Je remercie tous les participant(e)s pour la qualité de leurs interventions. Je voudrais partager quelques constats : je regrette tout d'abord la pénurie de moyens humains en matière de santé résultant, à l'aube des années 1970, de l'instauration du numerus clausus pour les études de médecine, de kinésithérapie ou de pharmacie, et ce, malgré la dynamique démographique qui a fait croître la population française depuis cette date de 54 à 67 millions aujourd'hui, avec une espérance de vie en hausse, entraînant une forte augmentation du nombre de personnes relevant du 4e âge, notamment en milieu rural, et donc une hausse des besoins de soins. Certes, comme l'avait annoncé le Président de la République, le numerus clausus a été supprimé, en 2017, en fin de première année de médecine mais nous devons nous cependant nous interroger sur les mesures à prendre pour que, d'ici 2030, les professionnels de santé soient présents en nombre suffisant sur tout le territoire : les orthophonistes, par exemple, ne sont pas assez nombreux alors qu'ils sont essentiels pour assurer une prise en charge rééducative post-AVC.
Je rejoins cependant le professeur Nisand pour maintenir la liberté d'installation des praticiens car imposer un lieu d'exercice n'est pas un gage de bonne adaptation au territoire. En revanche, le plafonnement des installations par département, comme c'est déjà le cas depuis une loi de 1941 pour les pharmacies, mérite d'être étudié pour assurer une meilleure répartition des professionnels de santé sur le territoire. Qu'est-il advenu de la promesse en 2009 d'une ancienne ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, de garantir l'accès à tout français à un centre hospitalier à moins d'une heure de son domicile ?
Le nombre insuffisant de professionnels se conjugue à l'octroi trop parcimonieux des crédits affectés au secteur de la santé, notamment en raison du désengagement financier des Agences régionales de santé (ARS), représentantes de l'autorité de santé publique, garante de l'organisation des soins en France selon le code de la santé publique : ainsi, des consultations de psychiatrie itinérantes ne sont aujourd'hui plus assurées.
À la question du manque de moyens humains, s'ajoute celle de la répartition des compétences : qui fait quoi et surtout qui paie quoi ? Si les ARS doivent rester le pivot de l'organisation territoriale de la santé en France, il arrive que pour pallier les difficultés de mobilité en milieu rural et y permettre l'accès aux soins, les départements et les communautés de communes investissent, sans toutefois transfert de compétences des ARS, dans des Maisons de santé pluridisciplinaires (MSP) ; dans mon département par exemple, un bus médicalisé assure des consultations bucco-dentaires itinérantes mais son coût annuel de fonctionnement s'élève cependant à 100 000 euros et pèse sur la collectivité territoriale !
Ce maillage territorial de l'offre de soins géré par les collectivités s'appuie notamment sur le réseau des centres de protection maternelle et infantile gérés par les conseils départementaux ; j'espère aussi beaucoup du développement du réseau des sages-femmes et maïeuticiens en exercice libéral et de l'extension de leurs attributions, outre celles qui relèvent de la seule obstétrique.
Sous ma présidence du conseil départemental de la Vienne, des infirmières ont été recrutées dans chaque collège pour permettre aux enfants de 11-15 ans, notamment aux collégiennes, d'avoir accès à un professionnel de santé.
Je déplore, ainsi que l'a rappelé notre collègue Marie-Pierre Richer, sénatrice du Cher, lors de la séance de questions d'actualité au Gouvernement du 28 janvier, que la réglementation actuelle impose la fermeture d'une officine et la restitution de sa licence dans des délais très brefs dès lors qu'un pharmacien n'y exerce plus. C'est un vrai drame pour les territoires ruraux qui perdent ainsi le dernier point de proximité qui permettait d'assurer, outre leur rôle de dispensation, celui de conseil pour apporter des réponses à nos concitoyens sur leurs questions de santé mais aussi pour les orienter vers des spécialistes, assurer des vaccinations, voire participer à des téléconsultations d'échographie, une fois formé à l'utilisation du matériel adapté par une sage-femme par exemple, l'interprétation des données continuant d'être réalisée par le spécialiste consulté par voie numérique.