Intervention de Valérie Boyer

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 3 mars 2021 à 16h30
Projet de loi confortant le respect des principes de la république — Audition de M. Gérald daRmanin ministre de l'intérieur et Mme Marlène Schiappa ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur chargée de la citoyenneté

Photo de Valérie BoyerValérie Boyer :

L'article 17 porte sur la lutte contre les mariages frauduleux. Lorsque, le 21 février 2018, j'ai déposé une proposition de loi sur ce sujet, à l'Assemblée nationale, plusieurs partis politiques, dont celui de la majorité, m'ont attaquée. Lorsque j'ai proposé des amendements sur ce sujet au cours de l'examen du projet de loi Asile et immigration, on a voulu faire croire qu'il s'agissait d'un épiphénomène. Votre prédécesseur, Gérard Collomb, a même rejeté des propositions qui sont désormais reprises dans votre texte. Je m'en réjouis, notamment en ce qui concerne celle dont l'objet est de rendre obligatoire la saisine du procureur de la République en cas de doute sur la sincérité du mariage.

Monsieur le ministre, j'ose espérer que ce n'est pas par posture partisane que nos propositions sont systématiquement rejetées pour être ensuite reprises. Chaque silence sur les mariages frauduleux cautionne une situation humainement honteuse et encourage l'organisation de trafics d'êtres humains.

Nous estimons à plusieurs milliers le nombre de mariages blancs ou gris qui ont lieu chaque année en France. Alors que la Belgique empêche 7 000 unions suspectes par an, la France ne dispose d'aucune statistique précise à ce sujet. Nous savons que les mariages ont concerné près de 24 % des cas de naturalisations en 2019 contre 21 % en 2017. En 2019, plus de 112 000 étrangers sont devenus français, dont 27 000 ont été naturalisés à la suite d'un mariage avec un ressortissant français. Les mariages mixtes ont gagné du terrain ces dernières années, puisqu'ils représentent désormais 27 % des unions célébrées contre 6 % en 1950 et 14 % en 2015.

Ces statistiques sont étroitement liées aux flux migratoires en France, puisque 37 % des mariages mixtes célébrés dans notre pays en 2015 ont uni un conjoint français avec une personne de nationalité maghrébine ; 22 % avec une personne de nationalité européenne ; 14 % avec un ressortissant d'Afrique subsaharienne.

Concernant les mariages frauduleux, nous ne disposons pas de statistiques officielles. Selon certains officiers d'état civil, la Tunisie, l'Algérie et le Maroc sont concernés, tout comme Haïti, certains pays d'Afrique, des pays d'Europe de l'Est, ou encore la Chine et le Vietnam dans le cas des mariages gris. Ces mariages se monnayent extrêmement cher. Pourtant, en France, nous ne savons pas combien de mariages frauduleux sont célébrés ni combien sont annulés chaque année.

Certains maires signalent à la préfecture les mariages qui peuvent sembler suspects sans forcément obtenir de réponse. Lorsque j'étais maire, j'ai même eu une fin de non-recevoir de la part du préfet.

Par conséquent, monsieur le ministre, sommes-nous en mesure de savoir combien de mariages blancs ou gris sont célébrés en France, et quelles nationalités sont concernées ? Comment faire également pour connaître la nationalité des personnes qui se trouvent en situation irrégulière sur notre territoire ? J'aimerais vraiment obtenir des réponses à ces questions, à la faveur de ce texte

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