Quand on débat de l’allongement du délai d’IVG de douze à quatorze semaines, il est de fait question de le faire passer de quatorze à seize semaines d’aménorrhée. Je voudrais à ce propos répondre à mon ami Bernard Jomier que la différence est assez sensible, à l’échographie, entre ces deux délais. Ce n’est pas le sujet d’aujourd’hui, mais nous pourrions en discuter dans un autre contexte si vous le souhaitez, mon cher collègue.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire à Mme Rossignol, cette proposition de loi n’est pas, selon moi, de nature à apporter une réponse satisfaisante aux problèmes réels que rencontrent les femmes dans leurs démarches.
En particulier, elle ne supprimerait pas les disparités importantes dans l’offre de soins selon les territoires. Elle n’améliorerait en rien l’accès au premier rendez-vous et sa rapidité – les délais d’attente resteraient importants dans les territoires où l’offre orthogénique est insuffisante. Elle ne corrigerait pas l’insuffisance d’informations des femmes, qui est à l’origine de délais et d’une errance inacceptable lorsque la clause de conscience est invoquée sans être associée à l’orientation et à l’accompagnement indispensables et requis. Elle n’offrirait pas une meilleure information aux femmes pour leur choix éclairé entre IVG médicamenteuse et IVG instrumentale. Elle n’apporterait pas les moyens nécessaires au développement et à la facilitation des IVG médicamenteuses ambulatoires précoces dans les centres de santé ou de planning familial, tout en veillant à leur proximité. Enfin, elle ne résoudrait pas les difficultés des femmes – plus de la moitié d’entre elles – qui se rendent à l’étranger pour effectuer une IVG.
Avant de changer la loi, il convient toujours de s’assurer que tout a été fait pour l’appliquer. Or ce n’est pas le cas en l’espèce.
Modifier la loi conduit à ignorer ou à masquer les carences en ressources humaines, ainsi que les défaillances organisationnelles et fonctionnelles dans de nombreux territoires. On ne peut, dans ces conditions, exclure que modifier la loi, comme il est proposé dans ce texte, sans s’attaquer aux racines du problème, qui sont responsables de sa non-application, puisse avoir un effet contre-productif – je rejoins sur ce point Daniel Chasseing –, en raison des réticences exprimées par certains praticiens impliqués en orthogénie.
C’est pourquoi je voterai en faveur de cette motion.