Lorsque l'on apprend la comptabilité dans ses études supérieures, on a le sentiment de pouvoir enfin connaître un univers rationnel et prévisible, équilibré et cohérent. Et là, une fois encore, je vais donner raison à Éric Bocquet : la dimension culturelle et la dimension philosophique de l'économie d'un pays apparaissent à travers sa conception de la comptabilité. Vous l'avez d'ailleurs dit très clairement en citant des grands groupes implantés aux États-Unis, en Chine, en Inde, au Japon ou en Europe.
N'avez-vous pas le sentiment, en tant que président d'un organisme français participant à une coopération européenne, et en ce qui concerne l'évolution durable des normes comptables, que vous êtes en fait dominé par les puissants marchés financiers anglo-saxons, qui entraînent dans leur sillage l'adhésion des grands acteurs économiques, y compris français, dont on sait que l'actionnariat est très largement détenu par des fonds et des investisseurs anglo-saxons ?
Au fond, la compétition entre les experts comptables internationaux, parmi lesquels vous avez l'immense mérite d'être profondément enraciné en France et en Europe, n'est pas à notre avantage, car les grands groupes mondiaux cherchent des partenaires mondiaux, qui diffusent une culture comptable pas totalement neutre.
Vous êtes président de la commission « climat et finance durable » de l'ACPR. Avez-vous la certitude d'avoir une compétence en la matière ? Je ne pense pas précisément à vous, mais je ne suis pas du tout certain que les financiers aient une compétence quelconque en matière d'énergie. Il est, par exemple, étonnant que l'Allemagne ait choisi le charbon et le lignite, choix totalement irrationnel quand ce pays peut recourir au nucléaire ou au gaz russe. Inversement, ne pas utiliser le charbon en Afrique peut aboutir à une déforestation massive, qui constitue une tragédie pour ces pays.