Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes toutes et tous attachés à la défense du droit à l’avortement – Mme Corinne Imbert vient de le redire, on ne peut en douter. Chacun ici l’a répété au cours de la discussion générale, d’une manière ou d’une autre. Il s’agit d’une avancée fondamentale de la société française de ces cinquante dernières années. Et dois-je redire que 75 % des Français sont favorables à l’IVG ?
Nous sommes, sur ces travées, très majoritairement attachés à ce que ce droit puisse être effectif pour chaque femme et chaque jeune fille. Pour leur permettre d’exercer ce choix, le plus intime, nous devons sans cesse porter un regard neuf et lucide sur la pratique de l’IVG, sur les conditions dans lesquelles les femmes sont reçues en consultation et sous quels délais ; nous devons savoir quelles réponses leur sont apportées et à quels obstacles elles se heurtent encore.
Notre collègue Corinne Imbert a rappelé les statistiques qui font état d’une situation globalement acceptable quant à l’efficacité de ce droit. Néanmoins, en tant que parlementaires, nous ne pouvons nous satisfaire des moyennes que vous nous présentez, ma chère collègue. En effet, ce ne sont que des moyennes, qui masquent des inégalités criantes dans l’accès à l’IVG.
Sur le terrain, les réalités sont bien différentes. Un praticien de mon département m’a fait part des difficultés rencontrées : le délai entre la prise de rendez-vous avec un ou une gynécologue et le rendez-vous proprement dit est de trois à cinq jours à Nantes, mais il atteint quatre semaines à Paris. C’est inacceptable !
Mme Imbert nous a présenté un deuxième argument sur lequel le groupe Les Républicains s’appuie pour justifier cette motion ; il porte sur les sages-femmes et leur exercice professionnel.
Vous avez rappelé à juste titre, ma chère collègue, que l’expérimentation en question a été adoptée au sein de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. Eh bien, permettons justement à ces professionnelles formées et volontaires d’offrir aux femmes un véritable choix tout en réduisant les inégalités d’accès à l’IVG !
Mme Imbert a également déclaré ce matin, devant la commission des affaires sociales, et à l’instant encore, qu’elle ne voulait pas avoir de vision manichéenne sur ce sujet. Il est vrai que cette proposition de loi ne nous invite pas à prendre position pour ou contre l’avortement. Mais c’est bien pour cette raison que nous devons avoir pour objectif de donner consistance à ce droit existant, hérité des combats de nos mères et de nos sœurs, ainsi que des engagements politiques de nos aînés ; nous avons été plusieurs à citer Simone Veil et Gisèle Halimi.
Cette proposition de loi renforce les droits liés à l’IVG. Nous atteindrons cet objectif en acceptant le débat, et non en fuyant la réalité, comme vous voulez le faire en ce moment, mes chers collègues, courant en vain derrière la frange la plus conservatrice, pour ne pas dire réactionnaire, de votre électorat.
Le sens de cette proposition de loi est de débattre des conditions actuelles de l’exercice du droit à l’IVG et de convenir d’améliorations et d’aménagements. Aussi, mes chers collègues, débattons, discutons ! C’est bien l’un de nos droits fondamentaux ; c’est même notre devoir, notre rôle de parlementaire dans cet hémicycle.
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera contre cette motion tendant à opposer la question préalable à cette proposition de loi.