Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, dans un contexte budgétaire extrêmement serré, le budget de la justice pour 2007 apparaît globalement comme un bon budget. Je me contenterai donc d'insister sur quelques points.
En ce qui concerne d'abord la maîtrise des frais de justice, sur laquelle nous émettions de réelles inquiétudes l'an dernier, force est de constater que tous les acteurs concernés se sont mobilisés et que la tendance à l'augmentation de cette enveloppe s'est inversée.
Cette évolution favorable est due aux mesures prises par l'administration centrale - je pense notamment à la tarification des « écoutes téléphoniques » et des analyses génétiques -, mais aussi aux efforts faits par les magistrats dans leurs prescriptions. Ce résultat montre que les professionnels de la justice sont prêts à se mobiliser pour que l'application de la LOLF soit une réussite.
Il convient donc de tirer toutes les conséquences de cette implication en laissant aux ordonnateurs secondaires toute la marge de manoeuvre et toute la souplesse que devrait leur donner la LOLF et que l'administration centrale a eu un peu trop tendance, en 2006, à restreindre.
La fongibilité des crédits ne doit pas seulement être une bonne idée ; elle doit, monsieur le garde des sceaux, devenir une réalité. Je souhaiterais donc que vous m'indiquiez ce que vous comptez faire pour que les chefs de cours disposent réellement de la marge de manoeuvre qu'ils sont en droit d'attendre de la mise en oeuvre de la LOLF.
S'agissant du périmètre de la mission « Justice », je ne redirai pas tout ce que j'ai dit samedi dernier dans le cadre de l'examen des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Je rappellerai simplement que la commission des lois souhaite, plus encore que l'an dernier en raison des réformes annoncées en la matière, que le Conseil supérieur de la magistrature figure, comme les autres institutions créées par la Constitution, dans la mission « Pouvoirs publics ». Cela correspondrait mieux aux spécificités de cette institution dont l'indépendance est appelée à s'accroître.
J'ajouterai que la CNIL, en cohérence avec la réforme d'août 2004, qui a renforcé son rôle et ses pouvoirs, devrait également être sortie de la mission « Justice » et voir son budget en quelque sorte « sanctuarisé » dans une mission spécifique qui pourrait regrouper les autorités administratives indépendantes gardiennes des libertés publiques que sont, par exemple, outre la CNIL, le Médiateur de la République, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, le Conseil supérieur de l'audiovisuel ou la Commission d'accès aux documents administratifs. La commission des lois rejoint donc pleinement la position de la commission des finances.
Monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous agir en ce sens, à la fois pour le Conseil supérieur de la magistrature et pour la CNIL ?
Au regard des objectifs de créations d'emplois fixés par la loi d'orientation et de programmation pour la justice, nous constatons que, si les créations d'emploi seront réalisées à 82 % à la fin de 2007 en ce qui concerne les magistrats, elles ne le seront qu'à 58 % seulement pour les personnels des greffes.
Le nombre moyen de greffiers par magistrat, qui est aujourd'hui inférieur à ce qu'il était en 2000, reste nettement insuffisant. De même qu'il ne faut pas décourager les magistrats en encadrant trop strictement l'application de la LOLF, il ne faut pas démobiliser les personnels des greffes en limitant les moyens consacrés au recrutement et à la motivation de ces agents qui, aux cotés des magistrats, participent activement à la bonne marche de notre justice et ont vu leurs tâches s'alourdir ces dernières années.
Les décalages dus à l'allongement de la durée de leur formation et les départs en retraite très nombreux auxquels nous allons assister dans les prochaines années nous imposent de porter une attention particulière à cette situation. Que comptez-vous faire concrètement, monsieur le garde des sceaux, pour l'améliorer ?
Le dernier point que j'aborderai concerne l'évolution des crédits consacrés à l'aide juridictionnelle.
La revalorisation prévue de 6 % de l'unité de valeur n'est pas à la hauteur des besoins. Si plusieurs mesures ont été prises ces dernières années pour améliorer les conditions de rémunérations des avocats au titre de l'aide juridictionnelle, celles-ci restent encore nettement insuffisantes, d'autant que certaines missions ne sont pas rétribuées et que le nombre de bénéficiaires ne cesse d'augmenter.
Le faible niveau de l'aide juridictionnelle entraîne donc de grosses difficultés pour nombre de cabinets d'avocats, qui se démotivent et sont de plus en plus réticents à prendre en charge un justiciable dans le cadre de l'aide juridictionnelle.
La prochaine réforme de l'assurance de protection juridique ne règlera pas entièrement ce problème, monsieur le garde des sceaux, et le maintien de l'accès des plus démunis à la justice passe donc également par une augmentation plus substantielle des crédits consacrés à l'aide juridictionnelle. Aussi je vous présenterai un amendement, adopté à l'unanimité par la commission des lois - comme l'amendement identique présenté par la commission des finances l'a été par cette dernière -, visant à augmenter ces crédits.
Tels sont, monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les éléments que je souhaitais, dans le délai restreint qui m'est accordé, apporter à ce débat. Sous ces réserves, la commission des lois émet un avis favorable sur les crédits de la mission « Justice ».