Intervention de Michel Billout

Réunion du 9 juillet 2008 à 15h00
Contrats de partenariat — Article 1er

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Cet amendement a pour objet de remettre en question le principe même des contrats de partenariat.

En effet, même si nous vous avons bien écoutés, madame la ministre, monsieur le rapporteur, nous ne voyons toujours pas les avantages de ce nouvel outil de la commande publique. En revanche, nous en voyons clairement les effets pervers.

Selon le Gouvernement, les contrats de partenariat constituent une solution d’avenir pour répondre aux exigences de développement local et national. Il conviendrait donc de mettre en œuvre ce type de contrat de manière plus fréquente et massive. Selon nous, ces partenariats public-privé reflètent surtout la volonté du Gouvernement de s’affranchir de la réglementation sur les marchés publics, du code des marchés publics et de la loi sur la maîtrise d’ouvrage de 1985.

Les exigences du service public que sont l’égalité d’accès et de traitement, la continuité et l’adaptabilité, ne sont pas compatibles avec l’exigence de rentabilité du privé. L’expérience le montre : plus on s’éloigne du secteur public pour aller vers une gestion privée, plus les risques sont grands que les exigences de service public soient mal respectées. Les préoccupations sont strictement commerciales, les coûts financiers élevés pour la collectivité et les usagers, ces derniers devenant de simples clients, et ne pourront accéder au service que ceux qui en ont les moyens.

L’exemple de la gestion de l’eau est une parfaite illustration de ce que je viens d’énoncer, même s’il ne s’agit pas d’un PPP. Toutes les études démontrent que la différence de prix de l’eau varie d’environ 20 % selon que la gestion est privée ou assurée en régie.

D’autres exemples démontrent que la gestion privée n’est pas obligatoirement pertinente : le transport ferroviaire avant sa nationalisation, Eurotunnel et, plus récemment, le Centre des archives diplomatiques du ministère des affaires étrangères et européennes, qui a fait l’objet d’un partenariat public-privé.

Le rapport 2008 de la Cour des comptes est très critique sur ce type de contrat, invitant « à une réflexion approfondie sur l’intérêt réel de ces formules innovantes qui n’offrent d’avantages qu’à court terme et s’avèrent onéreuses à moyen et long terme ». Et les membres de la Cour des comptes ne sont pas, me semble-t-il, de dangereux idéologues !

Les contrats de partenariat ne constituent donc pas une formule intéressante financièrement pour l’État et les collectivités territoriales. Ils n’ont d’intérêt qu’en termes de désengagement de l’État et de délocalisation de la dette publique.

Le partenaire privé se voit confier l’investissement et tout ou partie de l’exploitation. Que deviendront, à terme, les missions de service public et les personnels ? Ces derniers seront-ils intégrés au groupe privé ou tout simplement remerciés ?

De plus, le prix à payer par la collectivité publique est considérable : celle-ci doit, en contrepartie de l’absence de financement initial, payer au partenaire privé un loyer durant les dizaines d’années que dure le contrat de partenariat.

L’argument selon lequel un contrat de partenariat serait moins onéreux qu’une autre formule de contrat, marché ou délégation de service public, est parfaitement hypocrite : l’engagement financier de la collectivité pèsera sur plusieurs générations de contribuables. Le fait qu’il ne soit pas inscrit dans les comptes publics ne l’empêche pas de constituer une dette.

Le lien est évident avec la politique menée par le Gouvernement depuis 2002, et de façon encore plus intensive depuis 2007. Vous êtes tenus par des contraintes budgétaires européennes qui, avec votre politique fiscale de cadeaux aux contribuables les plus aisés, ne peuvent pas être respectées.

Alors, que faire ? Sur quel plan agir pour rééquilibrer les comptes publics ? La réponse est évidente : les équipements publics ! Ceux-ci méritent, il est vrai, des efforts réels et importants d’aménagement : les prisons, les universités, les hôpitaux sont, pour certains, dans un état critique. Au total, ils représentent un marché juteux pour les grands groupes privés du BTP.

L’astuce du partenariat public-privé réside donc dans ce montage qui consiste apparemment à dégager l’État d’investissements onéreux et à gommer ceux-ci de la dette publique. En ces temps de déficit record, les PPP sont les bienvenus ! Cela vous permettra dans le même temps de privatiser insidieusement des services publics et de supprimer des postes de fonctionnaires, et cela tout en augmentant les profits des grandes entreprises du BTP.

Ces raisons nous conduisent à rejeter les contrats de partenariat tant l’idéologie qui les anime est éloignée de la conception même de service public. C’est pourquoi nous demandons également l’abrogation de l’ordonnance de 2004.

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