Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis de très nombreuses années, l’hôpital public est en souffrance : le manque de moyens et son corollaire, la fermeture de postes et de lits, la reconnaissance salariale insuffisante et la complexité de son organisation entraînent une carence d’attractivité chronique de nos hôpitaux.
Et pourtant, la réponse des personnels à la pandémie a été, et est encore, remarquable et admirable.
Dans ce contexte particulier, alors que le Ségur de la santé et le rapport extrêmement documenté et riche en préconisations du professeur Claris ont fait naître un certain espoir, nous examinons une proposition de loi qui, malgré son titre attractif, ne suscite que déception et frustration.
Comme l’ont déjà souligné mes collègues, la forme interroge. Cette proposition de loi, en ne reprenant que peu des dispositions du Ségur de la santé – cinq sur trente-trois –, ne répond en rien aux attentes du monde médical et hospitalier. Pire encore, elle crée une insécurité juridique et des incompréhensions. Quelle sera la place de cette proposition de loi, alors que les ordonnances promises dans le cadre de la loi Ma santé 2022 d’Agnès Buzyn n’ont toujours pas été publiées ? On est bien loin d’une simplification…
Qui plus est, cette proposition de loi comportait au départ pas moins de quarante-deux articles – ce qui est pour le moins inhabituel –, dont beaucoup ont été supprimés ou entièrement réécrits dès son examen en première lecture à l’Assemblée nationale, preuve de son impréparation !
Sur le fond, cette proposition de loi s’attaque-t-elle véritablement au problème de l’attractivité de nos hôpitaux publics ? Tient-elle compte des remontées de terrain et de la vraie vie des personnels et des usagers ? Absolument pas !
Ce texte balaie, au contraire, un nombre important de sujets sans apporter de réponse de fond ou de vision globale. Il ne fait qu’effleurer les principales préoccupations du monde hospitalier.
Loin de renforcer l’attractivité des carrières hospitalières et de valoriser les personnels soignants, le texte comporte même, sous couvert de simplification, des mesures contreproductives, tels que le bénévolat individuel ou la possibilité pour un directeur de GHT de créer un poste de praticien hospitalier.
La création d’un service d’accès au soin aurait également mérité un travail plus approfondi entre l’hôpital et la médecine de ville, en particulier avec les maisons pluridisciplinaires de santé ou les établissements de soins primaires.
La pandémie a également mis en exergue la question de la démocratie sanitaire : quelle leçon le Gouvernement en tire-t-il ? Aucune dans ce texte assurément. Pendant la première vague, les professionnels hospitaliers ont estimé que si l’hôpital avait su gérer, il le devait à l’hypermobilisation de l’ensemble des personnels, bien sûr – mais à quel prix ? –, mais aussi au fait que la santé avait été érigée au rang de priorité, tandis que le carcan de l’exécution budgétaire avait été remisé au second plan.
Quelle leçon le Gouvernement en tire-t-il ? Aucune, là non plus. Pire, il s’enferre dans la voie de l’hôpital-entreprise avec la création, à l’article 11, d’un projet managérial, que notre groupe a supprimé en commission par voie d’amendement.
Certes, il existe quelques propositions intéressantes. Je pense en particulier aux mesures concernant les sages-femmes ou les kinésithérapeutes, mais l’ensemble inspire un sentiment de déception et de frustration, qui risque de démobiliser l’ensemble du personnel hospitalier.
Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, l’examen d’un texte aussi désordonné, au champ d’application aussi large, aurait nécessité un peu plus de recul et un travail plus approfondi. Nous aurions aussi dû attendre la parution des ordonnances du Gouvernement et mieux travailler sur le champ d’application restant. Nous le devons à nos soignants et à l’ensemble de nos concitoyens, usagers de notre système de santé qui sont, eux aussi, extrêmement inquiets.