En janvier 2003, lors de l’examen par le Sénat du projet de loi relatif à la création d’une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République, j’avais rappelé quelques chiffres vertigineux concernant les dégazages ou déballastages sauvages et autres pollutions par rejets de résidus d’hydrocarbures auxquels se livraient en Méditerranée certains capitaines de navires, qualifiés à l’époque de « voyous des mers ».
J’avais indiqué alors que, selon certaines études, un million de tonnes d’hydrocarbures sont rejetées chaque année en Méditerranée par des bateaux qui dégazent, ce qui représente environ quinze fois la cargaison du Prestige – le mal nommé ! – ou cinquante fois le fioul lourd rejeté par l’Erika en 1999, et une surface polluée de 150 000 kilomètres carrés.
De surcroît, ces déballastages ne représentaient qu’une partie de l’ensemble des déversements constitués, pour l’essentiel, de résidus de combustibles fabriqués par tous les bateaux.
J’avais relevé que, chaque année, 1 700 déversements intentionnels étaient comptabilisés par l’Union européenne, dans une mer fragile, quasiment fermée, qui ne représente que 1 % de la surface des mers mais sur laquelle transitent 30 % du transport maritime.
Doit-on préciser que, dans le cas des marées noires provoquées par le Prestige ou l’Erika, il s’agissait d’accident, alors qu’en Méditerranée il s’agit d’actes volontaires !
Bien évidemment, de telles pollutions ne sont pas neutres pour le milieu marin et la chaîne alimentaire tout entière.
C’est pourquoi, avec mon groupe, j’avais soutenu le projet de loi relatif à la création d’une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République. Ce texte, examiné par le Sénat au mois de janvier 2003, avait été présenté en conseil des ministres, dès le 27 février 2002, par M. Yves Cochet.
Il était alors apparu au Sénat, de manière unanime d’ailleurs, que cette loi constituerait une réelle avancée, puisqu’elle permettrait de rendre applicables toutes les mesures coercitives à l’intérieur de la zone de protection, alors qu’antérieurement celles-ci ne pouvaient l’être que dans la zone des douze milles, c’est-à-dire à l’intérieur des eaux territoriales françaises, ce qui expliquait que seules 1 % des opérations illicites étaient alors sanctionnées.
Voilà environ cinq ans que cette loi a été votée et cela fait plus de quatre ans que le décret en Conseil d’État portant création d’une zone de protection écologique au large des côtes de la République en Méditerranée a été publié. En conséquence, monsieur le secrétaire d’État, il me semble possible de dresser aujourd’hui un premier bilan sur les aspects positifs de la mise en place de cette zone de protection écologique et notamment de connaître le nombre d’interpellations réalisées, de sanctions prononcées ou de décisions d’éloignement des « navires poubelles » ayant pu présenter un danger ou une menace ayant été prises.
Plus encore, il importe de savoir si la création de cette zone de protection écologique et l’aspect dissuasif des sanctions encourues – peines d’emprisonnement et fortes amendes – ont permis une réduction sensible des faits de pollution.
Ce dernier point m’amène à demander au Gouvernement, comme je l’avais fait lors de l’examen du projet de loi relatif à la création d’une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République, si les moyens, légers ou lourds, de surveillance, de contrôle et de dissuasion des personnels, bateaux, hélicoptères, avions sont en nombre suffisant. En effet, l’efficacité du dispositif est subordonnée à l’ensemble de ces moyens.
Ce qui compte également, ce sont les équipements portuaires permettant aux navires de rejeter proprement leurs déchets, afin d’éviter qu’ils ne procèdent à des dégazages sauvages. En 2003, de ce point de vue, c’était plutôt la misère, si je puis m’exprimer ainsi. Monsieur le secrétaire d’État, où en sommes-nous aujourd’hui ?
Il est un autre point de préoccupation que je souhaite aborder. Je rappelle qu’entre 20 % et 30 % du trafic maritime international transite par la Méditerranée. Certains n’hésitent d’ailleurs pas à souligner que cette mer est un « couloir à hydrocarbures ». Nous ne sommes donc nullement à l’abri d’un sinistre majeur. C’est pourquoi nous nous interrogeons sur les délais d’intervention du remorqueur basé à Toulon au cas où un accident surviendrait au large des côtes du Languedoc-Roussillon. De même, est-il possible d’en savoir plus sur la présence ou non, en Méditerranée, d’un nouveau navire antipollution, comme cela avait été évoqué en 2003 ?
Enfin, ma dernière interrogation concerne la mise en œuvre des mesures prévues par la Commission européenne, dans le cadre du « paquet Erika II », rendant obligatoire, sur les bâtiments circulant dans les eaux communautaires, l’équipement de transpondeurs, qui sont de véritables systèmes d’identification automatique permettant l’amélioration du signalement et du suivi des navires.
Dans la mesure où les dégazages effectués la nuit sont plus difficilement repérables et les contrevenants moins facilement identifiables, l’application de cette mesure, qui me paraissait indispensable à l’époque, me semble toujours aussi impérieuse.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie des précisions que vous voudrez bien m’apporter sur l’ensemble de ces points.