Madame la secrétaire d’État, il y a plus de vingt-cinq ans, à l’époque où la biodiversité était une lubie de fantasques écolos, et où l’on pensait à fermer des lignes ferroviaires pour mettre le fret sur la route, le contournement routier d’Arles avait donné lieu à l’étude de sept trajets, afin de décharger la route nationale 113 de son flot déjà important de camions, lesquels représentaient 20 % du trafic.
Parmi les trajets envisagés, le tracé V 6, n’avait pas fait l’objet de concertation, étant, selon le rapport Astier de 1996, « très destructeur […], en tout état de cause il s’agit d’une variante à abandonner ». Quelques années plus tard, le rapport Duron, demandé par le Gouvernement, a repoussé ce projet non prioritaire à 2038. Ce dernier réapparaît en 2019, avec le tracé V 6 pour seul trajet envisagé.
Ce projet a déjà déclassé une partie du Parc naturel régional de Camargue. Au-delà, l’atteinte porterait sur des zones Natura 2000, des zones humides importantes, des terres agricoles et des rizières, mais aussi sur les 50 hectares de foin de Crau, seule appellation d’origine contrôlée (AOC) existant pour le foin… Ces impacts sur la biodiversité seraient très dommageables et irréversibles !
Une concertation publique, lancée à quelques jours des fêtes de fin d’année, a présenté au public le tracé V 6 comme étant la seule modalité de contournement, réussissant par là même l’exploit de liguer contre lui fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA), environnementalistes, éleveurs de taureaux et de chevaux, riziculteurs, chambre d’agriculture, défenseurs de la nature, scientifiques et écologistes !
Nous nous battons d’autant plus contre ce projet qu’il va à l’encontre de la nécessité actuelle de penser autrement les mobilités en dehors du « tout route » et du « tout camion ».
Alors que la France s’est engagée dans une stratégie bas-carbone, la mise en place de ce contournement provoquera une augmentation du trafic de camions récupérant les marchandises qui arrivent au grand port maritime de Marseille. En comparant le trafic à l’horizon de 2028, l’accroissement serait ainsi de l’ordre de 1 100 véhicules par jour. Le projet de concertation n’étudie même pas une possibilité de report du fret routier sur le fret ferroviaire !
Comment justifiez-vous que la seule solution envisagée soit aussi la seule qui n’ait pas été présentée à la concertation publique, alors qu’elle est la plus écocide et présente le coût le plus élevé ?
Comment expliquez-vous l’intégration d’un tel projet « tout route » dans la politique ambitieuse de transports que prétend défendre le Gouvernement, pour faire face à l’urgence environnementale et à la crise climatique ?