Je voudrais prendre deux exemples simples à cet égard.
Madame le ministre, il y a un mois environ, vous êtes venue dans le Loiret, avec le Président de la République, visiter une entreprise à la pointe des nouvelles technologies dans le domaine des économies d’énergie. En moins d’un an, cette entreprise a su construire son nouveau siège, bâtiment à énergie positive d’une technologie unique en Europe, respectant totalement les normes de haute qualité environnementale, pour un coût de revient de 1 345 euros hors taxes par mètre carré.
Jamais une collectivité publique, empêtrée dans ses contraintes du quotidien, n’aurait pu trouver le moyen de mettre en œuvre un tel projet innovant. Je puis affirmer qu’il lui aurait fallu au moins trois ans – en étant optimiste – pour réaliser un projet moins performant, qui aurait coûté au moins deux fois plus cher. C’est pour moi un constat d’échec, mais certains souhaiteraient, par conservatisme ou par archaïsme, que cela continue !
Autre exemple : une société américaine importante, mondialement connue, a eu besoin, pour se positionner sur le marché de l’e-commerce, de réaliser en quatorze mois – y compris l’instruction du permis de construire – un bâtiment de 28 000 mètres carrés équipé des outils les plus modernes de gestion et de manutention, le tout sur un terrain non aménagé. Le pari a été tenu ! Par curiosité, j’ai suivi ce dossier de A à Z : là encore, les procédures administratives nous auraient à peine permis de démarrer les travaux à l’époque où l’entreprise était déjà en exploitation, et le citoyen aurait eu à payer plusieurs millions d’euros supplémentaires.
Lorsque nous vivons cela, nous ne pouvons qu’être frustrés. Heureusement, tout espoir ne nous est pas interdit.
Lancés il y a quatre ans, les PPP ont offert une petite ouverture, sans rencontrer le succès qu’ils auraient normalement dû connaître, c’est-à-dire représenter environ 10 % du total des marchés publics. Cette formule, bien utilisée outre-Manche, devrait heureusement connaître un nouvel essor chez nous, car les modifications apportées par ce projet de loi devraient lever certains obstacles.
Jusqu’à présent, pour lancer un PPP, il fallait prouver l’urgence ou la complexité du projet. Or ces notions, surtout la première, sont empreintes de subjectivité. J’en veux pour preuve que lorsqu’un projet de loi est présenté en urgence au Parlement, les parlementaires qui soutiennent le Gouvernement confirment l’urgence, alors que l’opposition ne la ressent pas. C’est l’affaire du verre à moitié vide et du verre à moitié plein ! Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans cette insécurité juridique.
L’outil doit donc être simplifié et sécurisé, pour prendre la place qui doit être la sienne. Comme l’a dit avec beaucoup de justesse le rapporteur Laurent Béteille, depuis sa création en France en 2004, ce mode opérationnel a été finalement peu utilisé. Il était nécessaire de réviser les conditions de sa mise en œuvre pour le rendre plus accessible.
Deux nouveautés introduites au travers de ce projet de loi sont capitales.
D’une part, le recours au PPP ne se justifiera que si son intérêt économique et financier est démontré. Tout à l’heure, notre collègue Jean-Pierre Sueur a dit que cela était indémontrable. Si l’urgence est difficilement démontrable, l’intérêt économique, lui, l’est facilement, par l’établissement de comparaisons !
D’autre part, le recours au PPP sera également accepté à titre exceptionnel dans certains secteurs prioritaires.
Mes chers collègues, il faut dépasser l’idéologie ! Dans un monde ultra-concurrentiel, dans un pays où les prélèvements obligatoires sont insupportables, dans le cadre de budgets de plus en plus difficiles, a-t-on le droit de dépenser l’argent des citoyens sans compter ? Est-il normal que la règle soit de payer 20 millions d’euros ce qui en vaut 15, uniquement par confort administratif ou idéologique ?
Dans mon département, j’ai lancé en même temps la construction de deux collèges de capacité identique. Mon collègue Daniel Dubois a d’ailleurs fait tout à l’heure allusion à un petit incident qui est en train de se régler, du moins je l’espère.
L’un de ces collèges a été construit selon la procédure du PPP. Il va coûter à la collectivité 21, 3 millions d’euros sur dix ans, tout compris : construction, maintenance, financement, consommation d’énergie, gros entretien.
L’autre a été construit pour le même prix, mais hors maintenance, financement, consommation d’énergie, entretien. L’écart de coût est de 25 % sur la durée en faveur du collège construit en PPP, et le délai de réalisation de ce dernier a été inférieur de deux ans. Il suffit donc d’établir les comparaisons !
L’un de nos collègues, très opposé à ce système, sous prétexte d’un risque de généralisation, utilise de faux arguments. Bien sûr, comme il le dit, les contrats de partenariat ne sont pas la panacée ! Cela étant, il est faux de prétendre qu’ils vont se banaliser et se généraliser. L’objectif, ambitieux, est que les PPP représentent à terme 10 % des investissements publics. Peut-on parler de généralisation ? À ce niveau, le PPP relève encore de l’exception !
Le risque d’inégalité devant la commande publique est également un faux argument, tout comme la pénalisation des PME et l’impossibilité, pour les artisans, d’accéder à la commande publique à cause des PPP.
Ainsi, le conseil général du Loiret a pour la première et pour l’instant unique fois en France réalisé un collège au moyen d’un PPP. S’il l’avait construit en passant un marché d’entreprise générale de travaux, les PME et artisans auraient été dans l’impossibilité de répondre aux appels d’offres, alors que, dans le cadre du PPP, le département a pu imposer dans le cahier des charges la participation des PME à hauteur d’au moins 50 %, condition qui a été respectée.
Je sais, par ailleurs, que des PME du bâtiment, très intéressées, se regroupent afin de pouvoir constituer des dossiers de candidature à des PPP. J’ai entendu affirmer tout à l’heure qu’un certain nombre de syndicats professionnels sont opposés aux PPP : c’est le cas d’un seul, mais je peux vous dire que la Fédération française du bâtiment, syndicat national du secteur du bâtiment – vous avez assisté en même temps que moi à son assemblée générale, monsieur Sueur –, a déclaré publiquement, sous les applaudissements de l’ensemble des artisans et architectes présents, qu’il était totalement favorable aux PPP. Mme Rozier peut également en témoigner.