmement, nous voulons agir en direction des témoins potentiels. Aujourd’hui, notre droit définit le délit de non-dénonciation de violences, maltraitances ou atteintes sexuelles sur enfants. Le problème, c’est que ce délit est un délit et que sa prescription est particulière. Nous proposons que le délai de prescription commence à courir à la majorité de la victime et soit prolongé de dix ans.

Madame la rapporteure, j’ai bien noté que vous souhaitez aller encore plus loin : vous proposez de prolonger ce délai de dix ans en cas de délit non dénoncé et de vingt ans en cas de crime. C’est une très bonne chose et nous vous rejoindrons probablement sur ce point. Il faut faire peser sur les témoins potentiels le poids de la responsabilité, y compris pénale.

Ces mesures ne suffiront sans doute pas à éradiquer le phénomène, mais seuls des efforts convergents en ce sens permettront de mieux protéger les enfants.

Mes chers collègues, vous l’avez compris : les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont favorables à ce texte. Certes, nous le trouvons incomplet, parfois imprécis, et des discussions se poursuivent entre nous au sujet de l’âge. Reste que, dans ce domaine, c’est le Parlement qui avance ; c’est le Parlement qui, parfois, tord un peu le bras du Gouvernement. Nous l’avons d’ailleurs vu au sujet des violences faites aux femmes : la proposition de loi du député Les Républicains Aurélien Pradié a fini par aboutir grâce au Sénat.

Continuons dans cette voie transpartisane. J’adjure le Sénat de voter les améliorations que nous proposons : ne ratons pas le train de l’histoire. Il est plus que temps de sanctionner de manière efficace les auteurs de crimes sexuels sur les enfants mineurs !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion