Intervention de Jacques Grosperrin

Réunion du 11 mars 2021 à 10h30
Droit à mourir dans la dignité — Article 1er

Photo de Jacques GrosperrinJacques Grosperrin :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je connaissais bien Paulette Guinchard-Kunstler également – je lui ai succédé à l’Assemblée nationale. Elle a choisi de mettre un terme à son insupportable maladie et de recourir au suicide assisté, qu’elle a rendu public pour faire évoluer la législation. Son engagement humain et social était reconnu et elle était respectée. Tous ses proches ont été bouleversés et j’ai une pensée pour eux, parce qu’il n’a pas été simple de l’accompagner.

Que nous apprend ce geste ?

D’un point de vue individuel, une telle décision est éminemment personnelle et relève de l’intime.

D’un point de vue collectif, le Sénat ne peut pas légiférer dans la précipitation – ce serait contre-productif. En effet, la loi Claeys-Leonetti repose sur un équilibre consensuel : elle évite l’acharnement thérapeutique, mais elle est très différente d’une loi qui autoriserait l’euthanasie.

Lorsque la maladie est violente, certains décident de quitter la vie. J’entends que les dispositions de cette loi ne sont peut-être pas tout à fait adaptées à tous les cas, mais aucun dispositif légal ne peut être adapté à des situations singulières. Si l’on applique strictement le droit, on laisse des gens dans une grande souffrance. Certains malades n’entrent pas dans le cadre de la loi. Il faut donc la faire évoluer pour prendre en compte ces situations exceptionnelles.

Pour autant, j’ai parlé au téléphone avec Régis Aubry, qui a suivi Paulette Guinchard-Kunstler : tout ne peut pas être dit, notamment sur les raisons, très personnelles, qui l’ont conduite à prendre sa décision, mais Régis Aubry est effrayé de voir ce qui se passe en Belgique en matière d’euthanasie. Il est effrayé parce que la médecine génère parfois ce genre de fin de vie. « Est-ce que je dois faire, m’a-t-il demandé, ce que je sais faire ? »

Ouvrir vite et fort l’euthanasie serait très dangereux pour les personnes âgées : certaines pourraient se suicider trop rapidement. Il nous faut plutôt mettre en place un véritable accompagnement du vieillissement, favoriser la recherche sur la fin de vie, créer des instituts des vulnérabilités, etc.

En tout cas, il ne faut pas mélanger l’éthique et la morale. Les juristes, les parlementaires, les médecins, les familles doivent discuter ensemble. Nous avons besoin d’équipes pluridisciplinaires pour qualifier les situations exceptionnelles, mais souvenons-nous que la vraie vie est faite de situations exceptionnelles !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion