Intervention de François Clavairoly

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 janvier 2021 à 10h00
Projet de loi confortant les principes de la république — Audition de Mm. François Clavairoly président et jean-daniel roque membre du bureau et conseiller juridique de la fédération protestante de france

François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France :

Merci de nous auditionner sur ce projet de loi. Nous vous avons transmis par écrit nos réponses à votre questionnaire, ainsi que notre document Le protestantisme alerte et conteste - c'est le plaidoyer de la Fédération protestante de France qui résume notre position sur ce projet de loi. Celle-ci se décline en quatre mots : alerte, intelligence collective, propositions et le dernier mot, qui plaît en ce lieu comme dans les églises, est le mot promesse mais en l'occurrence la promesse républicaine.

L'alerte de la Fédération protestante de France n'est pas une posture.

Pour la première fois depuis 1905, un projet de loi accumule une série de contraintes et d'obligations, et oublie, je l'espère par inadvertance, l'esprit libéral du rédacteur de la loi de 1905 qu'Aristide Briand résumait par cette phrase, reprise d'ailleurs par le Président du Sénat : « La loi doit protéger la foi aussi longtemps que la foi ne prétendra pas dire la loi. » J'aimerais insister sur la première partie de cette phrase, parce que la foi protestante comme la foi juive n'ont jamais prétendu dicter la loi dans ce pays. La loi doit protéger la foi et garantir la liberté de culte, j'insiste. Alors que l'objectif est de rendre attrayante la loi de 1905, le texte la bride, renforce la surveillance et les contrôles, et finalement c'est la liberté même du culte qui est touchée. C'est la première fois en tant que président de la Fédération protestante de France que je me trouve dans cette situation : avoir à défendre la liberté de culte. Je n'aurais jamais imaginé que, dans mon propre pays, celle-ci puisse être menacée. D'autres pays environnants et les chrétiens de ces pays s'étonnent et s'inquiètent. Pourquoi les protestants et les juifs sont-ils visés à ce point dans ce projet de loi, alors qu'ils vivent dans le respect des principes de la République depuis 115 ans ? Pourquoi revenir en arrière sur certains points, ajouter des mesures sur d'autres, pourquoi enfin empêcher la gestion des biens par exemple, au risque créer une différence de traitement entre les associations relevant de la loi de 1901 et celles relevant de la loi de 1905, comme si l'on soupçonnait les cultes d'enrichissement alors qu'il ne s'agit que de la capacité à les exercer ?

Je veux faire appel aussi à l'intelligence collective, car nous devons éviter de stigmatiser telle ou telle religion, et en particulier l'Islam. J'ai l'impression, lorsque j'entends certains critiquer les évangéliques, sans d'ailleurs vraiment les connaître, qu'ils le font uniquement pour ne pas être accusés d'islamophobie. Toutefois, le problème n'est ni les évangéliques ni les musulmans, mais bien notre capacité à nous doter d'une loi qui convienne. Or la loi de 1905 nous convient ! On ne devrait l'amender que pour l'améliorer ou la rendre plus accueillante, au service de l'intérêt général.

Il faut lutter contre le projet politique du radicalisme islamique, mais ne nous trompons pas de cible ni de moyens. Nous avons formulé des propositions.

Quant à la promesse républicaine, elle reste évidemment inaccomplie, comme toutes les promesses, mais elle n'en demeure pas moins formidable : offrir à chacun la liberté d'expression et la liberté de culte. Je veux la rappeler à ceux qui voudraient confondre laïcité et neutralisation religieuse de la société. Les religions sont des ressources et nous avons la chance extraordinaire, dans ce pays, qu'elles s'entendent bien, qu'elles se côtoient, qu'elles soient fraternelles entre elles. Si vous vous connectez sur notre site, nous retransmettons ainsi les voeux de nouvelle année de Mgr Éric de Moulins-Beaufort pour la conférence des évêques de France, de M. Mohammed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman, de M. Haïm Korsia, grand rabbin de France, de M. Olivier Van, président de l'Union bouddhiste de France et de Mgr Emmanuel Adamakis, président de l'Assemblée des évêques orthodoxes de France.

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