Le titre II de la loi concerne plus particulièrement le libre exercice du culte. Sur les 5 000 associations cultuelles qui existent en France, on estime qu'entre 3 500 et 4 000 sont des associations cultuelles protestantes. Or ce titre accumule les mesures restrictives et les contraintes supplémentaires : celles-ci vont peser sur tous les bénévoles qui animent nos associations, sans permettre de lutter contre le terrorisme ou le séparatisme. Si nous comprenons tout à fait cet objectif, nous ne voyons pas comment nous sommes concernés ! De plus, ces mesures et démarches nouvelles vont demander du travail aux bénévoles et aux services préfectoraux. Ainsi, le régime proposé de déclaration préalable a déjà existé en France entre 1988 et 2007, sans faire la preuve de son utilité, car les préfectures n'avaient pas les moyens d'étudier les demandes. Les associations cultuelles devront déposer un dossier à la préfecture avant leur création pour vérifier leur caractère cultuel, mais il est facile de déposer un dossier conforme en apparence, c'est seulement la pratique qui révèle le non-respect des lois ou des statuts. Pourquoi, dès lors, recréer cette contrainte ? En outre, le préfet a déjà des moyens de contrôle. Si l'association reçoit des libéralités, un dossier doit être constitué et les comptes doivent lui être envoyés chaque année.
Le texte prévoit aussi un contrôle des fonds venant de l'étranger, mais pourquoi ne l'appliquer qu'aux sommes reçues par les associations cultuelles ? Les sommes venant de l'étranger sont beaucoup plus importantes dans le domaine sportif et dans le domaine culturel ! Un commissaire aux comptes a un mandat de six ans : une petite paroisse rurale, ayant un budget de 50 000 euros, qui a besoin d'une aide ponctuelle de 15 000 euros d'une église américaine pour refaire sa toiture, devra y renoncer, car l'obligation de recourir à un commissaire aux comptes générerait un coût supérieur à l'aide reçue ! On pourrait multiplier les exemples.
Les associations cultuelles ont été créées en 1905, à l'issue d'un grand débat, pour recevoir les biens que les établissements publics du culte, amenés à être dissous, allaient devoir leur transférer. Mais ce régime spécifique n'est justifié que pour les associations qui ont reçu des biens à l'époque. Comment expliquer l'application de ce statut pour les associations créées ensuite ? Le directeur de cabinet d'Aristide Briand avait déjà conscience que le dispositif créé était adapté à l'époque, mais qu'il ne le serait plus par la suite. De plus, les avantages des associations cultuelles ont été étendus depuis à toutes les associations d'intérêt général, sauf celui de pouvoir disposer de biens appartenant à des collectivités territoriales, et encore ce dernier est-il très inégal, car il profite pour 92 % à des associations catholiques, pour 12 % à des associations protestantes, pour 3 % à des associations juives, et pas aux autres cultes. D'où la question : comment justifier pour ces institutions qui ne bénéficient d'aucun avantage l'existence de règles supplémentaires ? Enfin, selon l'étude d'impact, les associations cultuelles prendraient des mesures portant atteinte à la République. Mais sur les 608 rescrits administratifs déposés l'an dernier, un seul a été refusé pour un motif d'ordre public. Cela justifie-t-il cette loi ?