Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, la proximité guide mon action depuis juillet dernier ; je sais que nous avons cela en partage.
Il est indispensable de rendre la justice plus accessible, plus lisible et plus efficace. Nombre de territoires sont aujourd’hui marqués par la petite délinquance, qui altère la tranquillité publique, dégrade les conditions de vie et donne le sentiment d’une impunité faute d’une réponse judiciaire rapide et immédiatement visible. Les dégradations, les insultes, les rodéos urbains et les petits trafics en tous genres affectent le quotidien des Français et génèrent leur exaspération. Afin de lutter contre ces incivilités et ce sentiment d’impuissance chez les victimes, le Gouvernement s’est engagé dans une politique visant à renforcer la justice de proximité.
Le Premier ministre l’a rappelé lors de son discours de politique générale : les Français veulent une justice au cœur des territoires, des villes et de leurs quartiers. Elle doit être rendue au plus près de nos concitoyens.
La réponse à ce besoin de protection et de sécurité passe d’abord par des moyens supplémentaires.
Le budget important que j’ai décidé de consacrer au renforcement de la justice de proximité est à la hauteur des enjeux.
Les frais de justice ont été augmentés de 127 millions d’euros. Ils permettront notamment de mobiliser davantage les délégués du procureur, qui sont au plus près des justiciables et des victimes.
Une somme de 13 millions d’euros permettra de recourir plus largement à des magistrats honoraires et à des magistrats à titre temporaire et 20 millions d’euros seront investis au profit du milieu associatif de la protection judiciaire de la jeunesse, pour renforcer la prise en charge rapide des délits du quotidien.
Enfin, 1 100 emplois de contractuels, parmi lesquels 950 ont d’ores et déjà été recrutés, sont progressivement affectés dans les tribunaux et services déconcentrés de la justice.
Mais la justice de proximité passe également par une politique pénale qui prend en compte les litiges de basse intensité et qui accompagne nos concitoyens les plus démunis.
Dans une circulaire de politique générale du 15 décembre 2020, j’ai décliné les actions que je souhaitais voir rapidement mises en œuvre pour faciliter l’accès au service public de la justice et apporter une réponse pénale crédible, effective et rapide qui prenne en compte les victimes, bien sûr, tout en assurant la réinsertion des auteurs.
J’ai demandé un renforcement des audiences foraines et des permanences dans les lieux d’accès au droit, aujourd’hui appelés « points justice ». Je souhaite tout particulièrement accroître le périmètre d’intervention des délégués du procureur, qui font un travail indispensable et qui apportent, en lien étroit avec les parquets, une réponse pénale de proximité et de grande qualité. J’ai demandé aux procureurs de la République de veiller à leur forte mobilisation sur l’ensemble du territoire, afin d’être plus proche de nos concitoyens. J’ai d’ailleurs pris, le 21 décembre 2020, un décret qui précise les missions des délégués et leur donne la possibilité, pour l’exercice de leurs missions, de tenir des permanences délocalisées.
L’autorité judiciaire doit par ailleurs être plus réactive face aux incivilités. De sa rapidité dépend l’efficacité de son action. J’ai souhaité que les parquets maîtrisent davantage les délais de réponse pénale et qu’ils créent, dans les services d’une certaine importance, des filières dédiées au traitement des infractions du quotidien.
La justice doit également être plus proche des acteurs locaux, en réaffirmant des relations partenariales avec les collectivités, les élus, le tissu associatif et les acteurs de terrain, pour apporter des réponses plus réactives face aux incivilités.
L’amélioration de la justice de proximité passe enfin par des dispositions pénales plus efficaces pour lutter contre la petite délinquance qui parasite la vie de nos concitoyens. Pour les délits de faible gravité, il faut des réponses rapides et constructives.
C’est l’objet de la proposition de loi que vous examinez.
Je tiens à souligner la qualité des travaux de votre commission, qui apporte à ce texte des avancées très significatives. Je tiens à saluer tout particulièrement le travail approfondi de votre rapporteur, M. Alain Marc, notamment son amendement n° 16, qui a pour objet de favoriser, dans le cadre d’une transaction, le recours au travail non rémunéré par les maires face aux incivilités commises sur leurs communes. Il s’agit là d’une belle avancée ; j’y suis, à ce titre, très favorable.
Cette proposition de loi simplifie par ailleurs les modalités d’exécution du travail d’intérêt général (TIG).
Ce volet est essentiel, car cette réponse pénale, très pédagogique, n’a de sens que si elle est rapide. Or, aujourd’hui, le délai moyen d’exécution d’un TIG est de quatorze mois, ce qui est incompréhensible et totalement inefficace. Nous disposons de vingt mille postes de travail d’intérêt général et nous continuons à les développer. Nous avons des lieux d’accueil et des référents dans les collectivités. Il nous faut maintenant réduire impérativement le délai d’exécution de cette peine. La déjudiciarisation et la simplification des modalités de mise en œuvre du TIG, que nous soutenons, vont largement y contribuer.
Ce texte complète par ailleurs les mesures alternatives aux poursuites déjà prévues par le code de procédure pénale. Le procureur de la République pourra ainsi demander au délinquant de remettre en état les lieux ou les objets dégradés, ou le contraindre à verser une contribution citoyenne à une association d’aide aux victimes. Ces sanctions à la fois punitives et éducatives vont dans le bon sens. S’agissant notamment des jeunes ou des primo-délinquants, elles sont les mieux à même de prévenir la récidive.
La justice de proximité doit répondre au défi de réconcilier la justice du quotidien avec ses usagers. Un budget important, une politique pénale adaptée aux territoires, des dispositions plus efficaces : voilà la justice qui protège ! La proposition de loi que vous examinez y participe significativement, en renforçant la proximité, l’efficacité et la rapidité de la réponse pénale. Le Gouvernement lui est en conséquence favorable.