La Depp avait aidé à mettre en place des expérimentations de mixité sociale. L'exercice se révèle assez compliqué. En France, la ségrégation scolaire est en très grande partie due à la ségrégation résidentielle. Dans certains endroits, les collèges comprennent un très fort pourcentage d'élèves issus de milieux défavorisés, mais il en est de même pour tous les collègues autour. La politique du logement peut entraîner une concentration.
Nous avions repéré des collèges assez proches où nous pouvions mettre en place des expérimentations avec des mobilités. Des équipes de chercheurs travaillent sur le sujet. Il s'agit d'une démarche de long terme, car il importe d'évaluer l'effet sur plusieurs années. Les premiers résultats sont parus sur Paris. Ils montrent que globalement, l'expérience fonctionne en termes de profil social des collèges : la mixité s'améliore.
Sur la mesure des compétences, les chercheurs évaluent à la fois les compétences cognitives et les compétences socio-comportementales, les réseaux d'amis, des sujets sur lesquels la mixité peut apporter énormément. Nous avons commencé à suivre cette cohorte, mais nous avons perdu un an, les évaluations étant prévues en mai 2020.
Nous pourrons appréhender les effets en termes de composition des collèges, mais aussi les effets sur les résultats des élèves. Il est important d'apprécier la façon dont les élèves vont se donner plus d'ambition. Même à compétences équivalentes, les élèves ne se projettent pas de la même façon selon leur origine sociale. Nous avons des marges de manoeuvre en la matière. Nous n'avons pas observé de fuite vers le privé. Ces expérimentations relèvent d'une construction des rectorats avec les collectivités territoriales et le secteur privé. Il faut accompagner les familles et les établissements.
Sur l'orientation professionnelle, les élèves des zones rurales ou des lycées agricoles s'orientent plus facilement vers le professionnel que vers le général. Nous pouvons nous demander si cette orientation est choisie ou subie. Ces élèves souhaitent-ils rester vivre sur leur territoire ? Est-ce parce qu'ils ne s'imaginent pas bouger ? Nous avons construit un indice d'éloignement des collèges qui mesure, pour un collège donné, le fait que des élèves viennent de zones éloignées, mais aussi le fait que le collège lui-même est éloigné d'une certaine offre scolaire, d'équipements sportifs, de bibliothèques, de théâtres, etc. Nous constatons que les collèges les plus éloignés affichent des résultats scolaires plutôt bons, mais nous retrouvons cette orientation vers le professionnel. Ce constat renvoie vers un travail d'accompagnement sur l'orientation, les cordées de la réussite ou les contrats locaux d'accompagnement. Il faut donner de l'ambition à ces jeunes pour qu'ils se projettent ailleurs, accompagner leur mobilité, etc.