Bref, cela ne nous rajeunit pas et, surtout, les technologies ont largement évolué depuis cette époque.
Ainsi, chacun le sait, il y a aujourd’hui, dans la plupart de nos communes, des caméras à zoom contrôlable ; on peut le constater, en visitant les centres de supervision urbaine. Ces caméras peuvent zoomer pour permettre, par exemple, de lire une plaque d’immatriculation au bout d’une rue. Or cela n’est pas prévu par la législation.
Autre exemple, la caméra dôme, qui filme à 360 degrés. On en voit, elles sont partout, tout le monde en installe, quel que soit le bord politique de la municipalité, mais elles non plus ne sont pas prévues par la législation.
Par conséquent, cette proposition de loi n’aborde pas des sujets qui seraient complètement orwelliens. Au contraire ! Il s’agit d’encadrer ce qui est pratiqué par les collectivités locales, notamment dans les centres de supervision urbaine, sans être régi par les lois de la République, ce qui – convenons-en – pose quelques difficultés par rapport aux libertés publiques et à l’accès aux images…
En second lieu, indépendamment des évolutions technologiques, le droit européen a avancé. J’ai été interpellé précédemment à propos du droit européen sur d’autres sujets ; eh bien, le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données, le fameux RGPD que vous avez vous-même transposé, représente plutôt une garantie pour les citoyens qu’un pas vers une société de contrôle.
De même, la directive (UE) 2016/680 du même jour relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel, dite Police, justice, a fait naître des dispositions européennes qui devraient s’appliquer à notre droit.
Enfin, M. le rapporteur, qui est membre de la CNIL, sait que de très nombreuses modifications ont été apportées à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, pour ce qui concerne l’accès aux fichiers, sans jamais concerner les images des caméras de vidéoprotection.
Ainsi, non seulement les dispositions de l’article 20, qu’il ne faut surtout pas supprimer, sont importantes pour l’action des forces de police – tant pour la sécurité publique que pour la police judiciaire – et des maires, qui doivent s’inscrire dans le bon cadre légal, mais elles sont même demandées par la CNIL ! M. le rapporteur l’a lui-même indiqué : la CNIL relève notamment que les dispositions relatives à la vidéoprotection contenues dans les articles de la proposition de loi « ne permettent […] pas aux responsables de traitement de connaître l’état réel de leurs obligations en la matière ni aux personnes concernées de savoir de quelle manière exercer leurs droits. »
On peut donc être contre les caméras de vidéoprotection et contre la proposition de loi relative à la sécurité globale, mais on ne peut pas faire dire aux articles de ce texte ce qu’ils ne disent pas ! En particulier, l’article 20 constitue un encadrement des pratiques, il assure une meilleure transparence, il permet aux maires et aux agents chargés du visionnage des images de vidéoprotection de regarder la réalité en face et il adapte notre droit tant aux règlements et directives européens qu’aux technologies.
Bref, cet article ne mérite pas le procès que l’on vient de lui faire.