Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette fin d’après-midi, on nous demande d’examiner brièvement une proposition de loi qui se voudrait la traduction du Ségur de la santé.
Les défis sont de taille et nous appellent à redoubler d’efforts. À l’issue du Ségur, comme l’indiquait le communiqué de presse du ministère de la santé, il s’agissait de « faire tomber les murs entre l’hôpital, la médecine de ville et les établissements médico-sociaux, de lutter avec une énergie nouvelle contre les inégalités de santé, de donner plus de voix aux soignants dans la gouvernance des établissements de santé, de mieux tenir compte des enjeux environnementaux, de mettre le numérique au service de la santé de tous, et tout cela dans l’intérêt supérieur des patients et de leur santé ».
La proposition de loi que nous examinons en procédure accélérée répond-elle à cet objectif de traduire dans notre droit les objectifs du Ségur ? Malheureusement non. Ce texte ne répond pas à son ambition initiale, et les mesures proposées pour l’hôpital public restent largement insuffisantes.
La pandémie a pourtant mis en exergue les dysfonctionnements de l’hôpital et l’exaspération des soignants, qui sont épuisés et se sentent insuffisamment pris en considération. Nos infrastructures sont souvent vétustes, et le nombre de lits reste insuffisant depuis le début de la pandémie.
Les sujets essentiels, comme la formation ou l’organisation de la médecine de ville, sont complètement éludés.
Concernant l’aspect financier, nous sommes tous conscients de la nécessité de revaloriser les salaires des personnels médicaux et paramédicaux. Il est impératif de fixer des salaires décents au regard des responsabilités et de l’engagement des soignants.
En outre, il est urgent de favoriser l’installation des médecins sur l’ensemble du territoire et de résorber les déserts médicaux.
Mais cette traduction du Ségur de la santé ne propose aucune mesure forte. En ma qualité de médecin et de parlementaire, je regrette ce décalage entre les mesures annoncées lors du Ségur de la santé et cette proposition de loi aux mesurettes disparates.
Monsieur le ministre, ce texte aurait pu être l’occasion d’une vraie réforme, mais son contenu et la procédure accélérée ont considérablement amoindri l’ambition de ses auteurs.
De plus, le périmètre de la proposition de loi initiale et les règles en matière de recevabilité des amendements, qui découlent de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, n’ont pas permis au Sénat d’enrichir le texte, afin de répondre aux attentes des professionnels de santé et des patients. Malgré tout, le rapporteur et les commissaires des affaires sociales ont pu le remanier et l’améliorer.
Dix articles sur trente-sept ont été supprimés, notamment l’article 1er qui, dans sa version initiale, prévoyait la création d’une « profession médicale intermédiaire », en d’autres termes un médecin au rabais. Faisant l’unanimité contre elle, cette proposition a été abandonnée dès son examen par l’Assemblée nationale pour être remplacée par une disposition prévoyant la remise d’un rapport au Parlement dans un délai d’un an, qui a été supprimée à son tour.
L’article prévoyant l’intervention de bénévoles à titre individuel dans les établissements publics et privés de santé en dehors du cadre associatif a également été supprimé.
Les compétences des sages-femmes en matière de prescriptions d’arrêt de travail ou d’examens de dépistage et de traitement ont été élargies.
Je me réjouis aussi que la lutte contre le recours abusif à l’intérim médical ait été améliorée.
Les attentes des soignants et des Français sont importantes. Ce texte improvisé et insuffisant, dont nous ne saisissons pas les objectifs, risque de les décevoir une nouvelle fois. Néanmoins, nous allons tâcher d’améliorer cette proposition de loi dans un délai extrêmement court au regard des enjeux.