Intervention de Jean-Michel Arnaud

Réunion du 16 février 2021 à 14h30
Réforme du courtage — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Michel ArnaudJean-Michel Arnaud :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, présentée par notre homologue députée de la Loire Valéria Faure-Muntian, la proposition de loi que nous examinons vise à réguler et à structurer les activités de courtage en assurances et en opérations de banque et services de paiement. Ce texte entend non seulement accompagner les professionnels d’un secteur aujourd’hui largement éclaté, mais également garantir aux consommateurs une meilleure protection, en renforçant un cadre juridique jugé trop évasif. Le dispositif qui nous est proposé dans ce texte reprend pour l’essentiel les dispositions de l’article 207 du projet de loi Pacte, que le Conseil constitutionnel avait censurées au motif qu’il s’agissait de cavaliers législatifs.

Nous nous accorderons tous sur ce constat : le droit en vigueur n’offre pas de cadre suffisant aux métiers de courtier en assurances et d’intermédiaire en opérations de banque et en services de paiement. Or l’expansion du marché et, à travers elle, la nécessité d’un meilleur contrôle des exigences professionnelles requises invitaient le législateur à se saisir du sujet à bras-le-corps.

Les marchés d’intermédiation bancaire et assurantielle ont en effet connu une forte croissance ces dix dernières années. Depuis 2010, le nombre de courtiers en assurances a ainsi progressé de 25 %. Celui d’intermédiaires en opérations de banque et de services de paiement a, quant à lui, bondi de 60 % depuis 2016. Cette augmentation exponentielle s’explique de différentes façons. Elle tient tout à la fois aux habitudes nouvelles prises par les consommateurs, à la politique monétaire accommodante de la Banque centrale européenne et aux nouveaux produits d’épargne mis en place à la faveur de la loi Pacte.

L’activité de courtage s’est en somme développée plus rapidement qu’elle ne s’est organisée et professionnalisée. Afin d’y remédier, la présente proposition de loi s’inspire directement du modèle de corégulation appliqué aux conseillers en investissements financiers, lequel est fondé sur une obligation d’adhésion à une association professionnelle agréée par l’Autorité des marchés financiers.

Très concrètement, aussi bien pour les courtiers d’assurance ou de réassurance que leurs mandataires et les intermédiaires en opérations de banque et de services de paiement, le texte prévoit d’instaurer l’autorégulation des secteurs d’intermédiation bancaire et assurantielle, en s’appuyant sur une adhésion obligatoire à des associations professionnelles, agréées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Ces associations professionnelles auront pour but d’offrir à leurs membres un service de médiation, d’accompagnement et d’observation de leur activité, mais aussi de vérifier le respect des conditions d’accès et d’exercice de leur activité.

Deux raisons principales conduisent le groupe Union Centriste à soutenir l’esprit et le contenu de la proposition de loi qui nous est ici soumise.

Tout d’abord, l’accompagnement des intermédiaires de l’assurance et des services bancaires, qui, pour la grande majorité, sont des TPE, se voit opportunément renforcé. Ces intermédiaires trouveront désormais des interlocuteurs fiables au sein de ces associations pour les conseiller, afin qu’ils se conforment aux évolutions du cadre réglementaire de leur profession. Nous nous en réjouissons.

Ensuite, le choix d’une assurance ou de services bancaires est un moment important dans la vie de nos concitoyens et des consommateurs, qui peuvent à cette occasion s’engager pour de très longues années dans un plan de remboursement. Il est donc de notre devoir de leur garantir une protection nécessaire, ce que prévoit le présent texte. Là aussi, nous nous en félicitons.

Le groupe Union Centriste n’en est pas moins sensible aux lacunes soulevées par le rapporteur, Albéric de Montgolfier, dont nous voulons saluer le travail accompli au nom de la commission des finances. Nous pouvons en effet regretter que le dispositif ne soit pas en parfaite adéquation avec les ambitions affichées par les auteurs de la proposition de loi.

Certes, ce décalage ne leur est pas entièrement imputable, les insuffisances du texte, en particulier quant au contrôle des conditions de commercialisation des produits d’assurance, tenant – cela a été rappelé à plusieurs reprises – aux fortes contraintes du droit européen qui pèsent sur notre législation nationale. Ainsi la réglementation européenne empêche-t-elle de soumettre à une adhésion obligatoire les intermédiaires étrangers exerçant en France au titre de la libre prestation de services ou de la liberté d’établissement, un écueil qui, hélas, risque de poser de sérieux problèmes d’équité…

De même la réglementation européenne empêche-t-elle rigoureusement de transposer aux courtiers en assurances et aux intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement le modèle de corégulation qui existe pour les CIF. Là encore, cela constitue un obstacle préjudiciable et une limite au texte que nous examinons.

Quoi qu’il en soit, cette proposition de loi constitue un premier pas, un premier pas nécessaire, un premier pas utile pour mieux réguler la profession de courtier. C’est d’autant plus vrai que le dispositif issu du texte transmis par l’Assemblée nationale a pu être substantiellement enrichi par la commission des finances du Sénat. Le transfert du contrôle de l’honorabilité des dirigeants et des salariés à l’Orias, de même que la faculté offerte aux associations professionnelles d’émettre des recommandations vis-à-vis de leurs membres en matière de pratiques commerciales et professionnelles vont ainsi dans le bon sens

Vous l’aurez donc compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste soutiendra cette proposition de loi.

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