Intervention de Marlène Schiappa

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 3 mars 2021 à 16h30
Projet de loi confortant le respect des principes de la république — Audition de M. Gérald daRmanin ministre de l'intérieur et Mme Marlène Schiappa ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur chargée de la citoyenneté

Marlène Schiappa, ministre déléguée :

S'agissant de la lutte contre le cyberislamisme, nous avons considérablement renforcé les moyens de Pharos. Dès le lendemain de l'assassinat de Samuel Paty, nous avons décidé d'élargir les horaires d'ouverture de la plateforme, de faire en sorte qu'elle soit réactive vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Les propos faisant l'apologie du terrorisme sont désormais systématiquement poursuivis.

Par ailleurs, nous avons réactivé le groupe de contact permanent du ministère de l'intérieur, créé à l'époque par Bernard Cazeneuve, pour mieux lutter contre la propagande terroriste sur internet, notamment sur les réseaux sociaux. Nous nous sommes aperçus que les réseaux sociaux mettaient souvent beaucoup de temps à répondre aux services de l'État, et refusaient parfois de livrer le nom de personnes soupçonnées par Pharos.

Nous communiquons les chiffres des signalements de la plateforme à chaque point de presse mensuel du ministère pour que les citoyens la connaissent de mieux en mieux. Nous avons mis davantage d'officiers de liaison à disposition des associations qui mènent un travail similaire, comme l'association Point de contact. C'est d'autant plus fondamental que l'on constate que les jeunes se radicalisent moins dans la rue ou à la sortie des mosquées que devant leur écran d'ordinateur ou de téléphone. C'est aussi la raison pour laquelle nous avons créé, conformément à la volonté du Président de la République, une unité de contre-discours républicain au sein du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) du ministère de l'intérieur. Ce dispositif permet notamment de lutter contre les fausses informations sur les réseaux sociaux.

Pour répondre aux questions posées au sujet des mariages forcés, nous disposons des chiffres. Dans le monde, environ 12 millions de jeunes filles sont mariées de force, et près d'une jeune fille sur cinq est mariée de force avant ses dix-huit ans. La France n'échappe pas à ce phénomène puisque, d'après les études, environ 200 000 femmes seraient mariées de force en France actuellement. Certaines associations estiment qu'il y en aurait même beaucoup plus.

Comme l'ont dit certains d'entre vous, il est effectivement très difficile pour les élus et les maires d'intervenir pour faire cesser ces pratiques. C'est d'ailleurs après avoir écouté les élus locaux que nous avons décidé d'améliorer les dispositifs existants. J'ajoute que le nombre d'appels au 3919 pour dénoncer des mariages forcés est passé d'environ 50 appels en 2017 à près de 60 appels en 2018. Comme pour les certificats de virginité, nous constatons que les alertes émanent très régulièrement des ONG qui accompagnent ces jeunes filles. Nous avons voulu renforcer leurs moyens.

Dans ce projet de loi, notre objectif principal est de renforcer le dispositif de lutte a priori contre ces mariages. Nous voulons garantir la liberté matrimoniale entre les futurs époux. L'article 17 renforce le dispositif de protection du consentement des futurs époux lors de la célébration. Nous imposons à l'officier d'état civil de s'entretenir séparément avec chacun des futurs époux dès lors qu'il y a un signalement ou un doute sur le caractère libre du consentement après l'audition commune des futurs époux et après l'examen des pièces fournies. Désormais, l'officier d'état civil devra saisir le procureur de la République en vue d'une éventuelle opposition à un mariage s'il conserve des doutes à l'issue de l'entretien.

Pour garantir que le dispositif soit le plus efficient possible, nous sommes en train de travailler à l'élaboration d'un guide permettant de recenser les nouveaux droits des femmes, notamment des migrantes ou des primo-arrivantes. Ce guide sera traduit dans plusieurs langues. En outre, nous adresserons un guide pratique aux élus, notamment ceux des petites communes, afin que la mesure s'applique pleinement.

Je précise que nous n'imposons pas un contrôle du consentement des époux lors de chaque mariage : nous faisons confiance aux élus et au discernement de l'officier d'état civil qui conduit les entretiens.

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