Intervention de Éric Dupond-Moretti

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 3 mars 2021 à 16h30
Projet de loi confortant le respect des principes de la république — Audition de M. éric duPond-moretti garde des sceaux ministre de la justice

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Le présent texte ne peut que nous réunir dans ses objectifs, à savoir renforcer les principes qui fondent notre République afin de lutter efficacement contre les idéologies qui la menace, traiter en amont le fléau du séparatisme islamiste dans sa globalité, protéger nos enfants du poison de la transmission de valeurs antirépublicaines en aval, poursuivre et sanctionner plus durement ceux dont le but est de substituer à notre République un obscurantisme rance.

Plusieurs dispositions que je porte au nom de mon ministère ont été enrichies par le débat parlementaire afin d'offrir les outils nécessaires aux services d'enquête et aux magistrats.

Tout d'abord, l'article 3 fait évoluer le dispositif relatif au fichier des auteurs d'infractions terroristes (Fijait). Nous souhaitons ainsi renforcer la lutte contre le terrorisme en vérifiant que toute personne postulant un emploi ou effectuant une demande d'habilitation n'a pas été condamnée ou mise en examen pour des infractions en lien direct ou indirect avec des activités terroristes. C'est pourquoi nous ajoutons les infractions d'apologie et de provocation au terrorisme à la liste de celles qui donnent lieu à une inscription à ce fichier.

Nous souhaitons également, avec l'article 4 de ce projet de loi et la création d'un délit de menace séparatiste, renforcer la protection des personnes qui exercent des missions de service public contre ceux qui, par des comportements violents, menaçants, intimidants, souhaitent porter atteinte à notre capacité à faire société. Il est urgent que nos agents publics, lorsqu'ils sont confrontés à ces comportements séparatistes, se sachent protégés par la loi, particulièrement par la création de ce délit spécifique.

Ce projet de loi répond également à cette menace nouvelle qui consiste à détourner l'usage des réseaux sociaux pour les transformer en vecteurs de diffusion de la haine la plus décomplexée et la plus nuisible. L'effroyable assassinat de Samuel Paty doit nous conduire à lutter efficacement contre cette haine. Ainsi l'article 18 crée-t-il le délit de mise en danger de la vie d'une personne par diffusion d'informations personnelles permettant son identification. Même si cette mise en danger n'est pas suivie d'effet, il convient de contrecarrer la volonté de nuire à autrui.

La diffusion d'informations personnelles sur internet sera donc punie si l'on démontre l'intention manifeste de l'auteur de porter gravement atteinte à la personne visée. Les députés ont ainsi souhaité faire préciser cette intention en indiquant que l'auteur ne pouvait ignorer le risque auquel il exposait les victimes.

Enfin, l'article 20 permettra d'aligner le temps de la réponse judiciaire au rythme des infractions commises en ouvrant le champ de la comparution immédiate aux auteurs de propos incitant à la haine sur internet. L'Assemblée nationale a d'ailleurs complété la liste des infractions concernées afin d'appréhender le phénomène de la haine en ligne de façon la plus large possible.

Ce mode de poursuites permettra d'apporter une réponse rapide et nécessaire qui fait aujourd'hui défaut à l'arsenal pénal. Il est impératif de casser la spirale de haine qui prospère aujourd'hui sur la toile et dont les auteurs tardaient trop souvent à être jugés. Cette disposition, fruit d'une très large consultation avec les professionnels du secteur de la presse, consiste uniquement à modifier le code de procédure pénale.

Nos débats permettront sans doute d'enrichir encore ce texte que j'estime essentiel pour nous prémunir des dérives séparatistes qui menacent la Nation et la République.

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