Intervention de Claude Malhuret

Réunion du 21 janvier 2021 à 14h30
Patrimoine sensoriel des campagnes françaises — Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Claude MalhuretClaude Malhuret :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette proposition de loi destinée à protéger le patrimoine sensoriel de nos campagnes pourrait paraître surprenante. Elle s’inscrit pourtant dans le contexte de la judiciarisation croissante de nos sociétés, interrogeant l’identité de nos territoires et notre capacité à user de bon sens lorsqu’il s’agit de régler des différends.

Si les querelles de voisinage ont toujours existé, la médiatisation de certaines affaires a placé sur le devant de la scène ces marqueurs patrimoniaux que sont les bruits et les odeurs caractéristiques du monde rural.

Il s’agissait initialement d’inscrire la notion de « patrimoine sensoriel » au sein du code du patrimoine. L’auteur de la proposition de loi a eu la sagesse de soumettre son texte au Conseil d’État ; sur la base de ses recommandations, la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale a choisi de restreindre le périmètre du texte aux seuls aspects sonores et olfactifs. Les marqueurs en seront sélectionnés par une commission départementale selon qu’ils présentent ou non un intérêt suffisant pour rendre désirable leur préservation.

Aussi chant des cigales, danse des abeilles et bêlements de moutons pourraient-ils prochainement entrer dans le périmètre de protection du code de l’environnement.

Il ne s’agit pas d’opposer les agriculteurs aux néoruraux et aux touristes, mais de concilier l’ensemble des acteurs du monde rural afin de permettre le vivre-ensemble en bonne intelligence. L’intégration des nouveaux arrivants et des vacanciers aux activités d’un village est un facteur essentiel d’attractivité, et les difficultés d’adaptation à la vie locale constituent, avec les difficultés d’intégration sociale, le principal facteur d’échec de telles installations.

Or deux millions de citadins quittent chaque année les villes pour s’installer à la campagne. Ce nouvel exode urbain est un fait de société, appelé à s’accentuer. Saluons l’intérêt de nos concitoyens pour les ruralités ; mais quitter le brouhaha des grandes agglomérations n’est pas synonyme de calme absolu. La campagne a son propre rythme de vie, du son des carillons des églises au chant du coq en passant par les épandages d’engrais ou de fumier d’animaux.

Les risques de tensions entre nouveaux arrivants et agriculteurs figurent parmi les premières craintes des élus locaux soulevées par ces installations, même si les litiges ont trait avant tout à des problèmes plus structurants tels que la dépendance à la voiture, l’usage des sols ou la qualité de l’eau.

Dans un contexte où le recours au télétravail s’intensifie, les installations dans les campagnes sont un levier important de dynamisme territorial et contribuent au rééquilibrage de nos territoires ; il est essentiel de ne pas décourager les vocations tout en respectant l’identité et la culture du monde rural.

Le groupe Les Indépendants rejoint donc la commission de la culture dans ses conclusions et soutient cette proposition de loi.

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