Merci pour votre invitation à cette table ronde. Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Pascal Cormery, président de la CCMSA, qui m'a chargé de le représenter aujourd'hui. J'ai également le plaisir de succéder à Mme Anne Gautier, vice-présidente de la Caisse centrale et présidente de la MSA du Maine-et-Loire, qui est intervenue à plusieurs reprises devant la délégation aux droits des femmes du Sénat. Le sujet de la santé des femmes en milieu rural soulève des problématiques particulières et nécessite des réponses adaptées.
Vous le savez, la MSA est chargée de gérer la sécurité sociale obligatoire des professionnels agricoles, c'est-à-dire les non-salariés agricoles et les salariés agricoles du secteur de la production, des coopératives, mais également des services. Cette diversité est une vraie richesse. Le régime agricole est organisé en guichet unique et propose à ses ressortissants une sécurité sociale globale, avec une couverture en santé, famille, retraite, accidents du travail et maladie professionnelle, sans oublier l'action sanitaire et sociale. La MSA prend par ailleurs en charge la médecine du travail ainsi que la prévention des risques professionnels. Cette organisation est un véritable atout, dans la mesure où la MSA est l'interlocutrice unique de ses ressortissants, qui font l'objet d'un accompagnement à tous les âges. Nous sommes donc en capacité de suivre la santé des femmes résidant en milieu rural à toutes les étapes de leur vie.
Le premier enjeu, qui dépasse celui des femmes, porte sur les territoires ruraux et la nécessité de réduire l'ensemble des inégalités en matière de santé. En lien avec la stratégie nationale de santé, la MSA s'implique depuis plusieurs années dans l'amélioration de l'accès aux soins et la lutte contre les déserts médicaux, en partenariat avec les ARS, l'assurance maladie, les collectivités territoriales et les représentants des professionnels de santé. Le régime agricole accompagne, sur l'ensemble du territoire, la constitution de maisons de santé pluridisciplinaires, d'équipes de soins primaires (ESP) et de communautés professionnelles territoriales de santé. Je n'en dirai pas plus, car les intervenants précédents ont largement abordé la problématique de la démographie médicale.
La MSA protège en maladie, au 1er janvier 2021, 550 448 non-salariées agricoles et 841 465 salariées agricoles. En matière d'affections de longue durée (ALD), les femmes sont en moyenne plus âgées de 5,6 ans que les hommes - 76 ans contre 70,4 ans - et le taux de prévalence brut de la prise en charge en ALD chez les hommes au 31 décembre 2018 est inférieur à celui observé chez les femmes : 204,8 %o contre 232,6 %o. Mais, si l'on regarde en détail, après standardisation par âge, sur la base de la population protégée en maladie par le régime agricole, le taux de prévalence devient plus élevé chez les hommes que chez les femmes : 235,1 %o, contre 201,0 %o. Pour les deux sexes, l'ALD la plus fréquente, au 31 décembre 2018, était le diabète de types 1 et 2 : 48 %o pour les femmes, et 61 %o pour les hommes. Les femmes du régime agricole ont un taux de prévalence standardisé supérieur aux hommes pour les ALD suivantes : maladies psychiatriques de longue durée (ALD 23) ; maladie d'Alzheimer et autres démences (ALD 15) ; hypertension artérielle sévère (ALD 12) ; polyarthrite rhumatoïde évolutive grave (ALD 22) ; périarthrite noueuse, lupus érythémateux aigu disséminé (ALD 21).
La MSA accompagne les assurés par la prévention et l'éducation à la santé pour tous les publics, en réponse à leurs besoins et au plus près des territoires. Pour ce faire, elle propose de nombreuses actions sur les territoires ruraux, afin de faire évoluer les comportements de ses assurés, mais également des habitants de ces territoires : promotion de la santé, sensibilisation, éducation à la santé, information, etc.
Dès la petite enfance, plusieurs actions de prévention sont proposées aux femmes résidant en milieu rural. Il s'agit, par exemple, d'un examen bucco-dentaire de la mère en période de grossesse et en période postnatale, ou de petits ateliers nutritifs à l'attention des parents d'enfants de zéro à deux ans. Pour les jeunes de 16 à 24 ans et les adultes de 25 à 65 ans, des examens bucco-dentaires sont régulièrement proposés aux personnes sous-consommatrices de soins dentaires. Les « instants santé » permettent de réintégrer les personnes âgées de 25 à 74 ans, mais aussi les jeunes, éloignées des soins de ville dans le parcours de santé. Cette action comprend trois étapes : un entretien motivationnel avec un infirmier, une consultation avec le médecin généraliste de son choix et des actions de suite permettant de répondre aux besoins identifiés lors des deux premières étapes. L'évaluation d'impact montre que 70 % des personnes ayant réalisé l'entretien motivationnel consultent ensuite un médecin dans les trois mois qui suivent. Retenons que 31 % des participants au premier rendez-vous sont des femmes.
Des campagnes spécifiques sont également proposées. Il s'agit, par exemple du dépistage du cancer du col de l'utérus - la quinzième semaine européenne de la prévention du cancer du col de l'utérus a démarré lundi dernier - ou du cancer du sein - 95 650 femmes ont participé à cet examen en 2019, soit 50,6 % des assurées agricoles ciblées - ou encore du parcours santé des aidants. En ce qui concerne les examens de dépistage, les caisses de MSA peuvent proposer de prendre en charge les transports, pour permettre à nos adhérents qui vivent dans des zones isolées de se rendre aux rendez-vous.
Vu la féminisation croissante de la profession agricole - même si les femmes ne représentent que 25 % des agriculteurs -, il reste beaucoup à faire en matière de santé au travail et de prévention des risques professionnels. Nous avons constaté que les femmes salariées agricoles étaient, en 2016, davantage concernées par les troubles musculo-squelettiques, avec 3,6 malades pour 1 000 affiliées contre 2,6 malades chez les hommes. Elles sont en revanche moins concernées par les accidents du travail impliquant un arrêt que les hommes, y compris pour les accidents graves. Il faut dire que le matériel agricole est parfois peu adapté au gabarit et à la force des femmes. Celles-ci rencontrent ainsi plus de pénibilité pour monter dans un tracteur, avec des marches trop hautes et des commandes trop éloignées, ou dans le port de charges lourdes, le travail de force, la répétitivité des mouvements - comme celui de la traite des vaches - ou l'exposition aux vibrations et au bruit. Malgré ces écueils, rappelons que d'importants progrès ont été réalisés ces cinquante dernières années pour améliorer l'ergonomie des outils et des matériels agricoles, ce qui a permis une meilleure accessibilité des femmes à la profession agricole. Les services des caisses de MSA travaillent quotidiennement avec les salariées et les non-salariées agricoles pour diminuer les risques professionnels, et avec les concepteurs pour améliorer le confort d'usage de leurs outils.
Comment ne pas évoquer le congé maternité des agricultrices, dont la durée minimale a été allongée de deux à huit semaines par la loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2019. Celles qui ne peuvent se faire remplacer peuvent désormais prétendre à des indemnités alignées sur celles dont bénéficient les indépendantes. C'était une promesse de campagne du Président de la République, dont nous pouvons nous féliciter, puisqu'elle permet d'améliorer la santé des femmes et des enfants. En 2019, 991 non-salariées agricoles et 12 063 salariées ont été indemnisées au titre de la maternité. Le régime agricole contribue pleinement au dispositif Prado, qui permet un retour à domicile avec l'accompagnement d'une sage-femme, entièrement prise en charge par la MSA.
Les fonds d'actions sanitaires et sociales (ASS) spécifiques des caisses de MSA financent des séjours de vacances, qui participent au mieux-être des familles et renforcent l'estime de soi, et donc l'amélioration de l'état de santé. Ces séjours apportent du répit aux familles, et notamment aux femmes, avec l'allégement de la charge mentale et parentale.
J'en viens maintenant aux actions de santé destinées aux seniors, pour lesquels les caisses de MSA proposent des actions ciblées et individualisées, toujours en lien avec les médecins généralistes, qui restent au coeur du dispositif. Même si nous en parlons moins en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19, la vaccination contre la grippe reste au coeur des priorités des politiques de santé, en France et pour la MSA. Pour la campagne 2020-2021, la MSA a décidé d'accompagner les assurées agricoles primo-vaccinantes de 65 ans dans la réalisation de leur vaccination. Ce choix est ciblé, car la femme joue un rôle prescripteur au sein du foyer. Ces assurées peuvent bénéficier d'un entretien téléphonique personnalisé de sensibilisation à la vaccination contre la grippe, réalisé par des infirmiers spécifiquement formés. Nous avons ciblé 15 563 femmes primo-vaccinées de 65 ans, et 4 138 entretiens ont été réalisés en 2020.
Dans les ateliers que la MSA propose aux seniors dans le cadre des actions liées au « bien vieillir », et qui concernent la nutrition, la stimulation de la mémoire, les activités physiques, l'aménagement du logement ou l'arrivée à la retraite, 79,9 % des participants étaient des femmes en 2019. Cela démontre l'intérêt que ces dernières portent à ces questions de prévention.
Localement, chaque caisse de MSA peut proposer des actions spécifiques. On peut ainsi citer la démarche menée par la MSA de Picardie depuis l'année 2013 et dénommée « Histoires de femmes », qui comporte une série d'ateliers de deux heures trente, une fois par mois, pendant un an, destinés aux femmes vivant en milieu rural, et permettant de prendre du temps pour soi pour recevoir et mettre en pratique des conseils qui contribuent au bien-être physique et moral. Les femmes en situation de précarité économique, sociale, environnementale, culturelle, et qui ont tendance à ne pas s'accorder du temps pour elles, pour préserver leur capital-santé, sont particulièrement concernées. L'objectif visé est de préserver et de restaurer l'image de soi, de créer du lien social et de développer son bien-être pour prendre soin de sa santé.
Voilà donc quelques exemples, non exhaustifs, d'actions menées par la MSA visant à améliorer la santé des femmes vivant en milieu rural et portant sur l'ensemble des périodes de la vie. Soyez assurés que les représentants élus de la MSA, dont je fais partie, et les salariés des caisses, sont particulièrement attachés à l'amélioration de la situation des femmes issues des territoires ruraux et/ou travaillant dans le milieu agricole, à la réduction des inégalités liées au genre et au renforcement de l'attractivité des métiers.
Pour revenir sur le sujet du bus itinérant est une solution déjà utilisée par la MSA dans le domaine de la prévention, notamment dans la caisse dont je suis vice-présidente. Nous utilisons, à vrai dire, un camion, avec une équipe pluridisciplinaire.
Je vous remercie de votre attention et reste à votre disposition pour tout éclairage qui vous serait utile.